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sont aussi partiaux, ou hautains envers ceux qu'ils traitent avec supériorité. C'est pourquoi, aimer et reconnaître les défauts de ceux que l'on aime; haïr et reconnaître les bonnes qualités de ceux que l'on hait, est une chose bien rare sous le ciel 1.

2. De là vient le proverbe qui dit : Les pères ne veulent pas reconnaitre les défauts de leurs enfants, et les laboureurs, la fertilité de leurs terres. 3. Cela prouve qu'un homme qui ne s'est pas corrigé lui-même de ses penchants injustes est incapable de mettre le bon ordre dans sa famille.

Voilà le huitième chapitre du Commentaire. Il explique ce que l'on doit entendre par mettre le bon ordre dans sa famille, en se corrigeant soi-même de toute habitude, de toutes passions vicieuses.

CHAPITRE IX.

Sur le devoir de bien gouverner un État, en mettant le bon ordre dans sa famille.

1. Les expressions du texte, pour bien gouverner un royaume, il est nécessaire de s'attacher auparavant à mettre le bon ordre dans sa famille, peuvent s'expliquer ainsi : Il est impossible qu'un homme qui ne peut pas instruire sa propre famille, puisse instruire les hommes. C'est pour quoi le fils de prince, sans sortir de sa famille, se perfectionne dans l'art d'instruire et de gouverner un royaume. La piété filiale est le principe qui le dirige dans ses rapports avec le souverain; la déférence est le principe qui le dirige dans ses rapports avec ceux qui sont plus âgés que lui; la bienveillance la plus tendre est le principe qui le dirige dans ses rapports avec la multitude 3.

'Le Ji-kiang s'exprime ainsi sur ce chapitre « Thsengiseu dit: Ce que le saint Livre (le texte de KHOUNG-TSEU) appelle mettre le bon ordre dans sa famille, consiste auparavant à se corriger soi-même de toutes passions vicieuses, signifie: Que la personne étant le fondement, la base de la famille, celui qui veut mettre le bon ordre dans sa famille doit savoir que tout consiste dans les sentiments d'amitié et d'aversion, d'amour et de haine qui sont en nous, et qu'il s'agit seulement de ne pas être partial et injuste dans Pexpression de ces sentiments. L'homme se laisse toujours naturellement entrainer aux sentiments qui naissent en lui, e s'il est dans le sein d'une famille, il perd promptement la règle de ses devoirs naturels. C'est pourquoi, dans ce qu'il aime et dans ce qu'il hait, il arrive aussitôt à la partialité et injustice, et sa personne n'est point corrigée et améliorée. » 'La glose du Kiang-i-pi-tchi dit que c'est le fils d'un prince possédant un royaume qui est ici désigné.

En dégageant complétement la pensée du philosophe de sa forme chinoise, on voit qu'il assimile le gouvernement de l'Etat à celui de la famille, et qu'à ses yeux, celui qui possède toutes les vertus exigées d'un chef de famille, possède égale- | ment toutes les vertus exigées d'un souverain. C'est aussi ce que dit le Commentaire impérial (Ji-kiang) : « Ces trois vertus: la piété filiale, la déférence envers les frères ainés, la bienveillance ou l'affection pour ses parents, sont des vertus aver lesquelles le prince orne sa personne, tout en instruisant sa famille; elles sont généralement la source des bonnes mours, et en les étendant, en en faisant une grande application, on en fait par conséquent la règle de toutes ses ac

2. Le Khang-kao dit: Il est comme une mère qui embrasse tendrement son nouveau-né1. Elle s'efforce de toute son âme à prévenir ses désirs naissants; si elle ne les devine pas entièrement, elle ne se méprend pas beaucoup sur l'objet de ses vœux. Il n'est pas dans la nature qu'une mère ap prenne à nourrir un enfant pour se marier en suite.

