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généreux'. Un obstacle insurmontable s'opposoit au succès de son intrigue avec le roi. Entraîné par la fougue de l'âge, Louis XIV avoit désobéi sans pudeur aux préceptes de la religion; mais cependant, par une contradiction qui ne se concilie que trop bien avec notre misérable nature, il fut toujours sincèrement attaché à ses dogmes, il ne négligeoit pas ses pratiques, il ne rejetoit point ses conseils. Lorsque ses directeurs spirituels, et surtout Bossuet2, virent que le feu des passions s'étoit amorti en lui, et que son amour pour madame de Montespan s'étoit presque éteint par une longue jouissance, ils tâchèrent de l'arracher à ses habitudes. Ils lui représentèrent qu'un tel commerce étoit beaucoup plus coupable avec une femme mariée qu'avec toute autre. Ces scrupules qu'ils avoient fait naître en lui, et qui lui firent prendre la résolution de se séparer de madame de Montespan, s'appliquoient aussi à madame la duchesse de Nevers, et empêchèrent la réussite du plan qu'on avoit formé. Il

1 Caylus, Souvenirs, p. 121; Choisy, Mémoires; Recueil de chansons critiques et historiques, manuscrit, t. I, p. 235. Mademoiselle de Thianges avoit été mariée au duc de Nevers, le 14 décembre 1670. Voyez la Gazette de Robinet et l'Histoire du Théâtre-François, par les frères Parfaict, t. XI, p. 107.

De Beausset, Histoire de Bossuet, t. II, p. 54-58; madame de Maintenon, Lettres, Amsterdam. 1756, t. II, p. 99, lettre x1, adressée à la comtesse de Saint

Céran.

étoit difficile pour madame de Montespan de trouver quelqu'un qui pût remplacer sa nièce. Louis XIV n'aimoit pas seulement les femmes pour leurs attraits, il recherchoit aussi en elles ces délassements de l'esprit, ces jouissances de l'âme qu'on ne goûte que dans leur société. Presque toujours, dans ses fantaisies amoureuses, l'attendrissement du cœur venoit se joindre à l'entraînement des sens. Avec de telles dispositions, il étoit à craindre pour la maîtresse en titre que le moyen qu'elle vouloit employer pour perpétuer sa domination, ne fût la cause qui contribuât à la faire cesser, et qu'elle ne devînt ainsi l'artisan de sa propre infortune. Cependant l'ascendant que la veuve de Scarron prenoit sur le roi, les scrupules qu'elle lui inspiroit, rendirent la position de madame de Montespan de plus en plus chancelante, et la déterminèrent à pousser elle-même le monarque dans les bras de mademoiselle de Fontanges', d'une éclatante beauté, mais sans esprit, et incapable, à ce qu'elle croyoit, d'avoir aucun ascendant sur

Caylus, Souvenirs, p. 78; madame de Sévigné, Lettres, t. VI, p. 99; lettre 701, p. 105; lettre 702, p. 118; lettre 704, p. 186; lettre 716, p. 191; lettre 717; lettre 752, p. 350; et les lettres en date du 15 juillet 1680, et du 3 avril 1681, t. VII, p. 55; Lettres inédites, 1819, in-12, p. 63; Passe-temps du Palais-Royal ou les amours de madame de Fontanges, inséré dans les Amours des Gaules; Madame, Fragments des lettres originales, t. II, p. 51-103-105; La Beaumelle, Mémoires de madame de Maintenon, 1755, in-8°, liv. vi, chap. 111, p. 186 à 201; Walck., 1" édit., p. 431, note 11.

lui. Le prince de Marsillac, fils du duc de La Rochefoucauld, et qui jouissoit auprès de madame de Montespan d'une grande faveur, fut l'agent dont elle se servit pour cette intrigue1. S'il étoit besoin de fournir encore des preuves que madame de Montespan favorisoit cette liaison du roi, il suffiroit de produire les vers qui nous restent de La Fontaine, au sujet de la nouvelle maîtresse, qu'il n'eût certainement pas composés, s'il avoit cru déplaire à l'ancienne. Une de ces pièces de vers consiste en quatre quatrains, qui sont des prédictions pour les quatre saisons de l'année: ces quatre quatrains furent mis dans un almanach écrit à la main sur du vélin, et garni d'or et de diamants, que madame de Fontanges donna en étrennes à madame de Montesle premier jour de l'an 16802. L'autre pièce est une épître assez longue, adressée à madame de Fontanges, que le roi venoit de faire duchesse. Cette pièce seule, lorsque tous les monuments historiques viendroient à périr, suffiroit pour conserver à la postérité le souvenir des désordres de Louis XIV, et du scandale de sa vie. Le poëte, dans cette épître, a fait entrer l'éloge de la figure

