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pour former une puiffante affociation fous le nom de Mécontens ; & peu de temps après, cette ligue s'unit de nouveau avec celle des diffidens, dans le palais du prince de Radzivill, à Varsovie. Cependant le roi convoqucit une diète extraordinaire, dans le deffein de prévenir une guerre civile, & d'appaifer l'impératrice de Ruffie dont les troupes étoient déjà à la porte de Varfovie. Cette diète fut trèsorageufe. L'évêque de Cracovie & fes partifans s'étant permis des difcours violens contre les diffidens & contre les cours qui les protégeoient, les Ruffes firent arrêter ce prélat de nuit avec l'évêque de Kiof, & un petit nombre d'autres perfonnes. On les envoya en Ruffie fans autre examen, & ils y furent long-temps détenus. (1) La diète fut intimidée; & enfin, après bien des débats, elle fe fépara en nommant un comité qu'elle chargea de régler les affaires des diffidens, de concert avec les miniftres des cours. Dès-lors la préfence des troupes ruffes donna un tout autre tour aux délibérations de ce comité, & de la diète à laquelle il fit fon rapport. Les diffidens y obtinrent tout ce qu'ils demandoient.

Perfonne ne s'oppofa au rétablissement des loix qui leur étoient les plus favorables, ni aux autres réglemens que la Ruffie voulut faire paffer dans cette diète, & qui étoient visiblement destinés à perpétuer l'état de foibleffe & d'anarchie de la Pologne, & à lui ôter tout moyen de réfifter aux projets ambitieux de fes voifins.

Cette foumiffion, cette tranquillité apparente, étoient le calme qui précède une tempête. Le roi qui n'avoit qu'une ombre de pouvoir, étoit forcé, tantôt de fe laiffer aller au torrent des paffions de fon peuple, tantôt de déférer aux volontés des puiffances étrangères. Sans appui, fans crédit, fans argent, prifonnier dans fa capitale, perfécuté par tous les partis, enlevé & prefque affaffiné par des traîtres, pendant qu'on ufurpoit fes plus belles provinces, il fe vit enfin réduit à se jeter dans les bras des puiffances mêmes qui démembroient fon

royaume.

Les Polonois mécontens avoient certainement quelques fujets de

(1) L'évêque & fes affociés furent arrêtés le 15 Octobre 1767, & relâchés feulement au commencement de 1773.

l'être. Les loix paffées à la dernière diète, reffembloient plutôt aux décrets d'un vice - roi abfolu établi par la Ruffie, qu'aux réfolutions POLOGNE. d'un peuple libre. Le traitement qu'avoient effuyé l'évèque de Cracovie & fes partifans, ne laiffoit plus de liberté dans les délibérations ; & les cours de Petersbourg & de Berlin annonçoient aux Polonois, en entrant dans toutes leurs affaires, qu'elles ne vouloient plus leur laiffer qu'une ombre de liberté. Les mécontens trouvoient dans tous malheurs autant de prétextes pour s'élever & fe liguer contre le roi. A peine la diète eut-elle été diffoute, que les catholiques renouvellèrent leurs plaintes au fujet des privilèges accordés aux diffidens, & formèrent des confédérations vers les frontières de la Turquie, pour la défense de la Sainte Foi Catholique. Ils arborèrent des étendards où étoit peinte la Vierge Marie avec l'enfant Jéfus. Sur d'autres on voyoit l'aigle de Pologne déployé avec ces mots : conquérir ou mourir; pour la religion & la liberté. Les foldats de ces confédérations portoient, comme les croifés des temps anciens, une croix brodée fur leurs habits. Ils s'emparèrent de la fortereffe de Bar en Podolie, & de la ville de Cracovie. Les troupes que le roi envoya pour s'opposer à leurs progrès, furent défaites ou féduites, & une partie fe joignit aux confédérés. Devenus plus redoutables de jour en jour, les Ruffes feuls pouvoient les contenir. Auffi le fénat fit-il prier l'ambaffadeur de Ruffie de ne pas renvoyer ces troupes; & cette demande lui fut aifément accordée. Ainfi la guerre fut allumée dans prefque toutes les parties de la Pologne qui devinrent un théâtre de carnage & de dévastations. Dans les divers combats qui fe donnèrent, la bonne difcipline des Ruffes leur affura le plus fouvent la fupériorité. Les confédérés foutinrent cependant leurs efforts pendant près cinq ans, de 1768 à 1773. Ils furent d'abord encouragés fecrètement par la maifon d'Autriche, enfuite fecourus par les Turcs, & les François leur fournirent de l'argent & des officiers. Le détail de cette guerre ne peut entrer dans le plan de cet ouvrage. Je choifirai feulement entre tant d'actes de cruauté & de vengeance qu'elle produifit, l'attentat commis fur la perfonne du roi, dont la rélation détaillée qu'on va lire, m'a été communiquée par mon ami Nathaniel Wraxel. Le nom de cet ingénieux écrivain eft bien connu dans le monde.

favant (*), & fon féjour à Varfovie l'a mis en état de fe procurer POLOGNE. fur ce remarquable événement des informations très-sûres, que je me trouve heureux de pouvoir communiquer à mes lecteurs, dans les propres termes de l'auteur.