3. Une seule famille, ayant de l'humanité et de la charité, suffira pour faire naître dans la nation ces mêmes vertus de charité et d'humanité; une seule famille, ayant de la politesse et de la condescendance, suffira pour rendre une nation condescendante et polie; un seul homme, le prince1, étant avare et cupide, suffira pour causer du désordre dans une nation. Tel est le principe ou le mobile de ces vertus et de ces vices. C'est ce que dit le proverbe Un mot perd l'affaire; un homme détermine le sort d'un empire.

4. Yao et Chun gouvernèrent, l'empire avec humanité, et le peuple les imita. Kie et Tcheou 3, gouvernèrent l'empire avec cruauté, et le peuple les imita. Ce que ces derniers ordonnaient était contraire à ce qu'ils aimaient, et le peuple ne s'y tions. Voilà comment le fils du prince, sans sortir de sa famille, se forme dans l'art d'instruire et de gouverner un royaume.»

Le Commentaire impérial (Ji-kiang) s'exprime ainsi sur ce passage: « Autrefois Wou-wang écrivit un livre pour donner des avertissements à Kang-chou (son frère cadet qu'il envoyait gouverner un Etat dans la province du Honan); il dit : Si l'on exerce les fonctions de prince, il faut aimer, chérir les cent familles (tout le peuple chinois)

comme une tendre mère aime et chérit son jeune enfant au berceau. Or, dans les premiers temps que son jeune en

fant vient de naitre, chaque mere ne peut pas apprendre par des paroles sorties de sa bouche ce que l'enfant désire; la mère qui, par sa nature, est appelée à lui donner tous ses soins et à ne le laisser manquer de rien, s'applique avec la plus grande sincérité du cœur, et beaucoup plus souvent qu'il est nécessaire, à chercher à savoir ce qu'il désire, et elle le trouve ensuite. Il faut qu'elle cherche à savoir ce que son enfant désire, et quoiqu'elle ne puisse pas toujours réussir à deviner tous ses vœux, cependant son cœur est satisfait, et le cœur de son enfant doit aussi être satisfait; ils ne peuvent pas s'éloigner l'un de l'autre. Or, le cœur de cette mère, qui chérit ainsi son jeune enfant au berceau, le fait naturellement, et de lui-même; toutes les mères ont les mêmes sentiments maternels; elles n'ont pas besoin d'attendre qu'on les instruise de leur devoir pour pouvoir ainsi aimer leurs enfants. Aussi n'a-t-on jamais vu dans le monde qu'une jeune femme apprenne d'abord les règles des soins à donner à un jeune enfant au berceau, pour se marier ensuite. Si l'on sait une fois que les tendres soins qu'une mère prodigue à son jeune enfant lui sont ainsi inspirés par ses sentiments naturels, on peut savoir également que ce sont les mèmes sentiments de tendresse naturelle qui doivent diriger un prince dans ses rapports avec la multitude. N'en est-il pas de même dans ses rapports avec le souverain et avec ses aînés? Alors, c'est ce qui est dit que, sans sortir de sa famille, on peut se perfectionner dans l'art d'instruire et de gouverner un

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soumit pas. C'est pour cette raison que le prince doit lui-même pratiquer toutes les vertus et ensuite engager les autres hommes à les pratiquer. S'il ne les possède pas et ne les pratique pas lui-même, il ne doit pas les exiger des autres hommes. Que n'ayant rien de bon, rien de vertueux dans le cœur, on puisse être capable de commander aux hommes ce qui est bon et vertueux, cela est impossible et contraire à la nature des choses.

5. C'est pourquoi le bon gouvernement d'un royaume consiste dans l'obligation préalable de mettre le bon ordre dans sa famille.

