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Le pouvoir odieux dont il eft revêtu,
A fait fuir devant vous la timide vertu.
Il marche accompagné de délateurs perfides,
Qui, des triftes Hébreux inquifiteurs avides,
Par cent rapports honteux, par cent détours abjects,
Trafiquent avec lui du fang de vos fujets..
Ceffez; n'honorez plus leurs bouches criminelles
D'un prix que vous devez à des fujets fidelles.
De tous ces délateurs le fecours tant vanté
Fait la honte du trône, et non la fureté,
Pour Salome, Seigneur, vous devez la connaître :
Et fi vous aimez tant à gouverner en maître,
Confiez à des cœurs plus fidelles pour vous,
Ce pouvoir fouverain dont vous êtes jaloux.
Après cela, Seigneur, je n'ai rien à vous dire;
Reprenez déformais les rènes de l'Empire;

De Tyr à Samarie allez donner la loi:

Je vous parle en Romain, fongez à vivre en Roi.

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Vous avez entendu ce fuperbe langage,
Seigneur; fouffrirez-vous qu'un Préteur vous outrage,
Et que dans votre Cour il ofe impunément.

HERO DE à fa Suite.

...

Sortez, et qu'en ces lieux on nous laiffe un moment.

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Tu vois ce qu'il m'en coûte, et fans doute on peut croire

Que le joug des Romains offense affez ma gloire;

Mais je règne à ce prix. Leur orgueil faftueux

Se plaît à voir les rois s'abaiffer devant eux.

Leurs dédaigneufes mains jamais ne nous couronnent
Que pour mieux avilir les fceptres qu'ils nous donnent;
Pour avoir des fujets qu'ils nomment fouverains;

Et fur des fronts facrés fignaler leurs dédains.
Il m'a fallu dans Rome, avec ignominie,

Oublier cet éclat tant vanté dans l'Afie :

Tel qu'un vil courtifan, dans la foule jeté,
J'allais des Affranchis careffer la fierté;

J'attendais leurs momens, je briguais leurs fuffrages;
Tandis qu'accoutumés à de pareils hommages,
Au milieu de vingt rois à leur cour affidus,
A peine ils remarquaient un monarque de plus.
Je vis Céfar enfin je fus que fon courage
Méprifait tous ces rois qui briguaient l'esclavage.
Je changeai ma conduite: une noble fierté,
De mon rang avec lui foutint la dignité.

Je fus grand fans audace, et foumis fans baffeffe;
Céfar m'en eftima; j'en acquis sa tendreffe;
Et bientôt, dans fa cour appelé par fon choix,
Je marchai diftingué dans la foule des rois.
Ainfi, felon les temps, il faut qu'avec foupleffe
Mon courage docile ou s'élève ou s'abaiffe.
Je fais diffimuler, me venger et fouffrir:
Tantôt parler en maître, et tantôt obéir.
Ainfi j'ai fubjugué Solime et l'Idumée,
Ainfi j'ai fléchi Rome à ma perte animée;
Et toujours enchaînant la fortune à mon char,
J'étais ami d'Antoine, et le fuis de Céfar.
Heureux, après avoir avec tant d'artifice,
Des deftins ennemis corrigé l'injuftice;

Quand je reviens en maître, à l'Hébreu confterné
Montrer encor le front que Rome a couronné;
Heureux, fi de mon cœur la faibleffe immortelle
Ne mêlait à ma gloire une honte éternelle!
Si mon fatal penchant n'aveuglait pas mes yeux;
Si Mariamne enfin n'était point en ces lieux !

MAZA E L.

Quoi! Seigneur, fe peut-il que votre ame abusée De ce feu malheureux foit encore embrafée ?

HERODE.

Que me demandes-tu ! ma main, ma faible main
A figné fon arrêt, et l'a changé foudain.
Je cherche à la punir; je m'empreffe à l'abfoudre;
Je lance en même temps et je retiens la foudre :
Je mêle malgré moi fon nom dans mes difcours ;
Et tu peux demander fi je l'aime toujours!

