N'ont point encor fur vous quelques fecrets deffeins? Peut-être leur vengeance eft mise entre vos mains. Le fang de votre roi dont la terre eft fumante, Elève encor au ciel une voix gémissante; Sa voix eft entendue: et les dieux aujourd'hui Contre fes affaffins fe déclarent pour lui. Le Grand-Prêtre déjà voit la foudre allumée, Qui fe cache à nos yeux dans la nue enfermée. Enfin, que feriez-vous fi les arrêts du ciel Vous preffaient de punir un meurtre fi cruel? Si, chargé malgré vous de leur ordre fuprême, Vous vous trouviez entr'eux, et la Reine elle-même ? S'il vous falloit choifir...
ALCMEON, THEANDRE, POLEMON.
La reine en ce moment
Vous mande de l'attendre en cet appartement. Elle vient: il s'agit du falut de l'Empire.
THE ANDRE à part.
Prête à nommer un roi, qu'aurait - elle à lui dire ? D'Amphiaraüs, ô Dieux, daignez vous fouvenir !
Pour la dernière fois je vais l'entretenir.
ERYPHILE, ALCMEON, ZELONIDE.
C'EST à vous, Alcméon, c'eft à votre victoire
Qu'Argos doit fon bonheur, Eryphile fa gloire.
C'est par vous, que maitreffe, et du trône, et de moi,
Dans ces murs relevés je puis choisir un roi. Mais prête à le nommer, ma jufte prévoyance Veut s'affurer ici de votre obéiffance.
J'ai de nommer un roi le dangereux honneur: Faites plus, Alcméon, foyez fon défenseur.
D'un prix trop glorieux ma vie eft honorée: A vous fervir, Madame, elle fut confacrée.
* Je vous devais mon fang, et quand je l'ai verfé, * Puifqu'il coulait pour vous, je fus récompensé. Mais telle eft de mon fort la dure violence,
Qu'il faut que je vous trompe ou que je vous offense.. Reine, je vais parler: des rois humiliés.
Briguent votre fuffrage et tombent à vos pieds.
Tout vous rit; que pourrais-je, en ce féjour tranquille, Vous offrir qu'un vain zèle, et qu'un bras inutile ? Laiffez-moi fuir des lieux où le deftin jaloux Me ferait, malgré moi, trop coupable envers vous.
Vous me quittez! ô Dieux, dans quels temps!
Ont ceffé de gronder fur ces heureux rivages. Ma main les écarta: la Grèce en ce grand jour Va voir enfin l'Hymen et peut-être l'Amour, Par votre augufte voix nommer un nouveau maître. Reine, jufqu'aujourd'hui vous avez pu connaître Quelle fidélité m'attachait à vos lois;
Quel zèle inaltérable échauffait mes exploits. J'efpérais à jamais vivre fous votre empire: Mes vœux pourraient changer, et j'ofe ici vous dire Que cet heureux époux, fur ce trône monté, Eprouverait en moi moins de fidélité;
Et qu'un fujet foumis, dévoué, plein de zèle Peut-être à d'autres lois deviendrait un rebelle.
Vous me quittez ! eh quoi! pourriez-vous donc penfer Qu'Eryphile héfitât à vous récompenser ?
Que craignez-vous? parlez: il faut ne me rien taire.
Je ne dois point lever un regard téméraire
Sur les fecrets du trône, et fur ces nouveaux nœuds Préparés par vos mains pour un roi trop heureux. Mais de ce jour enfin la pompe folemnelle, De votre choix au peuple annonce la nouvelle. Ce fecret dans Argos eft déjà répandu: Princeffe, à cet hymen on s'était attendu. (g) Ce choix fans doute eft jufte, et la raifon le guide; Mais je ne ferai point le fujet d'Hermogide.. Voilà mes fentimens et mon bras aujourd'hui
Ayant vaincu pour vous, ne peut fervir fous lui.
Puniffez ma fierté, d'autant plus condamnable, Qu'ayant ofé paraître, elle eft inébranlable.
Alcméon, demeurez; j'attefte ici les Dieux, Ces Dieux qui fur le crime ouvrent toujours les yeux, Qu'Hermogide jamais ne fera votre maître; Sachez que c'est à vous à l'empêcher de l'être : Et contre fes rivaux, et furtout contre lui, Songez que votre reine implore votre appui.
Qu'entends-je! ah! difpofez de mon fang, de ma vie. Que je meure à vos pieds en vous ayant fervie! Que ma mort foit utile au bonheur de vos jours!
C'eft de vous feul ici que j'attends du fecours. Allez affurez-vous des foldats dont le zèle Se montre à me fervir auffi prompt que fidèle. Que de tous vos amis ces murs foient entourés ; Qu'à tout événement leurs bras foient préparés. Dans l'horreur où je fuis, fachez que je fuis prête A marcher s'il le faut, à mourir à leur tête. Allez.
UE faites-vous? Quel eft votre dessein?
Que veut cet ordre affreux ?
Dieux! comme en lui parlant, mon ame déchirée Par des nœuds inconnus fe fentait attirée !
De quels charmes fecrets mon cœur eft combattu! Quel état!.. Achevons ce que j'ai réfolu.
Je le veux: étouffons ces indignes alarmes.
Vous parlez d'Alcméon, et vous verfez des larmes ! Que je crains qu'en fecret une fatale erreur...
Ah, que jamais l'amour ne rentre dans mon cœur! Il m'en a trop coûté: que ce poison funeste De mes jours languiffans n'accable point le refte! Jours trop infortunés, vous ne fùtes remplis Qu'à pleurer mon époux, qu'à regretter mon fils! * Leur fouvenir fatal a toutes mes tendreffes. * Malheureuse! eft-ce à toi d'éprouver des faiblesses? Pénétré des remords qui viennent m'alarmer,' Ce cœur plein d'amertume est-il fait pour aimer ?
Pourquoi donc à fon nom redoublez-vous vos plaintes? Pardonnez à mon zèle, et permettez mes craintes. Songez que fi l'amour décidait aujourd'hui...
* Non, ce n'eft point l'amour qui m'entraîne vers lui; Non, un Dieu plus puiffant me contraint à me rendre. L'amour n'est pas fi pur, l'amour n'eft pas fi tendre. Non, plus je m'examine, et plus j'ofe approuver Les fentimens fecrets qui m'ont fu captiver.
* Ce n'eft point par les yeux que mon ame eft vaincue. Ne crois pas qu'à ce point de mon rang defcendue,
« PoprzedniaDalej » |