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ACTE III.

SCENE

PREMIERE.

JE

ARONS, ALBIN, MESSALA.

ARON S une lettre à la maine

E commence à goûter une jufte espérance;

Vous m'avez bien fervi par tant de diligence;

Tout fuccède à mes vœux. Oui, cette lettre, Albin,
Contient le fort de Rome, et celui de Tarquin.
Avez-vous dans le camp réglé l'heure fatale?
A-t-on bien obfervé la porte Quirinale?
L'affaut fera-t-il prêt, fi par nos conjurés

Les remparts cette nuit ne nous font point livrés?
Tarquin eft-il content? Crois-tu qu'on l'introduife,
Ou dans Rome fanglante, ou dans Rome foumise?

ALBIN.

Tout fera prêt, Seigneur, au milieu de la nuit.
Tarquin de vos projets goûte déjà le fruit;
Il penfe de vos mains tenir fon diadême;
Il vous doit, a-t-il dit, plus qu'à Porfenna même.

ARON S.

Ou les dieux, ennemis d'un prince malheureux,
Confondront des deffeins fi grands, fi dignes d'eux;
Ou demain fous fes lois Rome fera rangée:
Rome en cendre, peut-être, et dans fon fang plongée.

Mais il vaut mieux qu'un roi, fur le trône remis,
Commande à des fujets malheureux et foumis;
Que d'avoir à dompter, au fein de l'abondance',
D'un peuple trop heureux l'indocile arrogance.
(à Albin.)

Allez, j'attends ici la princeffe en fecret.
(à Meffala.)

Meffala, demeurez.

SCENE I I.

AR ON S, MESSA L A.

ARON S.

HE bien! qu'avez-vous fait?

Avez-vous de Titus fléchi le fier courage ?
Dans le parti des rois penfez-vous qu'il s'engage?

MESSA LA.

Je vous l'avais prédit: l'inflexible Titus
Aime trop fa patrie, et tient trop de Brutus.
Il fe plaint du Sénat, il brûle pour Tullie;
L'orgueil, l'ambition, l'amour, la jaloufie,
Le feu de fon jeune âge et de fes paflions,
Semblaient ouvrir fon ame à mes féductions;
Cependant, qui l'eût cru? la liberté l'emporte :
Son amour eft au comble, et Rome eft la plus forte.
J'ai tenté, par degrés, d'effacer cette horreur
Que pour le nom de roi, Rome imprime en fon cœur.

En vain j'ai combattu ce préjugé févère;
Le feul nom des Tarquins irritait fa colère;
De fon entretien même il m'a foudain privé,
Et je hafardais trop fi j'avais achevé,

ARON S.

Ainfi de le fléchir Meffala défefpère.

MESSA LA.

J'ai trouvé moins d'obstacle à vous donner fon frère: Et j'ai du moins féduit un des fils de Brutus.

ARON S.

Quoi! vous auriez déjà gagné Tiberinus?

Par quels refforts fecrets, par quelle heureuse intrigue?

MESSA LA.

Son ambition feule a fait toute ma brigue.

Avec un œil jaloux il voit, depuis long-temps,
De fon frère et de lui les honneurs différens.
Ces drapeaux fufpendus à ces voûtes fatales,
Ces feftons de lauriers, ces pompes triomphales,
Tous les cœurs des Romains et celui de Brutus
Dans ces folemnités volant devant Titus,

Sont pour lui des affronts qui, dans fon ame aigrie,
Echauffent le poifon de fa fecrète envie.

Et cependant, Titus, fans haine et fans courroux,
Trop au-deffus de lui pour en être jaloux,
Lui tend encor la main de fon char de victoire,
Et femble en l'embraffant l'accabler de fa gloire.
J'ai faifi ces momens, j'ai fu peindre à fes yeux,
Dans une cour brillante un rang plus glorieux.
J'ai preffé, j'ai promis, au nom de Tarquin même,
Tous les honneurs de Rome après le rang fuprême;

Je l'ai vu s'éblouir, je l'ai vu s'ébranler;

Il est à vous, Seigneur, et cherche à vous parler.

ARON S.

Pourra-t-il nous livrer la porte Quirinale?

MESSA LA.

Titas feul y commande, et fa vertu fatale.
N'a que trop arrêté le cours de vos deftins;
C'est un dieu qui préfide au falut des Romains.
Gardez de hafarder cette attaque foudaine,
Sûre avec fon appui, fans lui trop incertaine.

ARON S.

Mais fi du confulat il a brigué l'honneur,
Pourrait-il dédaigner la fuprême grandeur,
Et Tullie, et le trône offerts à fon courage?

MESSA LA.

Le trône eft un affront à sa vertu fauvage.

ARON S.

Mais il aime Tullie.

MESSA LA.

Il l'adore, Seigneur.

Il l'aime d'autant plus qu'il combat fon ardeur.

Il brûle pour la fille en déteftant le père;

Il craint de lui parler, il gémit de fe taire;

Il la cherche, il la fuit, il dévore fes pleurs;
Et de l'amour encore il n'a que les fureurs.
Dans l'agitation d'un fi cruel orage,

Un moment quelquefois renverfe un grand courage.
Je fais quel eft Titus: ardent, impétueux,
S'il fe rend, il ira plus loin que je ne veux.

La fière ambition qu'il renferme dans l'ame,

Au flambeau de l'amour peut rallumer fa flamme.
Avec plaifir fans doute il verrait à ses pieds
Des fénateurs tremblans les fronts humiliés;
Mais je vous tromperais, fi j'ofais vous promettre
Qu'à cet amour fatal il veuille fe foumettre.

Je peux parler encore, et je vais aujourd'hui...

ARON S.

Puifqu'il eft amoureux, je compte encor fur lui.
Un regard de Tullie, un feul mot de fa bouche,
Peut plus pour amollir cette vertu farouche,
Que les fubtils détours et tout l'art féducteur
D'un chef de conjurés et d'un ambaffadeur.
N'efpérons des humains rien que par leur faibleffe.
L'ambition de l'un, de l'autre la tendreffe,

Voilà des conjurés qui ferviront mon roi;

C'eft d'eux que j'attends tout; ils font plus forts que moi.

(Tullie entre. Messala se retire.)

SCENE I I I.

TULLIE, ARONS, ALGINE.

ARON S.

MADAME, en ce moment je reçois cette lettre

Qu'en vos auguftes mains mon ordre eft de remettre,
Et que jufqu'en la mienne a fait paffer Tarquin.

TULLI E.

Dieux! protégez mon père, et changez fon deftin.

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