Obrazy na stronie
PDF
ePub

ACTE III.

SCENÈ PREMIERE.

HERMOGIDE, EUPHORBE, Suite d'Hermogide.

HERMO GID E.

ENFIN donc, voici l'heure où dans ce temple même,

La reine avec fa main donne fon diadême.

Euphorbe, ou je me trompe, ou de bien des horreurs Ces dangereux momens font les avant-coureurs.

EUPHORBE.

Polémon de fa part flatte votre espérance.

HERMO GID E.

Polémon veut en vain tromper ma défiance.

EUPHORBE.

Eh! qui choifir que vous ? Cet Empire aujourd'hui
Demande un bras puiffant qui lui ferve d'appui.
Que dis-je ? Vous l'aimiez, Seigneur, ettant de flamme...

HERMO GINE,

Moi! que cette faibleffe ait amolli mon ame!
Hermogide amoureux! Ah! qui vent être roi,
Ou n'eft pas fait pour l'être, ou fait régner fur foi,
* A la reine engagé, je pris fur fa jeuneffe

* Cet heureux afcendant que les foins, la foupleffe,
* 'L'attention, le temps, favent fi bien donner
*Sur un cœur fans deffeins, facile à gouverner.

Le bandeau de l'amour, et l'art trompeur de plaire,
De mes vaftes deffeins ont voilé le mystère.

Mais de tout temps, crois-moi, la foif de la grandeur Fut le feul fentiment qui régna dans mon cœur.

EUPHORBE.

Tout vous portait au trône: et les voeux de l'armée,
Et la voix de ce peuple et de la renommée,
Et celle de la reine en qui vous espériez.

HERMO GID E.

Par quels funeftes noeuds mes deftins font liés! *Son époux et fon fils, privés de la lumière, * Du trône à mon courage entr'ouvraient la barrière, * Quand la main de nos dieux la ferma fous mes pas. Je fais que j'eus les vœux du peuple et des foldats; Mais la voix de ces dieux, ou plutôt de nos prêtres, M'a dépouillé quinze ans du rang de mes ancêtres. Il fallut fuccomber aux fuperftitions,

* Qui font, bien plus que nous, les rois des nations; (k) Et le zèle aveuglé d'un peuple fanatique

Fut plus fort que mon bras et que ma politique.

EUPHORBE.

En faveur de vos droits ce peuple enfin s'unit;
Du trône devant vous le chemin s'applanit ;
Argos, par votre main, fait à la fervitude,
Long-temps de votre joug prit l'heureufe habitude:
Nos chefs feront pour vous.

HERMO GIDE.

Je compte fur leur foi,

Tant que leur intérêt les peut joindre avec moi.

L'un d'eux, je l'avoûrai, me trouble et m'importune;

Son defin qui s'élève, étonne ma fortune.

Je le crains malgré moi.

EUPHORBE.

Quoi ce jeune Alcméon,

Ce foldat qui vous doit fa grandeur et fon nom?

HERMO GID E.

Oui, ce fils de Théandre, et qui fut mon ouvrage,
Qui fous moi de la guerre a fait l'apprentiffage,
Maître de trop de cœurs à mon char arrachés,
Au bonheur qui le fuit les a tous attachés.
Par fes heureux exploits ma grandeur eft ternie;
Son afcendant vainqueur impofe à mon génie :
Son feul afpect ici commence à m'alarmer.
Je le hais d'autant plus qu'il fait fe faire aimer
Que des peuples féduits l'eftime eft fon partage;
Sa gloire m'avilit et fa vertu m'outrage.

>

Je ne fais, mais le nom de ce fier citoyen, Tout obfcur qu'il était, femble égaler le mien. Et moi, près de ce trône où je dois feul prétendre, * J'ai laffé ma fortune à force de l'attendre.

Mon crédit, mon pouvoir adoré fi long-temps, N'eft qu'un coloffe énorme ébranlé par les ans, Qui penche vers fa chute, et dont le poids immense Veut, pour se foutenir, la fuprême puissance; (3) Mais du moins en tombant je faurai me venger. (1)

EUPHORBE.

