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Pour mettre Apollon en défaut.

Apollon reconnut ce qu'il avoit en tête.

Mort ou vif, lui dit-il, montre-nous ton moineau,
Et ne me tens plus de panneau,

Tute trouverois mal d'un pareil stratagême.
Je vois de loin, j'atteins de même.

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L'Avare qui a perdu fon Tréfor. L'Ufage feulement fait la possession.

Je demande à ces gens, de qui la paffion

Eft d'entaffer toujours, mettre fomme fur fomme, Quel avantage ils ont que n'ait pas un autre homme. (1) Diogene là-bas eft auffi riche qu'eux;

Et l'Avare ici-haut, comme lui vit en gueux. L'homme au tréfor caché qu'Esope nous propose, Servira d'exemple à la chofe.

Ce malheureux attendoit

Pour jouir de fon bien une seconde vie,
Ne poffédoit pas l'or, mais l'or le poffédoit.
Il avoit dans la terre une fomme enfouie,
Son cœur avec, n'ayant autre (2) déduit,

(1) Philofophe fort pauvre, mais pauvre volontaire.

(2) Pas de plus grand plaifir. Déduit, qui fignifie plaifir, divertiffement, eft vieux. Quoiqu'usité encore, il l'eft pourtant

fi

peu, que je ne croi pas qu'il foit inutile de l'expliquer ici, en faveur de plufieurs Etrangers qui fe plaifent à lire les Fables de la Fontaine.

Que d'y ruminer jour & nuit,

Et rendre fa (3) chevance à lui-même facrée.
Qu'il allât ou qu'il vint, qu'il bût ou qu'il mangeât,
On l'eût pris de bien court à moins qu'il ne fongeât
A l'endroit où gifoit cette fomme enterrée.
Il y fit tant de tours qu'un Foffoyeur le vit,
Se douta du dépôt, l'enleva fans rien dire.
Notre Avare un beau jour ne trouva que le nid.
Voilà mon homme aux pleurs : il gémit, il foupire,
Il fe tourmente, il fe déchire.

Un paffant lui demande à quel fujet fes cris.
C'est mon tréfor que l'on m'a pris.

Votre tréfor? Où pris? Tout joignant cette pierre.
Eh! Sommes-nous en temps de guerre
Pour l'apporter fi loin? N'euffiez-vous pas mieux fait
De le laiffer chez vous en votre cabinet,

Que de le changer de demeure?

Vous auriez pû fans peine y puiser à toute heure. A toute heure, bons Dieux! Ne tient-il qu'à cela! L'argent vient-il comme il s'en va?

Je n'y touchois jamais. Dites-moi donc, de grace, Reprit l'autre, pourquoi vous vous affligez tant, Puifque vous ne touchiez jamais à cet argent? Mettez une pierre à la place,

Elle vous vaudra tout autant.

(3) Son bien, fon tréfor. Chevance, qui fignifioit autrefois le bies d'une perfonne, eft préfentement un vieux mot.

FABLE X X I.

L'œil du Maître.

UN Cerf s'étant fauvé dans une étable à Bœufs,

Fut d'abord averti par eux,

Qu'il cherchât un meilleur afyle.

Mes freres, leur dit-il, ne me décelez pas :
Je vous enfeignerai les pâtis les plus gras:
Ce fervice vous peut quelque jour être utile;
Et vous n'en aurez pas regret.

Les Bœufs, à toutes fins, promirent le fecret.
Il fe cache en un coin, refpire & prend courage.
Sur le foir on apporte herbe fraîche & fourage,
Comme l'on faifoit tous les jours.

L'on va, l'ont vient, les valets font cent tours,
L'Intendant même ; & pas un d'aventure
N'apperçut ni cor, ni ramure,

Ni Cerf enfin. L'habitant des forêts
Rend déjà grace aux Bœufs, attend dans cette étable
Que chacun retournant au travail de Cérès,
Il trouve pour fortir un moment favorable.

L'un des Bœufs ruminant, lui dit : Cela va bien; Mais quoi? L'homme aux cent yeux n'a pas fait fa revûe :

Je crains fort pour toi fa venue.

Jufque-là, , pauvre Cerf, ne te vante de rien.

Là-deffus le Maître entre, & vient faire fa ronde. Qu'est-ceci? dit-il à fon monde,

Je trouve bien peu d'herbe en tous ces râteliers.

Cette

Cette litiere eft vieille, allez vite aux greniers.
Je veux voir déformais vos bêtes mieux foignées,
Que coûte-t-il d'ôter toutes ces Araignées ?
Ne fauroit-on ranger ces jougs & ces colliers?
En regardant à tout, il voit une autre tête
Que celles qu'il voyoit d'ordinaire en ce lieu.
Le Cerf eft reconnu : chacun prend un épieu :
Chacun donne un coup à la bête.

Ses larmes ne fauroient la fauver du trépas.
On l'emporte, on la fale, on en fait maint repas
Dont maint voifin s'éjouit d'être.

Phédre (1) fur ce fujet dit fort élégamment,
Il n'est pour voir que l'œil du Maître.
Quant à moi, j'y mettrois encor l'œil de l'Amant.

(1) Phédre, excellent Auteur de Fables, qu'il a écrites en verg Latins, d'un ftyle fort semblable à celui de Terence.

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L'Alouette & fes petits, avec le Maître
d'un Champ.

NE t'attens qu'à toi feul, c'est un commun proverbe,

Voici comme Efope le mit
(1) En crédit.

(1) Par la Fable fuivante, qui nous a été confervée en Latin par Aulu-Gelle, L. II. c. 29.

On n'a qu'à comparer la maniére de conter d'Aulu-Gelle, affez élégante, avec celle de La Fontaine, pour être convaincu que La Fontaine a trouvé l'art

d'embellir fes originaux, qu'il leur prête des graces fi naturelles, qu'en les imitant il devient original lui-même, & un original, qui, felon toutes les appa rences, reftera long-temps in mitable.

L

Les Alouettes font leur nid
Dans les bléds quand ils font en herbe,
C'est-à-dire environ le temps

Que tout aime, & que tout pullule dans le monde :
Monftres marins au fond de l'onde,

Tigres dans les forêts, Alouettes aux champs.
Une pourtant de ces derniéres

Avoit laiffé paffer la moitié d'un Printemps
Sans goûter les plaisirs des amours printanniéres.
A toute force enfin elle fe réfolut

D'imiter la nature; & d'être mere encore.
Elle bâtit un nid, pond, couve, & fait éclore,
A la hâte, le tout alla du mieux qu'il put.
Les bléds d'alentour mûrs, avant que (2) la nitée
Se trouvât affez forte encor
Pour voler & prendre l'essor,

De mille foins divers l'Alouette agitée,
S'en va chercher pâture, avertit fes enfans
D'être toujours au guet & faire fentinelle.
Si le poffeffeur de ces champs

Vient avecque fon fils, comme il viendra, dit-elle,
Ecoutez bien felon ce qu'il dira,

:

Chacun de nous décampera.

Si-tôt que l'Alouette eut quitté fa famille,
Le poffeffeur du champ vient avecque fon fils.
Ces bléds font mûrs, dit-il, allez chez nos amis.
Les prier que chacun apportant fa faucille,

(2) On trouve nitée dans l'Edition in-quarto de 1668. & ce qui prouve qu'en effet La Fontaine a employé nitée, qui eft en ufage dans quelques Provinces,

c'est qu'il a laiffé ce mot dans l'Edition de 1678. qu'il a eu foin d'accompagner lui-même d'un très-bon Errata.

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