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Avant qu'ils euffent pris aucunes mefures certaines, on leur vint tout Autre défaites d'un coup annoncer un nouveau malheur. Annibal avoit défait quatre mille cavaliers, que le conful Cn. Servilius avoit fait partir pour aller au fecours de fon collegue, mais qui s'étoient arrêtés dans l'Ombrie, dès qu'ils avoient appris ce qui s'étoit paffé auprès du lac de Trafimene. Cette perte fit differentes impreffions fur les efprits, felon le caractere d'un chacun. Les uns la regardoient comme legere,. en comparaifon de celle qu'on avoit faite auparavant, dont ils étoient uniquement occupés. Les autres n'en ju geoient pas par le nombre de ceux qu'on avoit perdus. Mais comme le moindre accident fuffit pour accabler un corps déja affoibli par une dangereufe maladie, pendant que celui qui a encore toute fa vigueur peut réfifter à un choc beaucoup plus rude; de même ils croyoient qu'on devoit confiderer la défaite de ces cavaliers, felon le rapport qu'elle avoit aux forces épuifées de la république, que le moindre fardeau pouvoit abbattre; & non par cé qu'elle étoit en elle même. C'eft pourquoi on eut recours à un remede.

qu'on n'avoit point employé, & dont on n'avoit point eu befoin depuis long-temps on réfolut de créer un dictateur. Mais parce que le conful, à qui feul il appartient de le nommer, étoit abfent, & qu'il n'étoit pas aifé de lui envoyer un courrier, ou de lui faire tenir des lettres, pendant que les Carthaginois étoient maîtres de tous les paffages ; & que d'ailleurs il n'y avoit point d'exemple, qu'un dictateur eût été créé par le peuple, Q. Fabius Fabius Dic- Maximus fut élû prodictateur, & Q. Minucius Rufus maître de la cavalerie, par les fuffrages de la multitude. Le fénat les chargea l'un & l'autre de fortifier la ville de Rome, de mettre des troupes dans tous les lieux où ils les jugeroient néceffaires, & de rompre les ponts qui pouvoient donner paffage aux ennemis. Qu'il falloit fai re tous fes efforts pour empêcher Annibal de fe rendre maître de la ville, puifqu'on n'avoit pû défendre l'Italie

Rateur.

contre lui.

Annibal traverfa l'Ombrie, & s'en vint droit à Spolette. Il commença par ravager la campagne. Enfuite s'étant mis en devoir d'emporter la ville d'affaut, il fut repouffé avec un grand

carnage des fiens. Il jugea par le peu de fuccès qu'il avoit eu à l'attaque d'une fimple colonie, combien il lui en couteroit pour fe rendre maître de Rome même. Il alla de là vers Picene, où fes foldats trouverent de quoi appaifer la faim qui les preffoit, dans les grains & les autres fruits dont cette terre abonde; & de quoi affouvir leur avarice, dans les richeffes de fes habitants. Pendant le féjour qu'il y fit, fes troupes eurent le temps de fe remettre des peines qu'elles avoient fouffertes en traversant pendant l'hyver un marais impraticable; & en combattant des ennemis qu'ils avoient défaits à la vérité, mais qui leur avoient fait acheter bien cher la victoire. Mais comme fes foldats préferoient le pillage & le butin au repos & à l'oifiveté, il les tira de cette contrée dès qu'il vit qu'ils étoient en état d'agir, & s'en alla avec eux ravager les terres de Pretutium & d'Hadria, le pays des Marfes, des Marruciniens & des Peliguiens, & tous les environs d'Arpi & de Lucerie, en tirant vers l'Apouille. Pendant ce temps-là, le conful Cn. Servilius avoit pouffé les Gaulois en diverfes renconres, où il avoit eu fur eux quelques

legers avantages, & leur avoit pris une ville peu confiderable. Mais il n'eut pas plutôt appris la défaite de fon collegue & de fon armée, qu'il marcha à grandes journées du côté de Rome, pour ne point manquer à fa patrie dans le befoin. Q. Fabius Maximus ayant été créé dictateur pour la feconde fois, ne fut pas plutôt entré en charge, qu'il affembla le fénat. Et croyant devoir commencer fa magistrature par des actes de religion, il fit entendre aux fénateurs que Flaminius avoit péché beaucoup moins par témerité & par ignorar ce de l'art militaire, que par le mépris qu'il avoit fait des aufpices & du culte des dieux. Il ajouta qu'il falloit confulter les dieux eux-mêmes, fur la fatisfaction qui leur étoit dûë, & fit ordonner aux decemvirs de vifiter les livres de la Sibylle, ce qu'on ne décerne qu'après les prodiges les plus menaçants. Lorfqu'ils eurent examiné ces oracles de la deftinée des Romains, ils déclarerent en plein fénat, qu'on n'avoit pas accompli affez regulierement les voeux qu'on avoit faits en l'honneur de Mars, au commencement de cette guerre. Qu'il falloit s'engager d'offrir à ce dieu des

victimes encore plus graffes que les premieres, & les immoler tout de nouveau célebrer les grands jeux en l'honneur de Jupiter; promettre à Venus Ericine & à la Prudence, de leur bâtir des temples; faire des proceffions publiques, defcendre les ftatues des dieux de leurs niches, & leur promettre un printemps facré; à condition Printemps qu'ils rendroient les Romains victo- facré, rieux de leurs ennemis, & que la république demeureroit dans le même état où elle étoit avant la guerre. Le fénat voyant que Fabius alloit être affez occupé des affaires de la guerre, ordonna au préteur M. Emilius, de travailler avec beaucoup d'exactitude & de regularité, à appaifer les dieux par ces ceremonies & ces facrifices, conjointement avec le college des Pontifes.

Lorfque le fénat eut donné là-deffus tous les arrêts néceffaires, L. Corn. Lentulus, fouverain pontife, consulté par le préteur, déclara, de concert avec tout le college des prêtres, qu'il falloit avant toutes chofes, fçavoir le fentiment du peuple au fujet du printemps facré, puifqu'un vœu ne pouvoir être legitime fans fon ordre. Le peuple

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