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Madame, c'est à moi d'accomplir sa promesse.
Mais il faut, croyez-moi, sans attendre plus tard',
Ainsi que notre hymen presser notre départ:
Nos intérêts communs et mon cœur le demandent.
Prêts à vous recevoir mes vaisseaux vous attendent;
Et du pied de l'autel vous y pouvez monter,
Souveraine des mers qui vous doivent porter.

MONIME.

Seigneur, tant de bontés ont lieu de me confondre.
Mais, puisque le temps presse, et qu'il faut vous répondre,
Puis-je, laissant la feinte et les déguisements,

Vous découvrir ici mes secrets sentiments??

Vous pouvez tout.

PHARNACE.

MONIME.

Je crois que je vous suis connue. Éphèse est mon pays; mais je suis descendue 3

D'aïeux, ou rois, seigneur, ou héros qu'autrefois

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C'est le seul vers foible dans cette magnifique tirade de Pharnace, remplie de vers admirables. Pharnace, d'après son caractère fourbe, veut éblouir Monime par le faste des promesses, par un vain étalage de grandeur. Remarquez sur-tout la beauté et l'harmonie du dernier vers. (G.)

2 VAR. Puis-je, en vous proposant mes plus chers intérêts, Vous découvrir ici mes sentiments secrets?

3 Tout ce que Monime dit ici étoit sans doute connu de Pharnace; mais elle ne lui rappelle ses aïeux et sa naissance, que parceque Pharnace paroît l'oublier en lui parlant d'un ton impérieux. L'auteur ne pouvoit avec plus d'adresse faire connoître Monime aux spectateurs. (L. B.) Selon Plutarque, Monime n'étoit point d'Ephèse, mais de Milet. (Vie de Lucullus, chap. 9.)

Leur vertu, chez les Grecs, mit au-dessus des rois.
Mithridate me vit; Éphèse, et l'Ionie,
A son heureux empire étoit alors unie!:
Il daigna m'envoyer ce gage de sa foi.
Ce fut pour ma famille une suprême loi:
Il fallut obéir. Esclave couronnée,

Je partis pour l'hymen où j'étois destinée.
Le roi, qui m'attendoit au sein de ses états,
Vit emporter
ailleurs ses desseins et ses pas,
Et, tandis que la guerre occupoit son courage,
M'envoya dans ces lieux éloignés de l'orage.
J'y vins : j'y suis encor. Mais cependant, seigneur,
Mon père paya cher ce dangereux honneur:
Et les Romains vainqueurs, pour première victime,
Prirent Philopomen, le père de Monime2.
Sous ce titre funeste il se vit immoler;

Et c'est de quoi, seigneur, j'ai voulu vous parler.
Quelque juste fureur dont je sois animée,

Je ne puis point à Rome opposer une armée;
Inutile témoin de tous ses attentats,

Je n'ai pour me venger ni sceptre ni soldats;

Enfin, je n'ai qu'un cœur. Tout ce que je puis faire 3,

I

2

VAR. A son heureux empire étoit encore unie.

Il ne peut être ici question du célèbre Philopomen, chef des Achéens, mort long-temps avant la naissance de Mithridate; mais il y a beaucoup d'adresse à supposer Monime fille d'un des descendants de ce grand homme : cette origine donne plus d'éclat et de dignité au personnage; la haine de Monime pour les Romains se trouve bien motivée par le desir de venger la mort de son père. (G.)

3 VAR. Seigneur, je n'ai qu'un cœur. Tout ce que je puis faire.

C'est de garder la foi que je dois à mon père,

De ne point dans son sang aller tremper mes mains En épousant en vous l'allié des Romains.

PHARNACE.

Que parlez-vous de Rome et de son alliance?
Pourquoi tout ce discours et cette défiance?
Qui vous dit qu'avec eux je prétends m'allier?

MONIME.

Mais vous-même, seigneur, pouvez-vous le nier?
Comment m'offririez-vous l'entrée et la couronne
D'un pays que par-tout leur armée environne1,
Si le traité secret qui vous lie aux Romains
Ne vous en assuroit l'empire et les chemins?

