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Songez à votre gloire, à tous ces rois rivaux:
A l'hymen qui pour vous rallume fes flambeaux.

ERY PHIL E.

Moi, rallumer encor ces flammes détestées!
Moi, porter aux autels des mains enfanglantées!
Moi, choifir un époux! ce nom cher et facré
Par ma faibleffe horrible est trop déshonoré:
Qu'on détruise à jamais ces pompes folemnelles.
Quelles mains s'uniraient à mes mains criminelles !
Je ne puis....

ZELO NIDE.

Raffurez votre cœur éperdu:

Hermogide bientôt...

ERY PHILE.

Quel nom prononces - tu?

Hermogide, grands Dieux! lui de qui la furie

Empoifonna les jours de ma fatale vie.

Hermogide! ah! fans lui, fans fes coupables feux,
Mon cœur, mon trifte cœur eût été vertueux.

ZEL ON IDE.

Quel trouble vous faifit: quel remords vous tourmente?

ERY PHILE.

Pardonne, Amphiaraüs, pardonne, Ombre fanglante!
Ceffe de m'effrayer du fein de ce tombeau:

Je n'ai point dans tes flancs enfoncé le couteau:
Je n'ai point confenti... que dis-je ? miférable!

ZELON ID E.

Quoi, vous! de quels forfaits feriez-vous donc coupable?

ERY PHIL E..

Je n'ai pu jufqu'ici t'avouer tant d'horreurs.

Les malheureux fans peine exhalent leurs douleurs;

Théâtre. Tom. I.

Сс

Mais, hélas! qu'il en coûte à déclarer fa honte! (2)

ZELO NIDE.

Une douleur injufte, un vain effroi vous dompte;
La vertu la plus pure eut toujours tous vos foins:
Votre cœur n'aime qu'elle.

ERY PHILE.

Il le voudrait du moins.

Tu n'étais pas à moi, lorfqu'un triste hyménée
Au fage Amphiaraüs unit ma deftinée.

ZELON ID E.

Vous fortiez de l'enfance, et de vos heureux jours
Seize printemps à peine avaient marqué le cours.

ERY PHIL E.

C'est cet âge fatal et fans expérience,

Ouvert aux paffions, faible, plein d'imprudence,
C'eft cet âge indifcret qui fit tout mon malheur.
Un traître avait furpris le chemin de mon cœur:
Hélas! qui l'aurait cru que ce fier Hermogide,
Race des demi- dieux, iffu du fang d'Alcide,
Sous l'appât d'un amour fi tendre, fi flatteur,
Des plus noirs fentimens cachât la profondeur.
On lui promit ma main: mon cœur faible et fincère,
Dans fes rapides vœux foumis aux lois d'un père,
Trompé par fon devoir et trop tôt enflammé,

Brûla pour un barbare indigne d'être aimé;
Et lorfqu'à l'oublier on voulut me contraindre,
Mes feux trop allumés ne pouvaient plus s'éteindre. (d)
Amphiaraus parut et changea mon destin;

Il obtint de mon père et l'Empire et ma main.

Il régna: je l'armai de ce fer redoutable,
Du fer facré des rois, dont une main coupable

Ofa depuis... enfin je lui donnai ma foi;

Je lui devais mon cœur, il n'était plus à moi.
Ingrate à ce héros qui feul m'aurait dû plaire,
Je portais dans fes bras une amour étrangère.
Objet de mes remords, objet de má pitié,
Demi- dieu dont je fus la coupable moitié,
Quand tu quittas ces lieux, quand ce traître Hermogide
Te fit abandonner les champs de l'Argolide,
Pourquoi le vis-je encor? Trop faible que je fuis,
Mon front mal déguifé fit parler mes ennuis.
L'aveugle ambition dont il brûlait dans l'ame
De fon fatal amour empoifonna la flamme;
Il entrevit le trône ouvert à fes defirs;

Il expliqua mes pleurs, mes regrets, mes foupirs,
Comme un ordre fecret que ma timide bouche
Héfitait de prefcrire à fa rage farouche.

Je t'en ai dit affez; et mon époux eft mort.

ZEL ON IDE.

Le roi dans un combat vit terminer fon fort.

ERY PHILE.

Argos le croit ainfi; mais une main impie,
Ou plutôt ma faibleffe a terminé fa vie.
Hermogide en fecret l'immola fous fes coups.
Le cruel, tout couvert du fang de mon époux,
Vint armé de ce fer, inftrument de fa rage,
Qui des droits à l'Empire était l'augufte gage:
Et d'un affaffinat pour moi feule entrepris
Aux pieds de nos autels il demanda le prix.
Grands Dieux qui m'infpirez des remords légitimes,
Mon cœur, vous le favez, n'est point fait pour les crimes;

Il est né vertueux: je vis avec horreur
Le coupable ennemi qui fut mon féducteur;
Je déteftai l'amour et le trône et la vie.

ZELON IDE.

Eh! ne pouviez-vous point punir fa barbarie?
Etiez-vous fourde aux cris de ce fang innocent?

ERY PHILE.

Celui qui le verfa fut toujours trop puiffant;
Et fon habileté fecondant fon audace,

De ce crime aux mortels a dérobé la trace.
Je ne pus que pleurer, me taire et le haïr.
Le ciel en même temps s'arma pour me punir;
La main des dieux fur moi toujours appefantie,
Opprima mes fujets, perfécuta ma vie.

Les princes de Cyrrha, d'Elide et de Pylos,
Se difputaient mon cœur et l'Empire d'Argos.
De nos chefs divifés les brigues et les haines
De l'Etat qui chancelle embarraffoient les rènes, (e)
Le barbare Hermogide a difputé contr'eux

Et le prix de fon crime et l'objet de fes feux.
Et moi, fur mon hymen, fur le fort de la guerre,
Je confultai la voix du maître du tonnerre:
A fa divinité, dont ces lieux font remplis,
J'offris en frémiffant mon encens et mes cris.
Sans doute tu l'appris : cet oracle funeste,
Ce trifte avant - coureur du châtiment céleste,
Cet oracle me dit de ne choifir un roi,

Que quand deux rois vaincus fléchiraient fous ma loi;
Mais qu'alors, d'un époux vengeant le fang qui crie,
Mon fils, mon propre fils m'arracherait la vie.

ZELO NID E.

Jufte Ciel! Eh! que faire en cette extrémité ?

ERY PHIL E.

O mon fils! que de pleurs ton deftin m'a coûté! (ƒ)
Trop de crainte peut-être, et trop de prévoyance
M'ont fait injustement éloigner son enfance.

Je n'ofais ni trancher, ni fauver fes deftins;
J'abandonnai fon fort à d'étrangères mains;
Il mourut pour fa mère: et ma bouche infidelle
De fon trépas ici répandit la nouvelle.

Je l'arrachai pleurant de mes bras maternels.
Quelle perte, grands Dieux! Et quels deftins cruels !
J'ôte à mon fils le trône, à mon époux la vie;
Et ma feule faibleffe a fait ma barbarie.
Mais tant d'horreurs encor ne peuvent égaler
Ce déteftable hymen dont tu m'ofes parler.

SCENE I V.

ERYPHILE, ZELONIDE, POLEMON.

ERY PHILE.

HE bien! cher Polémon, que venez-vous me dire ?

POLE MON.

J'apporte à vos genoux les voeux de cet Empire;
Son fort dépend de vous; le don de votre foi
Fait la paix de la Grèce et le bonheur d'un roi.
Ce long retardement à vous-même funefte,
De nos divifions peut ranimer le reste.

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