6. Le Livre des F'ers dit :

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Dans la politique de ces philosophes chinois, chaque famille est une nation ou État en petit, et toute nation ou tout État n'est qu'une grande famille : l'une et l'autre doivent être gouvernés par les mêmes principes de sociabilité et soumis aux mêmes devoirs. Ainsi, comme un homme qui ne montre pas de vertus dans sa conduite et n'exerce point d'empire sur ses passions, n'est pas capable de bien administrer une fa

mille; de même un prince qui n'a pas les qualités qu'il faut pour bien administrer une famille est également incapable de bien gouverner une nation. Ces doctrines ne sont point constitutionnelles, parce qu'elles sont en opposition avec la doctrine que le chef de l'Etat règne et ne gouverne pas, et qu'elles lui attribuent un pouvoir exorbitant sur ses sujets, celui d'un père sur ses enfants, pouvoir dont les princes, en Chine, sont aussi portés à abuser que partout ailleurs; mais d'un autre côté ce caractère d'assimilation au père de famille leur impose des devoirs qu'ils trouvent quelquefois assez gênants pour se décider à les enfreindre; alors, d'après la même politique, les membres de la grande famille ont le droit, sinon toujours la force, de déposer les mauvais rois qui ne gouvernent pas en vrais peres de famille. On en a vu des exemples.

que ce que l'on doit entendre par bien gouverner te royaume, en mettant le bon ordre dans sa famille.

CHAPITRE X.

Sur le devoir d'entretenir la paix et la bonne harmonie dans le monde, en bien gouvernant les royaumes.

1. Les expressions du texte, faire jouir le monde de la paix et de l'harmonie consiste à bien gouver ner son royaume, doivent être ainsi expliquées : Que celui qui est dans une position supérieure, ou le prince, traite ses père et mère avec respect, et le peuple aura de la piété filiale; que le prince honore la supériorité d'âge entre les frères, et le peuple aura de la déférence fraternelle; que le prince ait de la commisération pour les orphelins, et le peuple n'agira pas d'une manière contraire. C'est pour cela que le prince a en lui la règle et la mesure de toutes les actions.

2. Ce que vous réprouvez dans ceux qui sont au-dessus de vous, ne le pratiquez pas envers ceux qui sont au-dessous; ce que vous réprouvez dans vos inférieurs, ne le pratiquez pas envers vos supérieurs ; ce que vous réprouvez dans ceux qui vous précèdent, ne le faites pas à ceux qui vous suivent; ce que vous réprouvez dans ceux qui vous suivent, ne le faites pas à ceux qui vous précèdent; ce que vous réprouvez dans ceux qui sont à votre droite, ne le faites pas à ceux qui sont à votre gauche; ce que vous réprouvez dans ceux qui sont à votre gauche, ne le faites pas à ceux qui sont à votre droite : voilà ce qui est appelé la raison et la règle de toutes les actions.

3. Le Livre des Vers dit :

« Le seul prince qui inspire de la joie

<< Est celui qui est le père et la mère du peuple!▾ Ce que le peuple aime, l'aimer; ce que le peuple hait, le haïr: voilà ce qui est appelé étre le père et la mère du peuple.

4. Le Livre des Vers dit :

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Ainsi, ministre Yn, tu brillais dans ta fierté! « Et le peuple te contemplait avec terreur! » Celui qui possède un empire ne doit pas négliger de veiller attentivement sur lui-même, pour pratiquer le bien et éviter le mal; s'il ne tient compte de ces principes, alors la ruine de son empire en sera la conséquence 1.

1 On veut dire [dans ce paragraphe] que celui qui est dans la position la plus élevée de la société [le souverain] ne doit pas ne pas prendre en sérieuse considération ce que les hommes ou les populations demandent et attendent de lui; s'il ne se conformait pas dans sa conduite aux droites règles de la raison, et qu'il se livrât de préférence aux actes vicieux [aux actions contraires à l'intérêt du peuple] en donnant un libre cours à ses passions d'amitié et de haine, alors sa propre

B. Le Livre des vers dit :

• Avant que les princes de la dynastie des Yn [ou Chang] eussent perdu l'affection du peuple, « Ils pouvaient être comparés au Très-Haut. « Nous pouvons considérer dans eux

« Que le mandat du ciel n'est pas facile à conser

◄ ver. »

Ce qui veut dire :

• Obtiens l'affection du peuple, et tu obtiendras ■ l'empire;

« Perds l'affection du peuple, et tu perdras l'em⚫ pire1. »>

6. C'est pourquoi un prince doit, avant tout, veiller attentivement sur son principe rationnel et moral. S'il possède les vertus qui en sont la conséquence, il possédera le cœur des hommes; s'il possède le cœur des hommes, il possédera aussi le territoire; s'il possède le territoire, il en aura les revenus; s'il en a les revenus, il pourra en faire usage pour l'administration de l'État. Le principe rationnel et moral est la base fondamentale; les richesses ne sont que l'accessoire.

