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LITURGIQUE

PRÉFACE GÉNÉRALE

La prière est pour l'homme le premier des biens. Elle est sa lumière, sa nourriture, sa vie même, puisqu'elle le met en rapport avec Dieu, qui est lumière (1), nourriture (2) et vie (3). Mais, de nous-mêmes, nous ne savons pas prier comme il faut (4); il est nécessaire que nous nous adressions à Jésus-Christ, et que nous lui disions comme les Apôtres : Seigneur, enseignez-nous à prier (5). Lui seul peut délier la langue des muets, rendre diserte la bouche des enfants, et il fait ce prodige en envoyant son Esprit de grâce et de prières (6),

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qui prend plaisir à aider notre faiblesse, suppliant en nous par un gémissement inenarrable (1).

Or, sur cette terre, c'est dans la sainte Église que réside ce divin Esprit. Il est descendu vers elle comme un souffle impétueux, en même temps qu'il apparaissait sous l'emblême expressif de langues enflammées. Depuis lors, il fait sa demeure dans cette heureuse Épouse; il est le principe de ses mouvements ; il lui impose ses demandes, ses vœux, ses cantiques de louange, son enthousiasme et ses soupirs. De là vient que, depuis dix-huit siècles, elle ne se tait ni le jour, ni la nuit; et sa voix est toujours mélodieuse, sa parole va toujours au cœur de l'Époux.

Tantôt, sous l'impression de cet Esprit qui anima le divin Psalmiste et les Prophètes, elle puise dans les Livres de l'Ancien Peuple le thème de ses chants; tantôt, fille et sœur des saints Apôtres, elle entonne les cantiques insérés aux Livres de la Nouvelle Alliance; tantôt, enfin, se souvenant qu'elle aussi a reçu la trompette et la harpe, elle donne passage à l'Esprit qui l'anime, et chante à son tour un cantique nouveau (2); de cette triple source émane l'élément divin qu'on nomme la Liturgie.

(1) Rom. VIII. 26. (2) Psalm. CXLIII.

La prière de l'Église est donc la plus agréable à l'oreille et au cœur de Dieu, et partant, la plus puissante. Heureux donc celui qui prie avec l'Église, qui associe ses vœux particuliers à ceux de cette Épouse chérie de l'Époux et toujours exaucée! Et c'est pourquoi le Seigneur Jésus nous a appris à dire notre Père, et non mon Père; donnez-nous, pardonnez-nous, délivreznous, et non donnez-moi, pardonnez-moi, délivrez-moi. Aussi, pendant plus de mille ans, voyons-nous que l'Église, qui prie dans ses temples sept fois le jour et encore au milieu de la nuit, ne priait point seule. Les peuples lui faisaient compagnie et se nourrissaient avec délices de la manne cachée sous les paroles et les mystères de la divine Liturgie. Initiés ainsi au Cycle divin des mystères de l'Année Chrétienne, les fidèles, attentifs à l'Esprit, savaient les secrets de la vie éternelle; et sans autre préparation, un homme était souvent choisi par les Pontifes pour devenir Prêtre ou Pontife lui-même, afin de répandre sur le peuple chrétien les trésors de doctrine et d'amour qu'il avait amassés à leur source.

Car si la prière faite en union avec l'Église est la lumière de l'intelligence, elle est aussi, pour le cœur, le foyer de la divine charité. L'âme chrétienne ne se retire pas à l'écart pour converser avec Dieu et louer

ses grandeurs et ses miséricordes, parce qu'elle sait bien que la société de l'Épouse du Christ ne l'enlève point à elle-même. Ne fait-elle pas elle-même partie de cette Église qui est l'Épouse, et Jésus-Christ n'a-t-il pas dit: Mon Père, qu'ils soient un en la manière que nous sommes un (1)? Et quand plusieurs sont rassemblés en son nom, le même Sauveur ne nous assure-t-il pas qu'il est au milieu d'eux (2)? L'âme pourra donc converser à l'aise avec son Dieu qui l'assure être si près d'elle, et dès lors psalmodier comme David, en présence des Anges, dont la prière éternelle s'unit dans le temps à la prière de l'Église.

Mais trop de siècles déjà se sont écoulés depuis que les peuples, préoccupés d'intérêts terrestres, ont abandonné les saintes Veilles du Seigneur et les Heures mystiques du jour. Quand le rationalisme du XVIe siècle s'en vint les décimer au profit de l'erreur, il y avait déjà longtemps qu'ils avaient réduit aux seuls Dimanches et Fêtes les jours où ils continueraient de s'unir extérieurement à la prière de la sainte Église. Le reste de l'année, les pompes de la Liturgie s'accomplissaient sans le concours des peuples qui, de génération en

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génération, oubliaient de plus en plus ce qui avait fait la forte nourriture de leurs pères. La prière individuelle se substituait à la prière sociale: le chant, qui est l'expression naturelle des vœux et des plaintes même de l'Épouse, était réservé pour les jours solennels. Ce fut une première et triste révolution dans les mœurs chrétiennes.

Mais, du moins, le sol de la Chrétienté était encore couvert d'Églises et de Monastères qui retentissaient le jour et la nuit des accents de la prière sacrée des âges antiques. Tant de mains levées vers le ciel en faisaient descendre la rosée, dissipaient les orages, assuraient la victoire. Ces serviteurs et ces servantes du Seigneur, qui se répondaient ainsi dans la louange éternelle, étaient députés solennellement par les sociétés encore catholiques d'alors, pour acquitter intégralement le tribut d'hommages et de reconnaissance dù à Dieu, à la glorieuse Vierge Marie et aux Saints. Ces vœux et ces prières formaient le bien commun; chaque fidèle aimait encore à s'y unir, et si quelque douleur, quelque espérance, le conduisait parfois au temple de Dieu, il aimait à y entendre, à quelque heure que ce fût, cette voix infatigable qui montait sans cesse vers le ciel pour le salut de la Chrétienté. Bien plus, le Chrétien fervent s'y unissait en vaquant

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