Qu'allez-vous faire ici ?

HERMO GIDE.

Ne plus rien ménager.

Déchirer, s'il le faut, le voile heureux et fombre
Qui couvrit mes forfaits du fecret de fon ombre:
Les juftifier tous par un nouvel effort,
Par les plus grands fuccès, ou la plus belle mort:

Et dans le défefpoir où je vois qu'on m'entraîne,

Ma fureur.... Mais on entre, et j'apperçois la reine.

SCENE I I.

ERYPHILE, ALCMEON, HERMOGIDE, POLEMON, EUPHORBE, Choeur d'Argiens.

AL CME ON.

Our, ce peuple, Madame, et les chefs, et les rois,
Sont prêts à confirmer, à chérir votre choix;
Et je viens, en leur nom, préfenter leur hommage
A votre heureux époux, leur maître et votre ouvrage.
Ce jour va de la Grèce affurer le repos.

ERY PHILE.

Vous, Chefs qui m'écoutez, et vous, Peuple d'Argos,
Qui venez en ces lieux reconnaître l'empire
Du nouveau fouverain que ma main doit élire,
Je n'ai point à choifir: je n'ai plus qu'à quitter
Un fceptre que mes mains n'avaient pas dû porter.
Votre maître eft vivant, mon fils refpire encore.
Ce fils infortuné, qu'à fa première aurore
Par un trépas foudain vous crûtes enlevé,
Loin des yeux de fa mère en fecret élevé, (m)
Fut porté, fut nourri dans l'enceinte facrée
Dont le ciel à mon fexe a défendu l'entrée.
Celui que je chargeai de fes triftes deftins,
Ignorait quel dépôt fut mis entre fes mains.
Je voulus qu'avec lui renfermé dès l'enfance,
Mon fils de fes parens n'eût jamais connaiffance.
Mon amour maternel, timide et curieux,
A cent fois fur fa vie interrogé les cieux;

[ocr errors]
[ocr errors]

Aujourd'hui même encore, ils m'ont dit qu'il refpire.
Je vais mettre en fes mains mes jours et mon Empire.
Je fais trop que ce dieu, maître éternel des dieux,
Jupiter, dont l'oracle eft préfent en ces lieux,
Me. prédit, m'affura que ce fils fanguinaire
Porterait le poignard dans le fein de fa mère.
Puiffe aujourd'hui, grand Dieu, l'effort que je me fais,
Vaincre l'affreux deftin qui l'entraîne aux forfaits!
Oui, Peuple, je le veux: oui, le roi va paraître :
Je vais à le montrer obliger le grand- prêtre.
Les dieux qui m'ont parlé, veillent encor fur lui;
Ce fecret au grand jour va briller aujourd'hui.

De mon fils déformais il n'eft rien que je craigne ;

ལྕ

Qu'on me rende mon fils, qu'il m'immole, et qu'il règne.

HERMO GIDE.

Peuples, Chefs, il faut donc m'expliquer à mon tour:
L'affreuse vérité va donc paraître au jour.

Ce fils qu'on redemande afin de mieux m'exclure,
Cet 'enfant dangereux, l'horreur de la nature,
Né pour le parricide, et dont la cruauté
Devait verfer le fang du fein qui l'a porté :
Il n'eft plus. Son fupplice a prévenu fon crime.

Ciel !

ERY PHIL E.

HERMO GID E.

Aux portes du temple on frappa la victime.
Celui qui l'enlevait le fuivit au tombeau. (n)
Il fallait étouffer ce monftre en fon berceau;
A la reine, à l'Etat fon fang fut néceffaire;
Les dieux le demandaient: je fervis leur colère.
Peuple, n'en doutez point: Euphorbe, Nicétas,
Sont les fecrets témoins de ce jufte trépas.

« PoprzedniaDalej »