7. Traiter légèrement la base fondamentale ou le principe rationnel et moral, et faire beaucoup de cas de l'accessoire ou des richesses, c'est pervertir les sentiments du peuple et l'exciter par l'exemple au vol et aux rapines.

8. C'est pour cette raison que, si un prince ne pense qu'à amasser des richesses, alors le peuple, pour l'imiter, s'abandonne à toutes ses passions mauvaises; si au contraire il dispose convenablement des revenus publics, alors le peuple se maintient dans l'ordre et la soumission.

9. C'est aussi pour cela que si un souverain ou des magistrats publient des décrets et des ordonnances contraires à la justice, ils éprouveront une résistance opiniâtre à leur exécution et aussi par des moyens contraires à la justice; s'ils acquièrent des richesses par des moyens violents et contraires à la justice, il les perdront aussi par des moyens violents et contraires à la justice.

10. Le Khang-kao dit : « Le mandat du ciel qui ⚫donne la souveraineté à un homme, ne la lui confère pas pour toujours. » Ce qui signifie qu'en pratiquant le bien ou la justice, on l'obtient ; et qu'en pratiquant le mal ou l'injustice, on le perd.

11. Les Chroniques de Thsou disent :

« La nation de Thsou ne regarde pas les parures en or et en pierreries comme précieuses; mais

personne serait exterminée, et le gouvernement périrait; c'est là la grande ruine de l'empire (dont il est parle dans le texte]. (TCHOU-HI.)

'Le Ho-kiang dit à ce sujet : « La fortune du prince dépend du ciel, et la volonté du ciel existe dans le peuple. Si le prince obtient l'affection et l'amour du peuple, le TrèsHaut le regardera avec complaisance et affermira son trône; mais s'il perd l'affection et l'amour du peuple, le Très-Haut le regardera avec colère, et il perdra son royaume. »

LIVRES SACRÉS DE L'ORIENT.

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«

13. Le Thsin-tchi dit :

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« Que n'ai-je un ministre d'une droiture parfaite, quand même il n'aurait d'autre habileté qu'un «< cœur simple et sans passions; il serait comme s'il « avait les plus grands talents! Lorsqu'il verrait « des hommes de haute capacité, il les produirait, << et n'en serait pas plus jaloux que s'il possédait « leurs talents lui-même. S'il venait à distinguer un << homme d'une vertu et d'une intelligence vastes, << il ne se bornerait pas à en faire l'éloge du bout « des lèvres, il le rechercherait avec sincérité et « l'emploierait dans les affaires. Je pourrais me re⚫ poser sur un tel ministre du soin de protéger mes enfants, leurs enfants et le peuple. Quel avantage

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« n'en résulterait-il pas pour le royaume 1?

« Mais si un ministre est jaloux des hommes de << talent, et que par envie il éloigne ou tienne à l'écart << ceux qui possèdent une vertu et une habileté émi<< nentes, en ne les employant pas dans les charges << importantes, et en leur suscitant méchamment « toutes sortes d'obstacles, un tel ministre, quoi« que possédant des talents, est incapable de pro«<téger mes enfants, leurs enfants, et le peuple. Ne « pourrait-on pas dire alors que ce serait un danger << imminent, propre à causer la ruine de l'empire?

14. L'homme vertueux et plein d'humanité peut seul éloigner de lui de tels hommes, et les rejeter parmi les barbares des quatre extrémités de l'empire, ne leur permettant pas d'habiter dans le royaume du milieu.

