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descendus à cette époque les juges de l'empire romain, quoique la loi Julia, de repetundis, XLVIII, défendit expressément ces sortes de marchés. Mais l'Apôtre n'avait point d'argent à lui offrir, et il voulait moins encore se prêter à un tel trafic. Tacite, parlant de cet Antonius Félix dans ses Histoires, v, 9, dit qu'il réunissait la cruauté et l'ambition d'un roi à la bassesse d'un esclave.

Et cependant cet homme était le mari de trois reines, comme les appelle Suétone (Claude, xxvII). Drusille, dont il est ici question, était fille d'Hérode Agrippa et de Crypha, et sœur d'Agrippa II, alors roi titulaire de Jérusalem. Mariée d'abord à Antiochus Epiphane, prince de Comagène, puis à Azizus, prince d'Emèse, elle avait quitté celui-ci pour se livrer à Félix, à qui elle donna un fils, Agrippa III. La mère et le fils périrent lors de l'éruption du Vésuve. Paul avait donc bien des raisons de reprocher à Félix et à Drusille leur conduite scandaleuse. Félix avait, outre cela, épousé, d'après le témoignage de Suétone et de Tacite, une autre Drusille, petite-fille de Cléopâtre et d'Antoine; de sorte qu'il se trouvait par là beau-frère de l'empereur Claude, qui lui donna à gouverner la province impériale de la Palestine. Sa troisième femme nous est inconnue. Il était esclave d'origine, et avait été affranchi, comme saint Narcisse, par l'empereur Claude. L'historien Josèphe nous apprend que ses extorsions et son avarice furent la cause de sa chute, qui ne se fit pas attendre longtemps. Saint Luc semble nous dire indirectement que des Juifs moins délicats que saint Paul et ses partisans obtinrent à prix d'argent du gouverneur qu'il gardât Paul en prison. Félix, en effet, avait à cette époque, peu de temps avant de quitter la province, et afin de laisser parmi les

Juifs un bon souvenir de son administration, ouvert les prisons, et donné la liberté à un grand nombre de prisonniers. L'injuste exception qu'il fit pour Paul semble indiquer qu'elle lui avait été achetée par les ennemis de cet Apôtre.

CHAPITRE XL

Paul devant le préteur Festus et le roi Agrippa.

Félix, après avoir gouverné la Judée pendant deux ans, fut remplacé par Porcius Festus. Lorsque Paul, parlant à Félix, lui dit : Je vous remets ma cause avec d'autant plus d'assurance qu'il y a déjà longtemps que vous êtes juge de ce peuple, il faut regarder ces paroles comme une figure de rhétorique. Il n'y avait en effet que deux ans que Félix gouvernait la Judée; et la supposition qu'il avait été peut-être auparavant gouverneur de la Samarie n'a aucun fondement dans l'histoire. Les deux années étaient alors écoulées. C'est donc une erreur d'entendre le verset 27 du chapitre XXIV des Actes des apôtres dans ce sens que saint Paul serait resté deux ans en prison à Césarée. Combien d'épitres n'aurait-il pas écrites de là pendant ces deux ans, lui qui en a tant écrit de Rome, où cependant il était beaucoup moins libre qu'à Césarée! Le fait est qu'il resta à peine un mois en prison sous Félix. Le commandant Lysias ne pouvait tarder beaucoup à venir, d'après l'ordre qu'il en avait reçu du gouverneur; et Paul, si on l'avait laissé si longtemps en prison, n'aurait pas

manqué d'en appeler au tribunal de l'empereur. En même temps que Félix, Ananie fut déposé du souverain pontificat par le roi Agrippa, et remplacé par Ismaël Phabi, comme nous le lisons dans l'historien Josèphe. Mais les Actes des apôtres ne nous disent rien de ce fait; et Ananie semble malgré cela avoir poursuivi l'accusation contre saint Paul devant le tribunal du nouveau gouverneur.

