Obrazy na stronie
PDF
ePub

faffent valoir. Ils fubftituent à des paffages néceffaires des vers ineptes et ridicules, ils en chargent leurs manufcrits ; et c'eft fur ces manufcrits que des libraires ignorans impriment des chofes qu'ils n'entendent point.

L'extrême abondance des ouvrages dramatiques a dégradé l'art au lieu de le perfectionner; et les amateurs des lettres, accablés fous l'immenfité des volumes, n'ont pas eu même le temps de diftinguer fi ces ouvrages imprimés font corrects ou non.

Les nôtres du moins le feront: et nous pouvons affurer les étrangers qui attendent notre édition, qu'ils n'y trouveront rien qui offense une langue devenue leurs délices et l'objet conftant de leurs études.

DES EDITEURS

SUR L'OEDIPE.

L'AUTEUR Compofa cette pièce à l'âge de dix-neuf ans. Elle fut jouée en 1718, quarantecinq fois de fuite. Ce fut le fieur Dufresne, célèbre acteur, de l'âge de l'auteur, qui joua le rôle d'Oedipe. La demoiselle Defmares, trèsgrande actrice, joua celui de Jocafte, et quitta le théâtre quelque temps après. On a rétabli dans cette édition le rôle de Philoctete, tel qu'il fut joué à la première représentation.

La pièce fut imprimée pour la première fois en 1718. M. de la Motte approuva la tragédie d'Oedipe. On trouve dans fon approbation cette phrase remarquable: Le public, à la représentation de cette pièce, s'eft promis un digne fucceffeur de Corneille et de Racine; et je crois qu'à la lecture il ne rabattra rien de fes prétentions.

L'abbé de Chaulieu fit une mauvaise épigramme contre cette approbation: il difait que l'on connaissait La Motte pour un mauvais auteur, mais non pour un faux prophète. C'eft ainfi que les grands hommes font traités au commencement

de leur carrière; mais il ne faut pas que tous ceux que l'on traite de même, s'imaginent pour cela être de grands hommes. La médiocrité infolente éprouve les mêmes obftacles que le génie, et cela prouve feulement qu'il y a plufieurs manières de bleffer l'amour - propre des hommes.

La première édition d'Oedipe fut dédiée à Madame, femme du Régent. Voici cette dédicace: elle reffemble aux épîtres dédicatoires de ce temps-là. Ce ne fut qu'après son voyage en Angleterre, et lorfqu'il dédia Brutus au lord Bolingbrocke, que M. de Voltaire montra qu'on pouvait, dans une dédicace, parler à celui qui la reçoit d'autre chofe que de lui-même.

MADAME,

[ocr errors]

Si l'ufage de dédier fes ouvrages à ceux qui en jugent le mieux n'était pas établi, il commencerait par VOTRE ALTESSE ROYALE. La protection éclairée dont vous honorez les fuccès ou les efforts des auteurs met en droit, ceux mêmes qui réuffiffent le moins, d'ofer mettre fous votre nom des ouvrages qu'ils ne compofent que dans le deffein de vous plaire. Pour moi dont le zèle tient lieu de mérite auprès de vous, fouffrez que je prenne la liberté de vous offrir les faibles effais de ma plume.

Heureux fi, encouragé par vos bontés, je puis travailler long-temps pour V. A. R. dont la confervation n'eft pas moins précieuse à ceux qui cultivent les beaux-arts, qu'à toute la France dont elle eft les délices et l'exemple.

L

Je fuis, avec un profond respect,

MADAME,

De Votre Alteffe Royale,

le très-humble et très-obéissant Serviteur, AROUET DE VOLTAIRE.

On trouvera ici une préface imprimée en 1729, dans laquelle M. de Voltaire combat les opinions de M. de la Motte fur la tragédie. La Motte y a répondu avec beaucoup de politeffe, d'efprit et de raison. On peut voir cette réponse dans fes œuvres. M. de Voltaire n'a répliqué qu'en fefant Zaïre, Alzire, Mahomet, etc. Et jusqu'à ce que des pièces en profe, où les règles des unités feraient violées, aient fait autant d'effet au théâtre et autant de plaifir à la lecture, l'opinion de M. de Voltaire doit l'emporter.

LETTRES

A

M. DE GENONVILLE, (*)

contenant la critique de l'Oedipe de Sophocle, de celui de Corneille, et de celui de l'Auteur.

1719.

LETTRE PREMIERE.

Je vous envoie, Monfieur, ma tragédie d'Oedipe,

E

que vous avez vu naître. Vous favez que j'ai commencé cette pièce à dix-neuf ans : fi quelque chofe pouvait faire pardonner la médiocrité d'un ouvrage, ma jeunesse me fervirait d'excufe. Du moins, malgré les défauts dont cette tragédie est pleine, et que je fuis le premier à reconnaître, j'ofe me flatter que vous verrez quelque différence entre cet ouvrage, et ceux que l'ignorance et la malignité m'ont imputés.

(*) Mort confeiller au parlement de Paris: il fut, depuis ces lettres, l'intime ami de M. de Voltaire.

« PoprzedniaDalej »