Cela veut dire que l'homme juste et plein d'humanité seul est capable d'aimer et de haïr convenablement les hommes 2.

15. Voir un homme de bien et de talent, et ne pas lui donner de l'élévation; lui donner de l'élévation et ne pas le traiter avec toute la préférence qu'il mérite, c'est lui faire injure. Voir un homme

On voit par ces instructions de Mou-koung, du prince petit royaume de Thsin, tirées du Chou-king, quelle importance on attachait déjà en Chine, 650 ans avant notre ère, au bon choix des ministres, pour la prospérité et le bonheur d'un État. Partout l'expérience éclaire les hommes ! Mais malheureusement ceux qui les gouvernent ne savent pas ou ne veulent pas toujours en profiter.

2 « Je n'admire point un homme qui possède une vertu dans toute sa perfection, s'il ne possède en même temps dans un pareil degré la vertu opposée, tel qu'était Epaminondas, qui avait l'extrême valeur jointe à l'extrême bénignité, car autrement ce n'est pas monter, c'est tomber. On ne montre pas sa grandeur pour être en une extrémité, mais bien en touchant les deux à la fois, et remplissant tout l'entre-deux. » (PASCAL.)

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pervers et ne pas le repousser; le repousser et ne pas l'éloigner à une grande distance, c'est une chose condamnable pour un prince.

16. Un prince qui aime ceux qui sont l'objet de la haine générale, et qui hait ceux qui sont aimés de tous, fait ce que l'on appelle un outrage à la nature de l'homme. Des calamités redoutables atteindront certainement un tel prince.

17. C'est en cela que les souverains ont une grande règle de conduite à laquelle ils doivent se conformer; ils l'acquièrent, cette règle, par la sincérité et la fidélité; et ils la perdent par l'orgueil et la violence.

18. Il y a un grand principe pour accroître les revenus (de l'État ou de la famille). Que ceux qui produisent ces revenus soient nombreux, et ceux qui les dissipent, en petit nombre; que ceux qui les font croître par leur travail se donnent beaucoup de peine, et que ceux qui les consomment le fassent avec modération; alors, de cette manière, les revėnus seront toujours suffisants 1.

deglace dans la cérémonie des ancêtres ne nourrit das des bœufs et des moutons. Une famille de cent chars, ou un prince, n'entretient pas des ministres qui ne cherchent qu'à augmenter les impôts pour accumuler des trésors. S'il avait des ministres qui ne cherchassent qu'à augmenter les impôts pour amasser des richesses, il vaudrait mieux qu'il eût des ministres ne pensant qu'à dépouiller le trésor du souverain.—Ce qui veut dire que ceux qui gouvernent un royaume ne doivent point faire leur richesse privée des revenus publics; mais qu'ils doivent faire de la justice et de l'équité leur seule richesse.

22. Si ceux qui gouvernent les États ne pensent qu'à amasser des richesses pour leur usage personnel, ils attireront indubitablement auprès d'eux des hommes dépravés; ces hommes leur feront croire qu'ils sont des ministres vertueux, et ces hommes dépravés gouverneront le royaume. Mais l'administration de ces ministres appellera sur le gouvernement les châtiments divins et les 19. L'homme humain et charitable acquiert de vengeances du peuple. Quand les affaires publila considération à sa personne, en usant généreu-ques sement de ses richesses; l'homme sans humanité et sans charité augmente ses richesses aux dépens de sa considération.

20. Lorsque le prince aime l'humanité et pratique la vertu, il est impossible que le peuple n'aime pas la justice; et lorsque le peuple aime la justice, il est impossible que les affaires du prince n'aient pas une heureuse fin; il est également impossible que les impôts dûment exigés ne lui soient pas exactement payés.

