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SCENE I I I.

OEDIPE, JOCASTE, LE GRAND-PRETRE, EGINE, DIMAS, ARASPE, LE CHOEUR.

OEDIPE.

PEUPLE,

EUPLE, qui dans ce temple apportant vos douleurs, Préfentez à nos dieux des offrandes de pleurs;

Que ne puis-je, fur moi détournant leurs vengeances,
De la mort qui vous fuit étouffer les femences!
Mais un roi n'eft qu'un homme en ce commun danger,
Et tout ce qu'il peut faire eft de le partager.

(au Grand-Prêtre.)

Vous, Miniftre des dieux que dans Thèbe on adore,
Dédaignent-ils toujours la voix qui les implore?
Verront-ils fans pitié finir nos tristes jours?
Ces maîtres des humains font-ils muets et fourds?

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Roi, Peuple, écoutez-moi. Cette nuit à ma vue
Du ciel fur nos autels la flamme eft defcendue;
L'ombre du grand Laïus a paru parmi nous,
Terrible et refpirant la haine et le courroux.

Une effrayante voix s'eft fait alors entendre.

"Les Thébains de Laïus n'ont point vengé la cendre;

دو

Le meurtrier du roi refpire en ces Etats,

" Et de fon fouffle impur infecte vos climats.

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Il faut qu'on le connaiffe, il faut qu'on le puniffe.

Peuples, votre falut dépend de fon fupplice. "

OEDIP E.

Thébains, je l'avouerai, vous fouffrez juftement
D'un crime inexcufable un rude châtiment.
Laïus vous était cher, et votre négligence
De fes mânes facrés a trahi la vengeance.

Tel eft fouvent le fort des plus juftes des rois ! (e)
Tant qu'ils font fur la terre on refpecte leurs lois,
On porte jufqu'aux cieux leur juftice fuprême,
Adorés de leur peuple, ils font des dieux eux-même;
Mais après leur trépas, que font-ils à vos yeux ?
Vous éteignez l'encens que vous brûliez pour eux;
Et comme à l'intérêt l'ame humaine eft liée,
La vertu qui n'eft plus eft bientôt oubliée.
Ainfi du ciel vengeur implorant le courroux,
Le fang de votre roi s'élève contre vous.
Appaisons fon murmure, et qu'au lieu d'hécatombe
Le fang du meurtrier foit verfé fur fa tombe.
A chercher le coupable appliquons tous nos foins.
Quoi! de la mort du roi n'a-t-on pas de témoins
Et n'a-t-on jamais pu, parmi tant de prodiges,
De ce crime impuni retrouver les veftiges?
On m'avait toujours dit que ce fut un Thébain
Qui leva fur fon prince une coupable main.

(à Jocafe.)

Pour moi qui, de vos mains recevant fa couronne, Deux ans après fa mort ai monté fur fon trône, Madame, jufqu'ici, refpectant vos douleurs, Je n'ai point rappelé le fujet de vos pleurs; Et de vos feuls périls chaque jour alarmée Mon ame à d'autres foins femblait être fermée.

JOCAST E.

Seigneur, quand le deftin me réfervant à vous.
Par un coup imprévu m'enleva mon époux ;
Lorfque, de fes Etats parcourant les frontières,
Ce héros fuccomba fous des mains meurtrières;
Phorbas en ce voyage était feul avec lui.
Phorbas était du roi le confeil et l'appui :
Laïus qui connaiffait fon zèle et fa prudence,
Partageait avec lui le poids de fa puiffance.
Ce fut lui qui du prince, à fes yeux maffacré,
Rapporta dans nos murs le corps défiguré :
Percé de coups lui-même, il se traînait à peine;
Il tomba tout fanglant aux genoux de fa reine.
"Des inconnus, dit-il, ont porté ces grands coups;
Ils ont devant mes yeux maffacré votre époux;

دو

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دو

Ils m'ont laiffé mourant; et le pouvoir céleste

De mes jours malheureux a ranimé le refte.,,

Il ne m'en dit pas plus et mon cœur agité
Voyait fuir loin de lui la trifte vérité;

Et peut-être le ciel, que ce grand crime irrite,
Déroba le coupable à ma jufte poursuite:
Peut-être, accompliffant fes décrets éternels,
Afin de nous punir, il nous fit criminels.
Le Sphinx bientôt après défola cette rive;
A fes feules fureurs Thèbes fut attentive:
Et l'on ne pouvait guère, en un pareil effroi,
Venger la mort d'autrui, quand on tremblait pour foi.

OEDIP E.

Madame, qu'a-t-on fait de ce fujet fidèle ?

JO CASTE.

Seigneur, on paya mal son service et fon zèle.

Tout

Tout l'Etat en fecret était fon ennemi,

Il était trop puiffant pour n'être point haï;
Et du peuple et des grands la colère infenfée
Brûlait de le punir de fa faveur passée.
On l'accufa lui-même, et d'un commun transport
Thèbe entière à grands cris me demanda fa mort:
Et moi, de tous côtés redoutant l'injustice,
Je tremblai d'ordonner fa grâce ou fon fupplice.
Dans un château voifin conduit secrétement,
Je dérobai fa tête à leur emportement.
Là, depuis quatre hivers, ce vieillard vénérable,
De la faveur des rois exemple déplorable,
Sans fe plaindre de moi ni du peuple irrité,
De fa feule innocence attend sa liberté.

Madame, c'eft affez.

OEDIP E. ·

(à fa fuite.)

Courez, que l'on s'empreffe:
Qu'on ouvre fa prifon, qu'il vienne, qu'il paraiffe.
Moi-même devant vous je veux l'interroger.
J'ai tout mon peuple ensemble et Laïus à venger.
Il faut tout écouter, il faut, d'un œil févère,

Sonder la profondeur de ce trifte mystère.

Et

vous, Dieux des Thébains, Dieux qui nous exaucez, Puniffez l'affaffin, vous qui le connaissez.

Soleil, cache à fes yeux le jour qui nous éclaire;
Qu'en horreur à fes fils, exécrable à sa mère,
Errant, abandonné, profcrit dans l'univers,
Il raffemble fur lui tous les maux des enfers;
Et que fon corps fanglant, privé de fépulture,
Des vautours dévorans devienne la pâture!

Théâtre. Tom. I.

LE GRAND-PRETRE.

A ces fermens affreux nous nous uniffons tous.

OEDIP E.

Dieux, que le crime feul éprouve enfin vos coups!
Ou fi de vos décrets l'éternelle justice
Abandonne à mon bras le foin de fon fupplice,
Et fi vous êtes las enfin de nous haïr,
Donnez en commandant le pouvoir d'obéir.
Si fur un inconnu vous pourfuivez le crime,
Achevez votre ouvrage et nommez la victime.
Vous, retournez au temple; allez, que votre voix
Interroge ces dieux une feconde fois;

Que vos vœux parmi nous les forcent à defcendre:
S'ils ont aimé Laïus, ils vengeront fa cendre;
Et conduifant un roi facile à fe tromper,

Ils marqueront la place où mon bras doit frapper.

Fin du premier acte.

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