Festus débarqua à Césarée; et se rendit trois jours après à Jérusalem. Là les grands prêtres et les principaux d'entre les Juifs le prièrent de faire ramener Paul à Jérusalem, pensant à le faire assassiner pendant la route. Mais, après un séjour de huit à dix jours, le nouveau gouverneur retourna dans sa résidence. Désirant gagner la bienveillance des Juifs dès le commencement de son administration, il appela le lendemain même de son arrivée la cause de Paul à son tribunal. Mais Paul en appela à l'empereur. Quelques jours après le roi Agrippa vint à Césarée avec sa sœur Bérénice pour saluer Festus et lui présenter ses félicitations. Agrippa, fils du roi défunt Agrippa, et, depuis la mort de son oncle Hérode, prince de Calcis, avait, dans la douzième année de l'empereur Claude, obtenu de celuici, au lieu de Calcis, le tétrarchat de Philippe, l'ancienne principauté de Lysanias, c'est-à-dire Abylène et l'Ithurée ou le domaine de Varus près du Liban. De plus Néron venait de lui donner les villes d'Abyla et de Julia dans la Pérée et dans la Galilée, celles de Tarichée et de Tibériade avec leurs districts. Comme roi titulaire de Jérusalem, il avait l'inspection du temple, et le droit de choisir le grand prêtre. Mais comme beau-frère du préteur Félix, il avait exercé bien plus d'influence encore. C'était un homme habile et prudent, connaissant parfaitement la loi: c'est du

T. III.

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moins l'éloge que lui donnent les rabbins, et que saint Paul répète en sa présence.

Le nouveau préteur eut la pensée de présenter au roi l'illustre prisonnier confié à sa garde. Josèphe nous peint Festus comme un homme juste et loyal, et c'est ainsi qu'il nous apparaît dans les Actes des apôtres. En Orient, les prisonniers ne sont point tenus renfermés comme chez nous; mais ils peuvent recevoir librement leurs parents et leurs amis, comme nous en voyons un exemple dans Jérémie, xxx, 8. XXXVI, 5, dans Socrate et Jean-Baptiste; et c'est pour cela que Notre-Seigneur place la visite des prisonniers parmi les œuvres de miséricorde. C'est ainsi que saint Paul fut traité à Césarée. Lorsqu'un préteur voulait honorer par une distinction particulière quelque grand personnage, il l'invitait à s'asseoir à côté de lui sur son tribunal. C'est ce que fit Festus à l'égard d'Agrippa. « Je ne comprends rien à cette querelle, » dit-il à ses hôtes,» si ce n'est que les uns disent qu'un certain « Jésus est mort, et que Paul, au contraire, prétend << qu'il vit encore. » Ces paroles étaient probablement un jeu de mots dans la bouche du gouverneur esprit fort; car chréstos ou christus signifiait chez les anciens un juste défunt. Le lendemain donc, Agrippa et Bérénice parurent dans le tribunal avec un grand apparat, entourés des officiers de l'armée et des magnats de la ville.

Paul était petit de taille; il avait le nez aquilin, le front chauve, les yeux noirs, d'après le type de sa nation, et le visage radieux comme un ange; c'est le portrait que nous en font les anciens. Il parut dans la salle, et parla avec une telle chaleur, qu'Agrippa, profondément ému, se sentit presque disposé à embrasser le christianisme. Pour Festus,

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il crut que les livres lui avaient troublé les idées. Agrippa était retenu dans l'erreur par des liens bien difficiles à rompre, car il était soupçonné précisément à cette époque d'avoir un commerce criminel avec sa sœur Bérénice, qui était veuve d'Hérode de Calcis, oncle du roi. Mais cette liaison, assez semblable à celle qui avait existé trente ans auparavant entre Hérode Antipas et Hérodiade, étant devenue publique, Bérénice épousa Polémon, autrefois roi de Silicie; mais elle le quitta bientôt; car le libertinage semble être le caractère distinctif de toute la race d'Hérode; et elle finit par être la favorite des empereurs Vespasien et Titus. Le diamant qu'elle portait au doigt comme gage de son union incestueuse, obtint plus tard, d'après Juvénal, vi, 155, comme héritage de famille, une renommée presque fabuleuse. Le Talmud fait mourir Agrippa au dernier siége de Jérusalem. Mais ce récit est inexact: car Josèphe lui soumit, ainsi qu'à Titus, son histoire de la guerre des Juifs; et d'après Photius il mourut à Rome à peu près dans le même temps que saint Jean l'évangéliste, la troisième année du règne de Trajan, ou, selon d'autres, de Vespasien.

Les hôtes de Festus quittèrent la salle convaincus de l'innocence du prisonnier; et Paul aurait été mis en liberté sur-le-champ s'il n'en eût appelé auparavant à l'empereur. Mais dès qu'il y avait appel, la cour romaine, d'après Ulpien, devait prendre connaissance de l'affaire, et on lui en adressait aussitôt un rapport. Suétone rapporte dans la vie d'Auguste que cet empereur établit à Rome un certain nombre de consulaires pour recevoir et examiner les recours qui arrivaient des provinces, et que, pour hater l'expédition des affaires, chacun de ces con

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