21. Meng-hien-tseu a dit : Ceux qui nourrissent des coursiers et possèdent des chars à quatre chevaux n'élèvent pas des poules et des pourceaux, qui sont le gain des pauvres. Une famille qui se sert

Liu-chi a dit : « Si dans un royaume le peuple n'est pas paresseux et avide d'amusements, alors ceux qui produisent les revenus sont nombreux; si la cour n'est pas son séjour de prédilection, alors ceux qui mangent ou dissipent ces revenus sont en petit nombre; si on n'enlève pas aux laboureurs le temps qu'ils consacrent à leurs travaux, alors ceux qui travaillent, qui labourent et qui sèment, se donneront beaucoup de peines pour faire produire la terre; si l'on a soin de calculer ses revenus pour régler sur eux ses dépenses, alors l'usage que l'on en fera sera modéré. »

Meng-hien-tseu était un sage Ta-fou, ou mandarin, du royaume de Lou, dont la postérité s'est éteinte dans son second petit-fils. Ceux qui nourrissent des coursiers et possèdent des chars à quatre chevaux, ce sont les mandarins ou magistrats civils, Ta-fou, qui passent les premiers examens des lettrés à des périodes fixes. Une famille qui se sert de glace dans la cérémonie des ancêtres, ce sont les grands de l'ordre supérieur nommés King, qui se servaient de glace dans les cérémonies funèbres qu'ils faisaient en l'honneur de leurs ancêtres. Une famille de cent chars, ce sont les grands de l'Etat qui possédaient des fiefs séparés dont ils tiraient les revenus. Le prince devrait plutôt perdre ses propres revenus, ses propres richesses, que d'avoir des ministres qui fissent éprouver des vexations et des dommages au peuple. C'est pourquoi il vaut mieux que [le prince] ait des ministres qui dépouillent le trésor du souverain, que des ministres qui surchargent le peuple d'impôts pour accumuler des richesses.

sont arrivées à ce point, quels ministres, fussent-ils les plus justes et les plus vertueux, détourneraient de tels malheurs? Ce qui veut dire que ceux qui gouvernent un royaume ne doivent point faire leur richesse privée des revenus publics, mais qu'ils doivent faire de la justice et de l'équité leur seule richesse.

Voilà le dixième chapitre du Commentaire. Il explique ce que l'on doit entendre par faire jouir le monde de la paix et de l'harmonie, en bien gouvernant l'empire1.

L'Explication tout entière consiste en dix chapitres. Les quatre premiers chapitres exposent l'ensemble gé néral de l'ouvrage et en montrent le but. Les six autres chapitres exposent plus en détail les diverses branches du sujet de l'ouvrage. Le cinquième chapitre enseigne le devoir d'être vertueux et éclairé. Le sixième chapi tre pose la base fondamentale du perfectionnement de soi-même. Ceux qui commencent l'étude de ce livre doivent faire tous leurs efforts pour surmonter les difficultés que ce chapitre présente à sa parfaite intelligence; ceux qui le lisent ne doivent pas le regarder comme très-facile à comprendre et en faire peu de cas.

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« Le sens de ce chapitre est, qu'il faut faire tous ses efforts pour étre d'accord avec le peuple dans son amour et son aversion, ou partager ses sympathies, et qu'il ne faut pas s'appliquer uniquement à faire son bien-être matériel. Tout cela est relatif à la règle de conduite la plus importante que l'on puisse s'imposer. Celui qui peut agir ainsi, traite alors bien les sages, se plaît dans les avantages qui en résultent; chacun obtient ce à quoi il peut prétendre, et le monde vit dans la paix et l'harmonie. »> (Glose.)

Thoung-yang-hiu-chi a dit : « Le grand but, le sens principal de ce chapitre signifie que le gouvernement d'un empire consiste dans l'application des règles de droiture et d'équité naturelles que nous avons en nous, à tous les actes de gouvernement, ainsi qu'au choix des hommes que l'on emploie, qui, par leur bonne ou mauvaise administration, conservent ou perdent l'empire. Il faut que dans ce qu'ils aiment et dans ce qu'ils haissent ils se conforment toujours au sentiment du peuple. »>

TCHOUNG-YOUNG,

OU

L'INVARIABILITÉ DANS LE MILIEU;

RECUEILLI PAR TSEU-SSE, PETIT-FILS ET DISCIPLE DE KHOUNG-TSEU.

