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Le commandant tira sa révérence.

Il sort : le bruit des verrous effrayans
Dans les cachots se prolonge long-tems.

Tel gronde au loin de caverne en caverne
L'horrible cri du clairon de l'Averne,
Lorsque Satan veut contre les élus
Armer en vain ses bataillons cornus.
Anéanti dans sa douleur profonde,
Loin d'une épouse, hélas! et loin du monde,
Le Franc-Comtois trois jours se morfondit,
Se parla seul, et seul se répondit,
Pleura, crut voir les larmes de sa femme,
La consola, répondit pour la dame,
Le jour d'après grimpa sur le donjon,
Le jour d'après voulut lire un sermon,
Dormit un peu, s'ennuya davantage,
Jura long-tems, puis s'arma de courage.

Tandis qu'il traîne en ces divers ennuis
Des jours sans fin, d'interminables nuits,
Secrètement sa fidèle compagne
Avec décence accouche à la campagne
D'un bel enfant, regretté par l'amour,
Qui le vit naître et mourir en un jour.
Envers Lucine une fois qu'elle est quitte,
A son époux elle songe au plus vite:
Car c'est l'usage; et femmes de Paris
Savent tromper, mais servir leurs maris.

Près de deux mois l'excédé solitaire

Avait gémi dans sa cellule austère.

Le commandant vient lui dire un beau soir,
La larme à l'œil, et comme au désespoir:

« Monsieur le Comte, on en veut placer d'autres;
« J'aurais voulu vous voir long-tems des nôtres;
« Je l'espérais; mais voilà qu'aujourd'hui

« Le roi renonce à vous loger chez lui.

<< Accusez-en le crédit de madame:

<< Elle a tant fait ! tant remué! - Ma femme?

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Qu'elle est aimable! et que je suis content!»>
Il dit, s'élance, et décampe à l'instant.
Un char doré, qui l'attend à la porte
Dans un hôtel aussitôt le transporte;
Il monte, il trouve un souper préparé,
Et tout un cercle élégamment paré.
Ce ne sont plus les ténébreux abîmes
Où le caprice a caché ses victimes:
Le vieux donjon, les sourcilleuses tours;
Mais son épouse en ses plus beaux atours,
Sa jeune épouse, et vingt femmes charmantes,
Vingt courtisans aux formes prévenantes.

Amis! pas trop;

pas trop; mais parlant d'amitié;

Monsieur Lainet n'était pas oublié.

Ainsi l'on voit sur la scène magique

Où l'on conspire, où l'on aime, en musique,

Une cité remplacer des déserts,

Et tout l'Olympe au sortir des enfers.

L'époux fut gai, gais furent les convives, Le souper fin, les caresses très-vives; Pope l'anglais aurait dit : Tout est bien. Lainet conta que le roi très-chrétien Était prudent, équitable et sensible; Mais que le pape était seul infaillible; Que le monarque avait été surpris Par ses agens; que l'on s'était mépris; Qu'il se faisait chaque jour des mécomptes; Que dans le monde il existait deux comtes: L'un Franc-Comtois, et l'autre Limousin, Tous deux portant le nom de Valespin; Que cette fois Besançon, par mégarde, Avait payé pour Brive-la-Gaillarde. Il parlait d'or; et le bon Franc-Comtois, Fêté, choyé, sablant le vin d'Arbois, Crut fermement ce qu'il entendait dire, En rit beaucoup, mais fit beaucoup plus rire. Ce qui vaut mieux : pour dédommagement, Du roi d'Espagne il eut un régiment; A la Comtesse il dut ce bon office. Dans le grand siècle on aimait la justice.

Il fut cocu, prisonnier et content.
Du cocuage il n'apprit rien pourtant;
Car son épouse était femme discrète.
Long-tems après, l'aventure secrète

Fit quelque bruit dans l'une et l'autre cour:

Paris la sut; la Province eut son tour.
On loua fort, comme avisés et sages,
Le roi, sa mère, et tous les personnages;
Et, pour former les filles de Saint-Cyr,
L'abbé Choisy promit qu'à son loisir
Il en ferait narration piquante,

Sous le beau nom d'Histoire édifiante.

DE CONSTANCE.

PRÉFACE.

A M***, PASTEUR DE LA CONFESSION D'AUSBOURG.

A Dieu ne plaise qu'aucun de nous prétende élever quelque doute sur les mystères! On s'occupe depuis dix-huit siècles à démontrer leur vérité. Désormais rien n'est si clair. Aussi n'est-il plus en Europe d'homme un peu raisonnable qui n'en soit convaincu tout aussi bien que vous et moi. Pourquoi? C'est qu'il ne faut que du bon sens pour concevoir la sainte Trinité, l'Incarnation, sans en excepter la Rédemption. Malheur aux incrédules qui sont assez mauvais logiciens pour n'y rien comprendre!

Les miracles ne font guères plus de difficulté. Je parle ici des miracles de Jésus, de ses apôtres, et des premiers siècles de l'église. En effet, le christianisme n'a pu s'établir sans miracle. Or, Dieu voulait l'établissement du christianisme; donc il a voulu, de toute éternité, que l'ordre

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