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ne laissant au jeune César que le nom de gouverneur. Souvent les sénateurs ou les consulaires, dans les circonstances difficiles, étaient envoyés dans les provinces en missions extraordinaires, avec de pleins pouvoirs civils et militaires; et l'histoire romaine nous offre un grand nombre d'exemples de ce fait. Or cette mesure semblait d'autant plus nécessaire dans le cas dont il s'agit que la Palestine avait son propre roi, soumis à l'empereur, il est vrai, mais qui n'était point sous la juridiction du préfet de Syrie. Ainsi, avant Cyrénius, Volumnius assistait déjà Saturninus comme légat impérial, et Sabinus remplissait les mêmes fonctions auprès de Q. Varus, successeur de ce dernier. Enfin, après le départ de Volusius, Quirinius prit réellement le gouvernement de Syrie. Saint Luc pouvait donc l'appeler déjà gouverneur de Syrie lorsqu'il n'exerçait encore cette magistrature que d'une manière provisoire. Ce sénateur, au reste, natif de l'ancienne cité de Lanuvium, jouissait sous les premiers empereurs d'une telle considération, qu'après sa mort Tibère lui fit faire des funérailles publiques.

L'historien Josèphe parle de son côté de ce recensement lorsqu'il dit que toute la population de la Judée. reçut l'ordre de rendre hommage à' Auguste et à Hérode, et que six mille pharisiens seulement s'y refusèrent. C'est qu'ils savaient que le Messie allait descendre dans sa gloire, et ils attendaient sa venue, voyant que toutes les prophéties couraient à leur fin. Notre recensement se rattachait donc à une prestation d'hommage de toute la Judée à Hérode et aux Romains, probablement dans la perspective de la mort prochaine d'Hérode, qui, laissant

le trône vide, allait permettre à l'empereur de réunir la Judée au domaine de l'empire. En effet Auguste, peu de temps auparavant, avait rappelé sérieusement au roi des Juifs, à l'occasion de son irruption en Arabie, ses rapports et ses devoirs de soumission envers lui. (Josèphe, Antiq., 16, 9, 3; Appianus, de Bello civili, 5, 75.) Ces rapports duraient depuis la conquête de Pompée. César lui-même avait réglé par un décret les revenus des princes indigènes; et si Hérode, en sa qualité de regulus, avait pu jusqu'alors lever des impôts dans le pays, il ne pouvait toutefois agir librement, même dans ses affaires de famille. D'après Appien, il était obligé d'envoyer un tribut à l'empereur, et de lui fournir des armées comme roi allié dans le cas d'une guerre, telle que celle dont menaçaient alors les Parthes.

Mais Josèphe (Ant., 18, 1, 1) parle clairement d'un autre recensement fait treize ans plus tard par le même Quirinius, et qui ne s'appliquait qu'à la Judée et à Samarie. Quirinius agissait en cette circonstance non plus comme gouverneur provisoire, mais comme gouverneur réel et titulaire de la Syrie. Il l'entreprit dès le commencement de sa seconde magistrature, et le termina malgré une nouvelle sédition excitée par Judas de Gamala et le pharisien Sadok, à l'occasion même de ce dénombrement. Ceci arriva donc après qu'Archélaüs eut été exilé à Vienne dans les Gaules, en 759, et lorsque Quirinius fut chargé de convertir en provinces romaines le pays que ce dernier avait gouverné, et d'incorporer tous ses biens au fisc impérial. Ce pays dès lors fut réuni à la Syrie, et soumis à des procureurs romains, entre lesquels PoncePilate est le plus remarquable pour nous. Or ce recense

T. I.

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ment ne peut être celui que nous cherchons en ce moment, quoique pendant longtemps il ait été regardé comme tel par les Pères de l'Église. Saint Luc nous fournit lui-même aux Actes des Apôtres (ch. v, v. 37) une preuve évidente que ce dénombrement n'est point celui dont il parle dans son Évangile. Car, si dans les Actes il fait mention de ce second recensement, pour distinguer le premier de celui-ci il a bien soin de l'appeler dans son Évangile le premier qui se fit par Cyrinus. Plusieurs interprètes modernes traduisent ainsi cette phrase de saint Luc : « Ce dénombrement fut antérieur à celui qui se fit sous Cyrinus; » et cette interprétation peut très-facilement se justifier au point de vue philologique, par des exemples pris dans les auteurs classiques: Kepler et de nos jours Tholuk l'ont adoptée.