DEUXIEME LIVRE CLASSIQUE.

AVERTISSEMENT

DU DOCTEUR TCHING-TSEU.

Le docteur Tching-tseu a dit : Ce qui ne dévie d'aucun côté est appelé milieu (tchoung); ce qui ne change pas est appelé invariable (young). Le milieu est la droite voie, ou la droite règle du monde; l'invariabilité en est la raison fixe. Ce livre comprend les règles de l'intelligence qui ont été transmises par les disciples de KпOUNGTSEU à leurs propres disciples. Tseu-sse (petit-fils de KHOUNG-TSEU) Craignit que, dans la suite des temps, ces règles de l'intelligence ne se corrompissent; c'est pourquoi il les consigna dans ce livre pour les transmettre luimême à Meng-tseu. Tseu-sse, au commencement de son livre, parle de la raison qui est une pour tous les hommes; dans le milieu, il fait des digressions sur toutes sortes de

sujets; et à la fin, il revient sur la raison unique, dont il réunit tous les éléments. S'étend-il dans des digressions variées, alors il parcourt les six points fixes du monde (l'est, l'ouest, le nord, le sud, le nadir et le zénith); se resserre-t-il dans son exposition, alors il se concentre et s'enveloppe pour ainsi dire dans les voiles du mystère. La saveur de ce livre est inépuisable, tout est fruit dans son étude. Celui qui sait parfaitement le lire, s'il le me. dite avec une attention soutenue, et qu'il en saisisse le sens profond, alors, quand même il mettrait toute sa vie ses maximes en pratique, il ne parviendrait pas à les épuiser.

CHAPITRE PREMIER.

1. Le mandat du ciel (ou le principe des opérations vitales et des actions intelligentes conférées par le ciel aux êtres vivants1) s'appelle nature rationnelle; le principe qui nous dirige dans la conformité de nos actions avec la nature rationnelle, s'appelle règle de conduite morale ou droite voic; le systėme coordonné de la règle de conduite morale ou droite voie, s'appelle Doctrine des devoirs ou Institutions.

Commentaire,

2. La règle de conduite morale qui doit diriger les actions est tellement obligatoire que l'on ne peut s'en écarter d'un seul point, un seul instant. Si l'on pouvait s'en écarter, ce ne serait plus une règle de conduite immuable. C'est pourquoi l'homme supérieur, ou celui qui s'est identifié avec la droite voie, veille attentivement dans son cœur sur les principes qui ne sont pas encore discernés par tous les hommes, et il médite avec précaution sur ce qui n'est pas encore proclamé et reconnu comme doctrine.

3. Rien n'est plus évident pour le sage que les choses cachées dans le secret de la conscience; rien n'est plus manifeste pour lui que les causes les plus subtiles des actions. C'est pourquoi l'homme supérieur veille attentivement sur les inspirations secrètes de sa conscience.

4. Avant que la joie, la satisfaction, la colère, la tristesse, ne se soient produites dans l'âme (avec excès), l'état dans lequel on se trouve s'appelle milieu. Lorsqu'une fois elles se sont produites dans l'âme, et qu'elles n'ont encore atteint qu'une certaine limite, l'état dans lequel on se trouve s'appelle harmonique. Ce milieu est la grande base fondamentale du monde; l'harmonie en est la loi universelle et permanente.

5. Lorsque le milieu et l'harmonie sont portés au point de perfection, le ciel et la terre sont dans un état de tranquillité parfaite, et tous les êtres reçoivent leur complet développement.

Voilà le premier chapitre du livre dans lequel Tseusse expose les idées principales de la doctrine qu'il veut transmettre à la postérité. Dabord il montre clai rement que la voie droite ou la règle de conduite morale tire sa racine fondamentale, sa source primi. tive du ciel, et qu'elle ne peut changer; que sa subs. tance véritable existe complétement en nous, et qu'elle

1 Glose.

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