(*) Il a écrit plufieurs relations de voyages en Suède, Dannemarc, & autres parties de l'Europe, où l'on trouve des détails agréables (Note du Traducteur.)

CHAPITRE II I.

On confpire contre la vie du roi de Pologne

du complot l'attaquent dans les rues de Varsovie

Les auteurs

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- Il eft

bleffé & enlevé Traitement qu'il effuie, & fa délivrance

miraculeufe Il eft ramené à Varsovie

cipaux conjurés.

Sort des prin

Au milieu de ces fcènes de trouble & de défolations, les confédérés qui perfistoient à ne pas reconnoître le roi comme légitimement POLOGNE. élu, & qui regardoient les malheurs de leur patrie & l'oppreffion que les Ruffes lui faifoient fouffrir, comme un effet de l'élévation de ce prince fur le trône, formèrent & exécutèrent un des plus audacieux complots dont l'hiftoire moderne faffe mention. Ils réfolurent d'affaffiner le roi; & c'eft, pour l'observer en paffant, une chofe digne d'attention que dans un fiècle auffi éclairé, cù l'humanité eft si refpectée, où les grands crimes font rares, c'est le troisième attentat de cette espèce, & qu'aucun des trois n'ait pû être confommé. Celui qui fut dirigé contre la perfonne du roi de Pologne, eft peutètre le plus atroce des trois : la manière, dont il fut préfervé est auffi la plus extraordinaire. C'est ce qui m'engage à entrer à ce fujet dans les plus grands détails.

Ce fut un noble polonois, nommé Pulaski, général de l'armée des confédérés qui forma le projet de cet atroce attentat. Ceux qui fe chargèrent de l'exécution, au nombre d'environ quarante, avoient trois chefs nommés Lukawski, Strawenski & Kofiski, que le général avoit engagés à Czetschokow (*) de la manière la plus folemnelle, en

(*) Ou plutôt Tfchenftochowa ville de la petite Pologne avec un couvent fortifié qui appartient à l'ordre de St. Paul Phermite. On y conferve un image mira

!

POLOGNE.

plaçant leurs mains dans les fiennes, & en leur faifant promettre de lui livrer le roi vivant, ou fi cela fe trouvoit impoffible, de le faire mourir. Ces trois chefs, accompagnés de trente - fept hommes choisis, fe rendirent à Varfovie environ un mois après. Ils fe déguisèrent en pay fans, & feignant d'y conduire du foin qu'ils avoient à vendre, & fous lequel ils avoient cachés leurs felles, leurs habits & leurs armes, ils y entrèrent fans être reconnus ni foupçonnés.

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Le dimanche au foir, troifième Septembre 1771, un petit nombre d'entr'eux fe poftèrent dans les dehors de la ville, pendant que les autres fe rendirent au lieu du rendez-vous, la rue des Capucins, où ils favoient que le roi pafferoit en s'en retournant au palais à l'heure ordinaire. Le roi étoit allé rendre vifite à fon oncle le prince Czartoriski, grand chancelier de Lithuanie, & retournoit au palais entre neuf & dix heures du foir. Il étoit en carroffe, accompagné tout au moins de quinze à feize perfonnes, outre un aide-de-camp, qui étoit affis à côté de lui. A peine étoit-il à deux cent pas de l'hôtel de Czartoriski, que les conjurés l'attaquèrent, en ordonnant au cocher d'arrêter, fous peine d'être tué fur le champ. Ils tirèrent plufieurs coups fur le carroffe, & un heyduque qui s'efforçoit de défendre fon maître, fut percé d'une balle, & mourut le lendemain. Ce brave homme, qui étoit proteftant, fut le feul de fa fuite qui montra de la fidélité & du courage. Tous les autres fe difpersèrent, fans excepter l'aide - de - camp, qui abandonna auffi le roi, & s'enfuit. Cependant le roi avoit ouvert la portière du carroffe, dans le deffein de tenter s'il pourroit échapper aux affaffins, à la faveur des ténèbres de cette nuit qui étoit extrêmement obfcure. Il étoit même déjà defcendu, lorfque les affaffins le faifirent par les cheveux, en criant avec d'horribles imprécations: nous te tenons à préfent, ton heure est

culeufe de la Vierge peinte par St. Luc, & qui eft l'objet de la vénération d'un nombre de pèlerins qui s'y rendent de toutes parts. Les moines à qui ce couvent appartient en propre, ainfi que la fortereffe, y tiennent une garnifon à leurs frais. Quelques relations portent que Pulaski fit prêter ferment aux conjurés fur cette image de la Vierge. (Note du Traducteur.)

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