Au reste, ce dernier recensement n'était qu'une continuation du premier, qui, comme nous l'apprend l'histoire, avait rencontré de grandes difficultés. On avait d'abord compté la population par tribus, conformément à la constitution du peuple juif, afin de rétablir l'ordre généalogique des différentes familles, sans aller jusqu'à taxer les propriétés. Encore cette mesure n'avait-elle été appliquée qu'aux anciennes tribus de Juda et de Benjamin revenues de la captivité. Puis on avait été arrêté par les troubles qu'avait soulevés dans la nation ce mouvement général, effet nécessaire du recensement, et surtout par la terreur que ce nom seul inspirait au peuple juif, depuis que le premier dénombrement fait sous le roi David lui avait coûté si cher. Le recensement de la Judée ne fut donc achevé que plus tard, en 759, sous le gouvernement réel de Quirinius. Si celui-ci ne fut chargé du premier que par

une mission extraordinaire, comme nous l'avons vu plus haut, Saturninus était donc vraiment gouverneur de Syrie à cette époque, et la tradition de l'Église, toujours pure et digne de foi, nous donne encore ici le véritable sens des livres saints.

Maintenant si, pour nous assurer de l'année où JésusChrist est né, nous cherchons l'époque et la durée du gouvernement proconsulaire de Saturninus, Josèphe nous apprend qu'il gouverna la Syrie comme propréteur de 744 à 748, de telle sorte néanmoins qu'il avait quitté longtemps avant la fin de cette dernière année sa province, où Varus prit sa place. Et la numismatique elle-même confirme ce fait : car Eckhel dans son livre Doctrina nummorum veterum (ш, p. 275; iv, p. 401) nous a laissé l'image de plusieurs monnaies d'Antioche en Syrie, avec cette inscription : A Antioche sous Varus xxv. Pour comprendre cette date, il faut savoir que Séleucie et d'autres villes de Syrie commencèrent une nouvelle ère après la bataille d'Actium (2 septembre 723), qu'ils appelèrent ère d'Actium, ou les années de la victoire, ou encore la chronologie syriaque. La vingt-cinquième année dont parle l'inscription coincide donc avec l'époque qui court du mois de septembre 747 à 748. Ce ne fut néanmoins que dans cette dernière année qu'il remplaça son prédécesseur Saturninus: d'où l'on doit conclure que les monnaies dont il s'agit ici furent frappées dès le commencement de son gouvernement. Que l'on juge maintenant s'il faut considérer comme un mythe ce que l'Évangile nous rapporte et du recensement fait sous l'empereur Auguste, et du voyage de Joseph et de Marie à Bethlehem par suite de ce recensement, et de la naissance de Jésus-Christ dans cette ville.

Voici donc le résumé de tout ce chapitre. Vers la fin de l'an 746 commence la paix universelle. Puis le recensement est prescrit dans tout l'empire romain, et exécuté en Syrie et en Judée par Quirinius ou Cyrinus, pendant que Saturninus y était gouverneur. Peu après le commencement de l'année 748 Varus remplace ce dernier. Donc le recensement de la Judée et la naissance du Sauveur ont eu lieu l'an 747 après la fondation de Rome, c'est-à-dire sept ans plus tôt que ne le porte la chronologie chrétienne.

CHAPITRE V

L'étoile du Messie.

Voici ce que dit par la bouche de Balaam l'esprit de prophétie : « Je le vois, mais pas encore; je le contemple, « mais non de près. Voici qu'une étoile sort de Jacob, et « qu'un sceptre s'élève du milieu d'Israël, qui dissipera «<les confins de Moab et brisera tous les enfants de Seth.>> (Nombres, ch. xxiv, 17.)

Ces paroles ont toujours été appliquées à la naissance de Jésus-Christ. Sur ce point, la tradition juive et la tradition chrétienne sont parfaitement d'accord et les Pères de l'Église, Origène, Eusèbe, Cyprien, Jérôme, Augustin, Chrysostome, Théophylacte, donnent la main aux rabbins juifs. Aussi le Targum d'Onkelos interprète déjà les paroles citées plus haut de cette manière : Un roi sortira de Jacob, et le Messie sera oint du milieu d'Israèl. Et Aben Esra avoue que beaucoup ont entendu ces paroles du Messie. A cette époque, le monde obéissait en silence au sceptre romain,

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