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HISTOIRE DE L'ÉGLISE.

du pédagogue hérétique prirent si peu dans cette vertueuse famille, qu'un autre du Tillet, frère des deux premiers, fut dans la suite un des plus pieux évêques de Meaux. Tout ce que Calvin put faire à Angoulême, ce fut d'ébaucher, sous le titre d'Institution chrétienne, le livre ténébreux dont nous verrons bientôt les fruits sanglans et sacriléges lui donner encore ce trait nouveau de ressemblance avec le prophète de la Mecque.

HISTOIRE

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Depuis le commencement de l'hérésie de Calvin en 1534, jusqu'à la dernière condamnation d'Henri VIII en 1538.

TOUT

OUT le monde chrétien soupirait depuis trop long-temps après la conclusion de l'affaire scandaleuse du roi Henri VIII, pour qu'il pût encore paraître expédient de la différer. On la demandait vivement en Espagne, où l'on comptait beaucoup sur les partisans que Charles V et Catherine sa tante avaient dans le sacré college. On ne la désirait pas moins en France et en Angleterre, où, sur les avis récens de l'évêque de Paris, ambassadeur à Rome, on se flattait d'avoir pour soi le plus grand nombre des suffrages. Enfin, le 23 de Mars 1534, le pape assembla son consistoire, qui se trouva composé de vingt-deux cardinaux. L'affaire étant instruite, et la téméraire décision de l'archevêque de Cantorbéry à ce sujet ayant même déjà été condamnée, on ne tarda point a recueillir les voix dont trois seulement furent pour Henri, et toutes les autres contre son divorce. Le pape fit aussitôt dresser la sentence, qui cassait le mariage, de c Tome 1X.

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prince avec Anne de Boulen, et qui lui ordonnait, sous peine de censure, de reprendre Catherine d'Aragon comme son unique et légitime épouse. On y mit ensuite le dernier sceau, en la publiant avec les solennités ordinaires (1). Voilà toute l'affaire en substance, et dégagée des circonstances moins sûres, qui varient ici comme par-tout ailleurs, selon la diversité des partis et des intérêts.

Nous ne dissimulons pas cependant que la cour de Rome est aceusée de partialité et de précipitation le torrent des auteurs ou des copistes car par après tout, la plupart des écrivains, sur ce point d'histoire, ne font que copier la relation du seigneur Martin du Bellay. Il est vrai que cet auteur contemporain, et même frère de l'évêque de Paris qui eut tant de part à ces négociations, forme un témoignage dont il est difficile d'affaiblir l'impression. Aussi le rapporterons-nous fidèlement, afin de laisser au lecteur la liberté de se décider lui-même. Or, selon Martin du Bellay, l'évêque son frère étant arrivé à Rome, fut d'abord admis au consistoire, et il y fit pour Henri VIII des propositions. que la cour romaine parut trouver raisonnables. Comme il fallait cependant une dernière réponse du roi d'Angleterre, l'évêque demanda un délai suffisant pour la faire venir; ce qu'on lui accorda

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marquant un terme précis, au delà duquel on n'entendrait plus rien. Le roi d'Angleterre fit en effet. expédier des lettres qui pouvaient aplanir beaucoup de difficultés: mais le courrier ne paraissant point au terme fatal, le pape et les cardinaux se rassemblèrent pour juger, sans que toute l'éloquence du. prélat français eût pu obtenir un sursis de six jours, à quoi se bornait toute sa demande. Ce jour-lả même, contre la règle qui voulait qu'on agitât la chose durant trois consistoires, on prononça le décret définitif. Le courrier étant arrivé deux jours après, avec toutes les dépêches qu'on avait deman

(1) Mem. du Bell. 1. 4.

dées, on parut se repentir, on chercha des remèdes; on n'en trouva point, et le décret subsista. Tel est en substance tout le récit de Martin du Bellav, si généralement adopté, que nous n'entreprendrons pas de le contredire : mais en faveur des personnes pour qui les jugemens vulgaires ne font pas loi, nousne laisserons pas de présenter quelques observations, qui peuvent au moins épargner des recherchespénibles.

Dans les lettres écrites à Francois I.er immédiatement après la condamnation d'Henri VIII, les deux agens qui les écrivaient, savoir l'évêque de Paris et son associé l'évêque de Mâcon, ne disent pas un mot, ni du courrier dépêché en Angleterre, ni des sollicitations pour le faire attendre quelques jours au delà du terme donné, ni de la précipitation contraire aux usages romains et aux règles même de la justice (). Ces ministres paraissent néanmoins très-piqués du décret, ils en exposent toutes les parties et les circonstances, ils en prévoient les suites funestes; ils disent que le pape lui bême semble très-étonné de cette issue, et qu'avec plusieurs membres de son conseil, il cherche les moyens de remédier aux inconvéniens de sa bulle. Mais sur l'anecdote du courrier et ses différentes circonstances, pas un mot, pas le moindre trait qui établisse, qui insinue en aucune manière ce fait capital. Si cependant le fait eût été certain, eussent-ils rien eu de plus pressé que d'en instruire le roi leur maître? On voit par les mêmes lettres, que pew auparavant ils avaient envoyé au roi une grande liste des cardinaux qu'ils croyaient favorables au parti de France et d'Angleterre. Nous vous présen tions, disent-ils, les opinions des cardinaux, bien différentes de ce que l'effet les a montrées; c'est que nous en jugions sur leur bouche, et non pas sur le fond caché de leur coeur. Là-dessus ne doit-on pas présumer au moins, non seulement que

(1) Hist. du Div. tom. шu', p. 631.

nos deux évêques se trompèrent dans l'idée qu'ils se formaient sur les sentimens de la cour de Rome à l'égard d'Henri VIII, mais que la vraie cause du jugement rigoureux rendu enfin contre ce prince, fut le scandale qu'il donnait en tout genre depuis près de sept ans, et qu'il aggravait de jour en jour ? Tandis même que les évêques français négociaient pour lui à Rome, il travaillait en Angleterre à ruiner entièrement l'autorité du saint siége. Ce fut alors précisément qu'il établit la coutume de faire monter chaque jour un prélat en chaire, pour publier dans la cathédrale de Londres, que l'évêque de Rome n'avait pas plus de pouvoir sur les Anglais que tout autre évêque hors de son diocèse (1).

Après tout, pouvait-on violer, ne devait-on pas défendre les droits d'une reine répudiée, dégradée par le seul motif d'une passion honteuse ? Et quand cette princesse ennuyée de l'oppression, ou cédant aux importunités, aurait consenti à se renfermer dans un monastère; en eût-il moins subsisté, ce noeud sacré du mariage, que Dieu forme lui-même, et qu'aucun homme n'a le pouvoir de dissoudre? Si ce dessein put être conçu par quelques ministres de la cour de Rome, ce fut un trait marqué de providence à l'égard de l'église romaine, de lui sauver, par l'inexécution, la honte ineffaçable d'avoir varié dans ses principes, et même d'avoir attenté sur le droit divin. Car enfin la validité du mariage d'Henri VIII avec Catherine d'Aragon portait sur des preuves si solides, et si généralement regardées comme telles, que sa dissolution eût été le scandale de toute la chrétienté. Il n'est pas de notre ressort d'exposer la longue suite de ces preuves, et moins encore tout le faible des consultations mendiées par l'époux infidèle, afin de légitimer son adultère. Peu de mots suffiront pour remplir ici la juste attente du lecteur.

Pour se convaincre évidemment qu'il n'est pas (1) Burn. ad an. 1534.

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