pan,

1 Remarques sur le gouvernement du royaume de France durant les règnes de Henri IV, le grand, de Louis XIII, surnommé le juste, de Louis XIV, surnommé Dieudonné, le grand, l'invincible, Cologne, 1688, p. 126.

Manuscrits de Coulanges, à la bibliothèque de l'Arsenal, en 3 vol., in-4°, t. I, p. 192; La Fontaine, Poésies diverses, 6, t. VI, p. 198; Walck., 1o édit. p. 433.

noble et majestueuse du roi, de la beauté, des graces de celle dont les dieux ont récompensé ce dompteur des humains; et en même temps il y célébre le mariage du prince de Conti avec mademoiselle de Blois, fille naturelle de madame de La Vallière, et celui du dauphin, héritier légitime de la couronne, avec la princesse de Bavière. Ces deux mariages eurent lieu en 1680, à peu de mois d'intervalle: le premier, le 16 janvier, et le second, le 7 mars suivant'. Si on met part les inconvenances morales, dont on ne

à

doit

pas faire de reproche au poëte, puisqu'elles ne frappoient point la cour ni le monarque, on doit convenir que cette épître est digne de La Fontaine. Le dieu des vers par lequel il fait prononcer les épithalames de ces deux mariages, ue l'auroit point désavoué. Il commence par celui du prince de Conti:

Le dieu des vers lut deux épithalames.
En voici l'un: Couple heureux et parfait,
Couple charmant, faites durer vos flanimes
Assez long-temps pour nous rendre jaloux;
Soyez amants aussi long-temps qu'époux.

Madame de Sévigné, Lettres inédites, 1819, in-12, p. 54, n° 615, et Lettres, t. VI. p. 183, lettre 715 en date du 28 février 1680, et t. VI, p. 109, lettre 703, en date du 17 janvier 1680; 1 Art de vérifier les dates, 3° édit., in-folio, t. 1, p. 689; Hénault, t. II, p. 679, in-4; Saint-Simon, Mémoires, t. III, p. 117; Dangeau, Mémoires, t. I, p. 119; Caylus, Souvenirs, p. 163-168; Walck., 1′′ édit., p. 433, note 12. Dreux du Radier s'est trompé comme beaucoup d'autres. Voyez les Mémoires et anecdotes des reines et régentes de France, in-12, t. VI, p. 447.

Douce journée! et nuit plus douce encore!
Heures, tardez, laissez au lit l'Aurore.
Le temps s'envole; il est cher aux amants;
Profitez donc de ses moindres moments,
Jeune princesse, aimable autant que belle,
Jeune héros, non moins aimable qu'elle;
Le temps s'envole, il faut le ménager;
Plus il est doux, et plus il est léger'.

Le poëte passe ensuite à l'épithalame du dauphin, dont le mariage étoit arrêté, mais non encore célébré.

Puis le père des vers,

Changeant de ton pour l'autre épithalame,
Lut ce qui suit: Chantez, peuples divers;
Que tout fleurisse aux terres leurs demeures.
Ne tardez plus; avancez, lentes heures;
Allez porter aux humains un printemps
Tel que celui qui commença les temps.
Heures, volez; hâtez l'heur et la joie
Du fils des dieux à qui l'Olympe envoie
Une princesse au regard enchanteur.

Cette épître à madame de Fontanges paroît n'avoir été imprimée qu'après la mort de La Fontaine; mais elle circula beaucoup dans le temps, et madame de Sévigné en parle dans une de ses lettres, en date du 22 septembre 16802.

Madame de Montespan s'étoit trompée dans ses

La Fontaine, Épitres, 14, t. VI, p. 127.

2 Madame de Sévigné, Lettres, 719, t. VI, p. 471, en date du 22 septembre 1680.

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