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tout l'univers écoute avec un silence respectueux : il nous avertit qu'il va mourir, et en même temps il nous dit qu'il faut mourir avec lui. Quelle est cette mort? C'est qu'il faut arracher son cœur de tout ce qu'il aime désordonnément, et sacrifier à Jésus ce péché régnant, qui empêche que sa grâce ne règne en nos cœurs.

Chrétiens, Jésus va mourir : il baisse la tête, ses yeux se fixent; il passe, il expire : c'en est fait, il a rendu l'âme. Sommes-nous morts avec lui? sommes-nous morts au péché? allons-nous commencer une vie nouvelle avons-nous brisé notre cœur par une contrition véritable, qui nous fasse entrer aujourd'hui dans la société de ses souffrances? Qui me donnera, chrétiens, que je puisse imprimer dans vos cœurs ce sentiment de componction? Que si mes paroles n'en sont pas capables, arrêtez les yeux sur Jésus, et laissez-vous attendrir par la vue de ses divines blessures. Je ne vous demande pas pour cela, messieurs, que vous contempliez attentivement quelque peinture excellente de JésusChrist crucifié : j'ai une autre peinture à vous proposer; peinture vivante et parlante qui porte une expression naturelle de Jésus mourant. Ce sont les pauvres, mes frères, dans lesquels je vous exhorte de contempler aujourd'hui la passion de Jésus. Vous n'en verrez nulle part une image plus naturelle. Jésus souffre dans les pauvres; il languit, il meurt de faim dans une infinité de pauvres familles. Voilà donc dans les pauvres Jésus-Christ souffrant; et nous y voyons encore, pour notre malheur, Jésus-Christ abandonné, JésusChrist délaissé, Jésus-Christ méprisé. Tous les riches devraient courir pour soulager de telles misères; et on ne songe qu'à vivre à son aise, sans penser à l'amertume et au désespoir où sont abîmés tant de chrétiens! Voilà donc Jésus délaissé; voici quelque chose de plus :

Jésus se plaint par son prophète, de ce que l'on a ajouté à la douleur de ses plaies: Super dolorem vulnerum meorum addiderunt'; de ce que dans sa soif extrême on lui a donné du vinaigre: n'est-ce pas donner du vinaigre aux pauvres que de les rebuter, de les maltraiter, de les accabler dans leur misère et dans leur éxtrémité déplorable? Ah! Jésus, que nous voyons dans ces pauvres peuples une image trop effective de vos peines et de vos douleurs! Sera-ce en vain, chrétiens, que toutes les chaires retentiront des cris et des gémissements de nos misérables frères, et les cœurs ne serontils jamais émus de telles extrémités?

Sire, Votre Majesté les connaît, et votre bonté paternelle témoigne assez qu'elle en est émue. Sire, que Votre Majesté ne se lasse pas puisque les misères s'accroissent, il faut étendre les miséricordes; puisque Dieu redouble ses fléaux, il faut redoubler les secours, et égaler, autant qu'il se peut, le remède à la maladie. Dieu veut qu'on combatte sa justice par un généreux effort de charité, et les nécessités, extrêmes demandent que le cœur s'épanche d'une façon extraordinaire. Sire, c'est Jésus mourant qui vous Y exhorte; il vous recommande vos pauvres peuples: et qui sait si ce n'est pas un conseil de Dieu d'accabler, pour ainsi dire, le monde par tant de calamités, afin que Votre Majesté portant promptement la main au secours de tant de misères, elle attire sur tout son règne ces grandes prospérités que le Ciel lui promet si ouvertement? Puisse Votre Majesté avoir bientôt le moyen d'assouvir son cœur de ce plaisir vraiment chrétien et vraiment royal, de rendre ses peuples heureux : ce sera le dernier trait de votre

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SUR LA PASSION DE JÉSUS-CHRIST.

bonheur sur la terre; c'est ce qui comblera Votre Majesté d'une gloire si accomplie, qu'il n'y aura plus rien à lui désirer que la félicité éternelle, que je lui souhaite dans toute l'étendue de mon cœur. Amen.

SERMON

PRÊCHÉ DEVANT LE ROI.

SUR LA JUSTICE.

Origine de la justice parmi les hommes. Devoirs communs qu'elle impose à tous : devoirs particuliers qu'elle prescrit à ceux qui ont en main l'autorité publique. Désordres presque universels que l'intérêt propre cause dans le monde. Soins et précautions que les hommes et surtout les grands sont obligés de prendre pour bien connaître la vérité. Charité et condescendance que nous devons avoir les uns pour les autres. Clémence que les princes doivent faire paraître dans l'exercice de la justice et dans le soulagement de la misère.

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Exulta satis, filia Sion; jubila, filia Jerusalem: ecce Rex tuus venit tibi justus et salvator. Réjouissez-vous, ô Jérusalem! votre Roi juste et sauveur vient à vous.

Zach., IX, 9.

La prophétie que j'ai récitée se rapporte manifestement à l'entrée que fait aujourd'hui le Sauveur des ames dans la ville de Jérusalem. Le prophète, pour célébrer dignement le triomphe de ce Roi de gloire, lui donne ces deux grands éloges, qu'il est juste, et qu'il est sauveur; c'est-à-dire qu'il unit ensemble, pour l'éternelle félicité du genre humain, ces deux qualités vraiment royales, ou plutôt vraiment divines, la justice et la bonté.

Au bruit des acclamations que fait retentir le peuple juif en l'honneur de ce Roi juste et sauveur, je me sens invité, messieurs, à vous parler en ce jour de ce puissant appui des choses humaines, je veux dire la justice; et de vous la faire voir comme elle doit être, avec le nécessaire tempérament de la bonté et de la clémence.

De tous les sujets que j'ai traités, celui-ci me paraît le plus profitable; mais je ne puis vous dissimuler qu'il

m'étonne par son importance, et m'accable presque de son poids car encore que la justice soit nécessaire à tous les hommes, dont elle doit faire la loi immuable, il est vrai qu'elle enferme en particulier les principales obligations des personnes les plus importantes. Et, messieurs, je n'ignore pas avec quelle considération, quel respect et quelle crainte on doit non-seulement traiter, mais encore regarder tout ce qui les touche, même de loin et en général. Mais, sire, votre présence, qui devrait m'étonner dans ce discours, me rassure et m'encourage. Pendant que toute l'Europe admire votre justice, et qu'elle est le plus ferme fondement sur lequel le monde se repose, vos sujets ne connaîtraient pas le bonheur qu'ils ont d'être nés sous votre empire, s'ils appréhendaient de parler devant leur monarque d'une vertu qui fait sa gloire, aussi bien que sa plus puissante inclination. Je confesserai toutefois que si j'étais dans une place en laquelle il me fût permis de régler mes paroles suivant mes désirs, je me satisferais beaucoup davantage en faisant des panégyriques qu'en proposant des instructions: mais comme le lieu où je suis m'avertit que je dois ma voix tout entière au Saint-Esprit qui m'ouvre la bouche, j'exposerai aujourd'hui, non point mes pensées, mais ses préceptes, avec cette secrète satisfaction, qu'en récitant ses divins oracles en qualité de prédicateur, je ne laisserai pas de rendre en mon cœur un hommage profond à votre justice, en qualité de sujet. Mais je m'arrête déjà trop longtemps: affermi par cette pensée, je cours où cet Esprit toutpuissant m'appelle; et je cours premièrement à luimême, pour lui demander ses lumières par les saintes intercessions de la bienheureuse Vierge. Ave, Maria.

Quand je nomme la justice, je nomme en même temps

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