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nous ne pourrions presque rien décider sur quelque matière que ce soit.

Ainsi, nous croyons à l'existence de Dieu, sans prétendre sonder l'infini, parce que la raison nous fournit de puissants arguments en faveur de cette existence; nous admettons l'éternité de Dieu, quoique nous ne la concevions point, parce qu'elle nous est enseignée et qu'elle ne contient rien en elle de contradictoire; nous croyons au Sauveur, à ses enseignements et à son sacrifice, sans comprendre tout ce qui a rapport à sa nature intime, tout en convenant qu'il y a du mystère dans la Rédemption; mais notre foi repose sur ce que nous pouvons affirmer, sur la convenance de certaines idées entre elles, et notre raison nous assure que nous en savons assez pour que notre foi soit éclairée et solide. Il en est à cet égard des objets de la foi comme des objets naturels qui nous entourent; nous trouvons promptement les limites de notre savoir et de nos connaissances; nous nous taisons, nous ne prononçons rien sur ce qui dépasse notre intelligence, nous suspendons à cet égard notre jugement, et ce que nous adoptons touche les points sur lesquels nos idées sont assez nettes pour former un jugement et pour avoir une opinion arrêtée.

Il faut qu'un homme, dans son bon sens, auquel on propose des idées sur un sujet quelconque s'assure de la convenance ou de la disconvenance de ces idées, et plus on lui répète qu'elles sont importantes et qu'elles peuvent influer puissamment sur son exis

tence ici-bas et sur son sort à venir, plus il devra s'attacher à donner à ces idées une signification en harmonie avec la nature des objets dont il s'agit, plus il devra les soumettre à un examen rigoureux, et prouver que, loin d'en avoir rien à craindre, elles en sortent victorieuses. Pour croire, il faut des motifs, pour apprécier ces motifs, il faut les peser; sans cela, on se contente de vains mots. Dieu nous a donné la raison comme un moyen de nous préserver de l'erreur; or, il peut y avoir erreur dans la foi, puisqu'elle est le résultat de l'assentiment que nous donnons à des preuves. Nous croyons, après examen, que telle vérité vient de Dieu, ou que tel dogme a été imaginé par les hommes.

Les Pères de l'Église les plus recommandables ont tiré très-grand parti de la raison humaine dans leurs enseignements et dans leurs ouvrages; Clément d'Alexandrie [1] soutient les droits de la raison contre les Ebionites, qui semblables sur ce point à quelques docteurs de nos jours, ne voulaient entendre parler que de la foi, que d'une foi nue [2], il dit: « Il est des gens pleins d'estime pour eux-mêmes, qui ne veulent pas de la philosophie, qui refusent d'apprendre la dialectique et la physique; ils ne veulent que la foi et une foi nue, comme l'agriculteur qui voudrait vendanger sans avoir pris soin de la vigne; (nous pouvons ajouter, sans avoir planté

[1] Stromat, liv. 1, ch. 1x.

[2] Ψιλης πιςις.

la vigne): «<Comment ne serait-il pas nécessaire que celui qui s'occupe des choses qui sont du ressort del'intelligence ne scrutât pas les hommes dépositaires des secrets de Dieu? Comment ne serait-il pas utile de distinguer les passages douteux et ceux qui sont en harmonie avec la divine alliance?»Augustin, qui a si souvent outragé la raison dans sa théologie, revient à elle et lui rend hommage en disant [1]: « Nous ne prétendons pas que les objets sur lesquels porte notre foi soient susceptibles d'être prouvés par le témoignage des sens; nous n'en prétendons pas moins la raison elle-même en fournit la démonstration et doit leur soumettre notre créance. » Plusieurs des

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Pères se sont plu à reconnaître que la philosophie développée et perfectionnée par la foi, fortifiait à son tour celle-ci par ses arguments et ses preuves. Justin Martyr, Basile, Chrysostôme, Origène, Grégoire de Nysse le répètent dans leurs ouvrages [2].

