Je crois avoir percé ce ténébreux mistère.
On dit qu'il la chérit, & qu'il l'éléve en père.
Nous verrons.... Mais on ouvre, & ce temple facré Nous découvre un autel de guirlandes paré.
Je vois des deux côtés les prêtreffes paraître. Au fond du fanctuaire eft affis le grand-prêtre. Olimpie & Caffandre arrivent à l'autel !
Les trois portes du temple font ouvertes. On découvre tout P'intérieur. Les prêtres d'un côté & les prêtresses de l'autre, s'avancent lentement. Ils font tous vétus de robes blan ches avec des ceintures dont les bouts pendent à terre. CASSANDRE & OLIMPIE mettent la main fur l'autel. ANTIGONE & HERMAS reftent dans le périftile avec une partie du peuple qui entre par les côtés.
Ieu des Rois & des Dieux, Etre unique, éternel! Dieu qu'on m'a fait connaître en ces fètes auguftes, Qui punis les pervers, & qui foutiens les juftes, Près de qui les remords effacent les forfaits, Confirmez, Dieu clément, les ferments que je fais.
Recevez ces fermens, adorable Olimpie;
Je foumets à vos loix & mon trône & ma vie Je vous jure un amour auffi pur, auffi faint, Que ce feu de Vesta qui n'est jamais éteint.
Et vous, filles des Cieux, vous auguftes prêtreffes, Portez avec l'encens mes vœux & mes promeffes Au trône de ces Dieux qui daignent m'écouter, Et détournez les traits que je peux mériter.
OLI M PIE.
Protégez à jamais, ô Dieux en qui j'espère, Le maître généreux qui m'a fervi de père, Mon amant adoré, mon respectable époux.
Qu'il foit toujours chéri, toujours digne de vous !
Mon cœur vous eft connu. Son rang & fa couronne Sont les moindres des biens que fon amour me donne, Témoin des tendres feux à mon cœur infpirés, Soyez-en les garants, vous qui les confacrez. Qu'il m'apprenne à vous plaire, & que vôtre justice Me prépare aux enfers un éternel fuplice, Si j'oublie un moment, infidèle à vos loix, Et l'état où je fus, & ce que je lui dois.
Rentrons au fanctuaire où mon bonheur m'appelle- Prêtreffes, difpofez la pompe folemnelle,
Par qui mes jours heureux vont commencer leur cours Sanctifiez ma vie, & nos chaftes amours.
J'ai vu les Dieux au temple, & je les vois en elle;
Qu'ils me haïffent tous, fi je fuis infidelle! Antigone, en ces lieux vous m'avez entendu; Aux vœux que vous formiez, ai-je affez répondu? Vous-même prononcez, fi vous deviez prétendre A voir entre vos mains l'efclave de Caffandre. Sachez que ma couronne, & toute ma grandeur Sont de faibles préfens indignes de fon cœur. Quelque étroite amitié qui tous deux nous uniffe, Jugez fi j'ai dû faire un pareil facrifice.
(Ils rentrent dans le temple, les portes se ferment, le peuple fort du parvis.)
ANTIGONE, HERMAS (dans le périfiile. )
VA, je n'en doute plus, & tout m'est découvert.
Il m'a voulu braver, mais fois fûr qu'il fe perd. Je reconnais en lui la fougueufe imprudence Qui tantôt fert les Dieux, & tantôt les offense, Ce caractère ardent qui joint la paffion Avec la politique & la religion,
Promt, facile, fuperbe, impétueux & tendre, Prêt à fe repentir, prêt à tout entreprendre. Il épouse une efclave! Ah! tu peux bien penfer Que l'amour à ce point ne faurait s'abaiffer. Cette efclave eft d'un fang que lui-même il refpecte.
De fes deffeins cachés la trame eft trop fufpecte. Il fe flatte en fecret qu'Olimpie a des droits Qui pourront l'élever au rang de Roi des Rois. S'il n'était qu'un amant, il m'eût fait confidence D'un feu qui l'emportait à tant de violence. Va, tu verras bientôt fuccéder fans pitié Une haine implacable à la faible amitié.
A fon cœur égaré vous imputez peut-être
Des deffeins plus profonds que l'amour n'en fait naître. Dans nos grands intérêts fouvent nos actions Sont, vous le favez trop, l'effet des paffions. On fe déguise en vain leur pouvoir tirannique; Le faible quelquefois paffe pour politique: Et Caffandre n'est pas le premier Souverain Qui chérit une efclave & lui donna la main. J'ai vu plus d'un héros fubjugué par sa flamme, Superbe avec les Rois, faible avec une femme.
Tu ne dis que trop vrai. Je pèfe tes raisons. Mais tout ce que j'ai vu, confirme mes foupçons, Te le dirai-je enfin? les charmes d'Olimpie Peut-être dans mon cœur portent la jalousie. Tu n'entrevois que trop mes fentimens fecrets. L'amour fe joint peut-être à ces grands intérêts. Plus que je ne penfais leur union me bleffe.
Caffandre eft-il le feul en proïe à la faibleffe?
Mais il comptait fur vous. Les tîtres les plus faints Ne pourront-ils jamais unir les Souverains? L'alliance, les dons, la fraternité d'armes,
Vos périls partagés, vos communes allarmes, Vos fermens redoublés, tant de foins, tant de voeux, N'auraient-ils donc fervi qu'au malheur de tous deux? De la fainte amitié n'eft-il donc plus d'exemples?
L'amitié, je le fais, dans la Grèce a des temples; L'intérêt n'en a point, mais il est adoré.
D'ambition fans doute, & d'amour enyvré, Caffandre m'a trompé fur le fort d'Olimpie. De mes yeux éclairés Caffandre fe défie.
Il n'a que trop raifon. Va, peut-être aujourd'hui L'objet de tant de vœux n'eft pas encor à lui.
Les (Initiés, les Prêtres, & les Prêtreffes traverfent le
fond de la Scène, ayant des palmes ornées de fleurs dans les mains. )
Voit déja de l'himen la pompe préparée.
Tous les initiés de leurs prêtres fuivis,
Les palmes dans les mains inondent ces parvis, Et l'amour le plus tendre en ordonne la fète.
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