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chantés. Ils traversèrent les vastes prairies qu'arrose l'Irtis, semblables à des mers de verdure, et diversifiées çà et là de longs tapis de lis jaunes, de lisières de ginseng, et de touffes de rhubarbe au large feuillage en suivant ses bords, ils s'enfoncèrent dans les forêts du nord, sous les majestueux rameaux des sapins, et sous les ombrages mobiles des bouleaux. Que de riantes vallées s'ouvrirent à eux le long des fleuves, et les invitèrent à s'écarter de leur route, en leur promettant encore de plus doux objets! Que de coteaux émaillés de fleurs inconnues, et couronnés d'arbres antiques et vénérables, les engagèrent à ne pas aller plus loin! Parvenus sur les bords de la mer Glaciale, un nouvel ordre de choses s'offrit à eux. Il n'y avait plus de nuit; le soleil tournait autour de l'horizon, et des brumes éparses dans les airs répétaient, sur différents plans, sa lumière en arcs-enciel de pourpre, et en éblouissantes parélies. Mais, si la magnificence était redoublée dans les cieux, la désolation était sur la terre. L'Océan était hérissé de glaces flottantes, qui apparaissaient à l'horizon comme des tours et

comme des cités en ruine; et on ne voyait sur le continent, pour bocages, que quelques arbrisseaux déformés par les vents, et pour prairies, que des rochers couverts de mousses. Sans doute périrent là les troupeaux qui les avaient accompagnés; mais la nature y avait encore pourvu aux besoins des hommes. Ces rivages étaient formés de lits épais de charbon de terre.* Les mers fourmillaient de poissons, et les lacs d'oiseaux. Il fallait, parmi les animaux, des aides et des domestiques : le renne parut au milieu des mousses: il offrit à ces familles errantes, les services du cheval dans sa légèreté, la toison de la brebis dans sa fourrure; et en leur montrant, comme la vache, ses quatre mamelles avec un seul nourrisson, il sembla leur dire qu'il était destiné, comme elle, à partager son lait avec des mères surchargées d'enfants.

Mais la partie de la terre qui attira les premiers regards des hommes, dut être l'Orient. Le lieu de l'horizon où se lève le soleil, fixa sans doute toute leur attention,

* Voyage en Sibérie, du professeur Gmelin.

dans un temps où aucun de nos systèmes n'avait encore déterminé leurs opinions. En voyant l'astre de la lumière se lever, chaque jour, du même côté, ils durent se persuader qu'il avait là une demeure fixe, et qu'il en avait une autre aux lieux où il allait se coucher. Ces imaginations, confirmées par le témoignage de leurs yeux, furent sans doute naturelles à des hommes sans expérience, qui avaient tenté d'élever une tour jusqu'au ciel, et qui, au milieu même des siècles éclairés, crurent comme un point de religion, que le soleil était traîné dans un char par des chevaux, et qu'il allait se reposer tous les soirs dans les bras de Téthys. Je présume qu'ils se déterminèrent plutôt à le chercher du côté de l'orient que de l'occident, dans la persuasion qu'ils abrégeraient beaucoup leur chemin en allant au-devant de lui. Ce fut, je pense, cette opinion qui laissa long-temps l'occident désert, sous les mêmes latitudes où l'orient fut peuplé, et qui entassa d'abord les hommes vers la partie orientale de notre continent, où s'est formé le premier et le plus nombreux empire du monde, qui est

celui de la Chine. Ce qui me confirme encore que les premiers hommes qui s'avançèrent vers l'orient, étaient occupés de cette recherche, et se hâtaient d'arriver à leur but, c'est qu'étant partis de l'Inde, le berceau du genre humain, comme les fondateurs des autres nations, ils ne peuplèrent point, comme ceux-ci, la terre de proche en proche, ainsi que la Perse, la Grèce, l'Italie et les Gaules l'ont été successivement du côté de l'occident; mais laissant désertes les vastes et fertiles contrées de Siam, de la Cochinchine et du Tonquin, qui sont encore aujourd'hui à demi barbares et inhabitées, ils ne s'arrêtèrent qu'à l'Océan oriental, et ils donnèrent aux îles qu'ils apercevaient au loin, et où ils n'eurent pas de long-temps l'industrie d'aborder, le nom de Gepuen, dont nous avons fait le nom de Japon, et qui signifie, en chinois, naissance du soleil.

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Le père Kircher assure que lorsque les premiers jésuites mathématiciens arrivèrent à la Chine, et y réformèrent le calendrier,

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Voyez la Chine illustrée, chap. 1x.

les Chinois croyaient que le soleil et la lune n'étaient pas plus grands qu'on les voyait ; qu'ils entraient, en se couchant, dans un antre profond, d'où ils ressortaient le matin à leur lever; et que la terre, enfin, était une superficie plane et unie. Ces idées, nées du premier témoignage des sens, ont été communes à tous les hommes. Tacite, qui a écrit l'histoire avec tant de jugement, n'a pas dédaigné, dans celle de la Germanie, de rapporter les traditions des peuples occidentaux, qui affirmaient que vers le nord-ouest était le lieu où se couchait le soleil, et qu'on entendait le bruit qu'il faisait quand il se plongeait dans les flots.

Ce fut donc du côté de l'orient que l'astre de la lumière attira d'abord la curiosité des hommes. Il y eut aussi des peuples qui se dirigèrent vers ce point de la terre, en partant de la pointe la plus méridionale de l'Inde. Ceux-ci s'avancèrent le long de la presqu'île de Malaca; et, familiarisés avec la mer qu'ils côtoyaient, ils prirent le parti de profiter des commodités réunies que les deux éléments présentent aux voyageurs, en naviguant d'île

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