Enfin, les auteurs sacrés témoignent en notre faveur et s'appuient sur le même principe; ils s'adressent perpétuellement à la raison de l'homme pour éclairer et corroborer sa foi. Dans l'Ancien Testament, Job examine ce qui l'entoure, et il recourt à la raison pour nous instruire de l'existence d'un Dieu créateur, x11, 7-10; il dépeint les cieux et la

[1] Augustin, tom. v1, pag. 141. De la créance aux choses qu'on ne voit pas.

[2] Voyez Guillon, Collection des Pères, tom. 11, V, VII, VIII,

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terre, puis il ajoute : Qui ne reconnaît pas que c'est Dieu qui a fait toutes ces choses? Il veut que notre raison conclue de l'examen de l'univers, qu'il existe un Être auteur de ces merveilles. Le Psalmiste, XIX, 2, 5, fait le même raisonnement. Les cieux publient la gloire de Dieu, et l'étendue donne à connaître l'ouvrage de ses mains. Ps. xciv, 8 : 0 vous, les plus stupides des hommes, réfléchissez ! insensés, quand aurez-vous de l'intelligence? Es. XL, 26: Levez les yeux et regardez qui a créé les corps célestes. St. Paul, dit Rom. 1, 20: Les perfections invisibles de Dieu.... se voient comme à l'œil quand on considère ses ouvrages. Les fidèles de Bérée, qui confrontaient les enseignements des Apôtres et les faits dont ils étaient témoins avec les leçons et les oracles des prophètes, que faisaient-ils, si ce n'est de consulter leur raison, pour s'assurer s'il y avait ou non accord entre les deux codes? Quand St. Paul dit 1 Cor. x, 15: Je vous parle comme à des personnes intelligentes, JUGEZ VOUS-MÊMES de ce que je dis; proscrivait-il ou enjoignait-il la réflexion et l'examen? 1 Thess. v, 21 : Éprouvez toutes choses et retenez ce qui est bon; ce précepte emporte également le rejet de ce qui est absurde et mauvais : Soyez prêts à rendre compte à tous ceux qui vous demanderont raison de l'espérance que vous avez; c'est un ordre de 1 Pierre III, 15; ces paroles ne veulent pas dire, croyez, parce que vous croyez, mais soyez en état de dire ce que vous croyez et pourquoi vous le croyez. Nous ne disons pas autre chose, et nous

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puisons dans les saints livres eux-mêmes la preuve de notre assertion.

Outre ces preuves directes et positives, pour peu qu'on y réfléchisse on se convaincra que la raison, loin d'être exclue du domaine de la foi, doit lui servir de base, et peser les preuves favorables à une révélation, afin de leur donner ou de leur refuser son assentiment.

Si j'ai le droit de consulter chaque jour ma raison pour un grand nombre d'affaires, souvent de trèspeu d'importance, pourquoi ne serait-elle pas admise à prononcer sur les titres d'une révélation qu'il lui importe infiniment de connaître; pourquoi lui défendrait-on de s'assurer si Dieu lui a parlé? Je ne saurais en comprendre les motifs.

que

Dieu a parlé, me dit-on, et ce qu'il a enseigné vous concerne, sa parole est contenue dans un livre; ce livre n'est pas tombé du ciel, il a été écrit par des hommes, il a été conservé et transmis par des hommes. Avant de reconnaître la vérité de ces assertions, j'ai un travail considérable à faire. Il faut je vérifie d'abord si ce livre a bien été écrit par ceux dont ils portent les noms; il faut que je constate que ce livre m'est parvenu sans altération au travers de plusieurs siècles; et cet examen exige des travaux, des recherches, des collations laborieuses de manuscrits et de versions.

Ce n'est pas tout, il faut que je m'assure de la crédibilité des témoins, que j'acquière des données sur

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