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ARGIR E.

Vous rendez quelque vie à ce cœur abatu.
Eh! qui pour nous défendre entrera dans la lice?
Nous fommes en horreur, on eft glacé d'effroi;
Qui daignera me tendre une main protectrice ?
Je n'ofe m'en flater: qui combattra?

TANCREDE.

Qui? moi,

Moi, dis-je ; & fi le ciel féconde ma vaillance,

Je demande de vous, Seigneur, pour récompense
De partir à l'instant fans être retenu,

Sans voir Aménaïde, & fans être connu.

ARGIR E.

2

Ah! Seigneur, c'eft le ciel, c'est Dieu qui vous envoye.
Mon cœur trifte & flétri ne peut goûter de joie ;to
Mais je fens que j'expire avec moins de douleur.
Ah! ne puis-je fçavoir à qui, dans mon malheur,
Je dois tant de refpect & de reconnaissance?
Tout annonce à mes yeux vôtre haute naiffance.
Hélas! qui vois-je en vous?

TANCRED E.

Vous voyez un vengeur.

D 3

SCENE

SCENE V.

ORBASSAN, ARGIRE, TANCREDE.

L

Chevaliers, Suite.

ORBASSAN (à Argire.)

'Etat eft en danger, fongeons à lui, Seigneur.

Nous prétendions demain fortir de nos murailles Nous fommes prévenus. Ceux qui nous ont trahis

Sans doute avertiffaient nos cruels ennemis.

Solamir veut tenter le deftin des batailles;
Nous marcherons à lui. Vous, fi vous m'en croyez,
Dérobez à vos yeux un fpectacle funefte,
Infuportable, horrible à nos fens effrayés.

ARGIR E.

Il fuffit, Orbaffan; tout l'efpoir qui me refte,
C'est d'aller expirer au milieu des combats.

(montrant Tancrède.)

Ce brave Chevalier y guidera mes pas;
Et malgré les horreurs dont ma race eft flétrie,
Je périrai du moins en fervant ma patrie.

ORBAS SAN.

Des fentimens fi grands font bien dignes de vous.
Allez, aux Mufulmans portez vos derniers coups.
Mais avant tout, fuyez cet appareil barbare,

Si peu fait pour vos yeux, & déja qu'on prépare;

ARGIR E.

On approche.

Ah! grand Dieu!

OR BASSA N.

Les regards paternels

Doivent fe détourner de ces objets cruels.
Ma place me retient, & mon devoir févère
Veut qu'ici je contienne un peuple téméraire ;
L'inexorable loi ne fait rien ménager:
Toute horrible qu'elle eft, je la dois protéger.
Mais vous qui n'avez point cet affreux ministère,
Qui peut vous retenir ? & qui peut vous forcer
A voir couler le fang que la loi va verfer?

On vient, éloignez vous.

TANCREDE (à Argire.)

Non, demeurez, mon père.

OR BASSA N.

Eh qui donc êtes-vous?

TANCRED E.

Vôtre ennemi, Seigneur,

L'ami de ce vieillard, peut-être fon vengeur,
Peut-être autant que vous à l'Etat néceffaire.

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SCENE VI.

La Scène s'ouvre, on voit AMENAIDE au milieu des Gardes; les Chevaliers, le peuple remplissant la place.

ARGIRE ( à Tancrède. )

Genéreux inconnu, daignez me foutenir ;

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Cachez moi ces objets, c'eft ma fille elle-même,

TANCRED E.

Quels momens pour tous trois!

A MENA ï DE.

O justice suprême !

Toi qui vois le paffé, le préfent, l'avenir,
Tu lis feule en mon cœur, toi feule es équitable.
Des profanes humains la foule impitoyable
Parle & juge en aveugle, & condamne au hazard,
Chevaliers, citoyens, vous qui tous avez part
Au fanguinaire arrêt porté contre ma vie,
Ce n'eft pas devant vous que je me juftifie.
Que ce ciel qui m'entend, juge entre vous & moi,
Organes odieux d'un jugement inique,
Oui, je vous outrageais, j'ai trahi vôtre loi;
Je l'avais en horreur, elle était tyrannique,
Oui, j'offenfais un père, il a forcé mes vœux.
J'offenfais Orbaifan, qui fier & rigoureux,

Préten

Prétendait fur mon ame une injufte puiffance.
Citoyens, fi la mort est dûe à mon offense,

Frapez; mais écoutez; fachez tout mon malheur.
Qui va répondre à Dieu, parle aux hommes fans peur.
Et vous, mon père, & vous, témoin de mon fuplice
Qui ne deviez pas l'être, & de qui la justice

( apercevant Tancrède.)

Aurait pû... Ciel ! ô ciel! qui vois-je à fes côtés ?
Eft-ce lui? je me meurs.

( elle tombe évanouie entre les gardes.)

TANCRED E.

Ah ma feule préfence

Eft pour elle un reproche ! il n'importe, — arrêtez,
Miniftres de la mort, fufpendez la vengeance;
Arrêtez, citoyens, j'entreprends fa défense,
Je fuis fon Chevalier. Ce père infortuné,

Prêt à mourir comme elle, & non moins condamné,
Daigne avouer mon bras propice à l'innocence.
Que la feule valeur rende ici des arrêts,
Des dignes Chevaliers c'eft le plus beau partage.
Que l'on ouvre la lice à l'honneur, au courage;
Que les juges du camp faffent tous les apprêts.
Toi, fuperbe Orbaffan, c'eft toi que je défie;
Vien mourir de mes mains, ou m'arracher la vie.
Tes exploits & ton nom ne font pas fans éclat ;
Tu commandes ici, je veux t'en croire digue:
Je jette devant toi le gage du combat.

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(il jette

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