PHARNACE.

De mes intentions je pourrois vous instruire,
Et je sais les raisons que j'aurois à vous dire,
Si, laissant en effet les vains déguisements,
Vous m'aviez expliqué vos secrets sentiments 2;
Mais enfin je commence, après tant de traverses 3,
Madame, à rassembler vos excuses diverses;
Je crois voir l'intérêt que vous voulez celer,
Et qu'un autre qu'un père ici vous fait parler.

XIPHARÈS.

Quel que soit l'intérêt qui fait parler la reine,
La réponse, seigneur, doit-elle être incertaine?

3

I VAR. D'un pays que la guerre et leur

camp environne.

2 VAR. Si vous-même, laissant ces vains déguisements,

Vous m'aviez expliqué vos propres sentiments.

Traverses ne peut s'employer pour détours:
: traverses, dans le

style noble, signifie contrariétés, accidents, malheurs. (G.)

Et contre les Romains votre ressentiment
Doit-il pour éclater balancer un moment?
Quoi! nous aurons d'un père entendu la disgrace;
Et, lents à le venger, prompts à remplir sa place,
Nous mettrons notre honneur et son sang en oubli!
Il est mort: savons-nous s'il est enseveli1?
Qui sait si, dans le temps que votre ame empressée
Forme d'un doux hymen l'agréable pensée,
Ce roi, que l'Orient tout plein de ses exploits
Peut nommer justement le dernier de ses rois,
Dans ses propres états, privé de sépulture,
Ou couché sans honneur dans une foule obscure,
N'accuse point le ciel qui le laisse outrager,
Et des indignes fils qui n'osent le venger 2?
Ah! ne languissons plus dans un coin du Bosphore:
Si dans tout l'univers quelque roi libre encore,
Parthe, Scythe ou Sarmate, aime sa liberté3,
Voilà nos alliés : marchons de ce côté.

I

Beau, ainsi que tout le reste du couplet; mais c'est mettre dans la bouche de Xipharès la condamnation de tout ce qu'il a dit et fait jusqu'ici. (L.)

2

Desfontaines pense que Racine eût mieux fait de mettre ses indignes fils, au lieu de des indignes fils: selon ce critique, la phrase en seroit plus claire; le venger se rapporteroit encore plus immédiatement à Mithridate. L'opinion de l'abbé Desfontaines est raisonnable. Louis Racine prétend qu'il faut nécessairement d'indignes; il ajoute que c'est une faute d'imprimeur, et que l'auteur avoit mis, selon toutes les apparences, et deux indignes fils. M. Didot a corrigé le vers d'après cette opinion. Pour moi, je suis convaincu que Racine a mis et a voulu mettre et des indignes fils: toutes les éditions faites pendant sa vie sont uniformes. (G.)

3 Ce trait est conforme à la lettre que Mithridate écrivit au roi

Vivons, ou périssons dignes de Mithridate;

Et songeons bien plutôt, quelque amour qui nous flatte, A défendre du joug et nous et nos états,

Qu'à contraindre des cœurs qui ne se donnent pas.

PHARNACE.

Il sait vos sentiments. Me trompois-je, madame?
Voilà cet intérêt si puissant sur votre ame,
Ce père, ces Romains que vous me reprochez.

XIPHARÈS.

J'ignore de son cœur les sentiments cachés;

Mais je m'y soumettrois sans vouloir rien prétendre,
Si, comme vous, seigneur, je croyois les entendre.

PHARNA CЕ.

Vous feriez bien; et moi, je fais ce que je doi:
Votre exemple n'est pas une règle pour moi.

XIPHARES.

Toutefois en ces lieux je ne connois personne
Qui ne doive imiter l'exemple que je donne.

PHARNACE.

Vous pourriez à Colchos vous expliquer ainsi.

XIPHARES.

Je le puis à Colchos, et je le puis ici.

PH ARNA CЕ.

Ici! vous y pourriez rencontrer votre perte.....

des Parthes, pour lui demander son alliance. (G.) Voyez la traduction de cette lettre, à la suite de la pièce.

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