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MAZA E L.

Seigneur, a-t-elle au moins cherché votre préfence?

HEROD E.

Non... j'ai cherché la fienne...

MAZA E L.

Eh quoi! fon arrogance!....

A-t-elle en fon palais dédaigné de vous voir ?

HERO D E.

Mazaël, je l'ai vue; et c'eft mon défefpoir.
Honteux, plein de regret de ma rigueur cruelle,
Interdit et tremblant j'ai paru devant elle.

Ses regards, il eft vrai, n'étaient point enflammés
Du courroux dont fouvent je les ai vus armés.

Ces cris défefpérés, ces mouvemens d'horreur
Dont il fallut long-temps effuyer la fureur,
Quand par un coup d'Etat, peut-être trop févère,
J'eus fait affaffiner et fon père et fon frère.
De fes propres périls fon cœur moins agité
M'a furpris aujourd'hui par fa tranquillité.
/ Ses beaux yeux,

dont l'éclat n'eut jamais tant de charmes, S'efforçaient devant moi de me cacher leurs larmes. J'admirais en fecret fa modefte douleur :

Qu'en cet état ô Ciel, elle a touché mon cœur !
Combien je déteftais ma fureur homicide!

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Je ne le cèle point: plein d'un zèle timide
Sans rougir, à ses pieds je me suis profterné :
J'adorais cet objet que j'avais condamné.
Hélas! mon défefpoir la fatiguait encore;
Elle fe détournait d'un époux qu'elle abhorre;
Ses regards inquiets n'ofaient tomber fur moi;
Et tout, jufqu'à mes pleurs, augmentait fon effroi.

MAZA EL.

Sans doute elle vous hait; fa haine envenimée

Jamais par vos bontés ne fera défarmée :
Vos refpects dangereux nourriffent sa fierté.

HERO D E.

T

Elle me hait! Ah Dieu ! je l'ai trop mérité;

Je

Je n'en murmure point: ma jalouse furie
A de malheurs fans nombre empoifonné fa vie.
J'ai dans le fein d'un père enfoncé le couteau,
Je fuis fon ennemi, fon tyran, fon bourreau.
Je lui pardonne, hélas! dans le fort qui l'accable,
De hair à ce point un époux fi coupable.

MAZA EL.

Etouffez les remords dont vous êtes preffé;
Le fang de fes parens fut juftement verfé.
Les rois font affranchis de ces règles auftères
Que le devoir inspire aux ames ordinaires.

HEROD E.

Mariamne me hait! Cependant autrefois,
Quand ce fatal hymen te rangea fous mes lois,
O Reine! s'il fe peut, que ton cœur s'en fouvienne,
Ta tendreffe en ce temps fut égale à la mienné.
Au milieu des périls, fon généreux amour
Aux murs de Maffada me conferva le jour.
Mazaël, fe peut-il que d'une ardeur fi fainte
La flamme fans retour foit pour jamais éteinte!
Le cœur de Mariamne eft-il fermé pour moi !

MAZA E L.

Seigneur, m'eft-il permis de parler à mon roi?

HEROD E.

Ne me déguife rien, parle ; que faut-il faire?
Comment puis-je adoucir fa trop jufte colère?
Par quel charme, à quel prix puis-je enfin l'appaifer?

MAZA E L.

Pour la fléchir, Seigneur, il la faut népriser:

Des fuperbes beautés tel eft le caractère.

Sa rigueur fe nourrit de l'orgueil de vous plaire;
Sa main qui vous enchaîne et que vous careffez
Appefantit le joug fous qui vous gémiffez.
Ofez humilier fon imprudente audace,

Forcez cette ame altière à vous demander grâce;
Par un jufte dédain fongez à l'accabler,

Et que devant fon maître elle apprenne à trembler.

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274 VARIANTES SUR MARIAMNE.

Quoi donc ignorez-vous tout ce que l'on publie?
Cet Hérode, dit-on, fi vanté dans l'Afie,

Si grand dans fes exploits, fi grand dans fes deffeins,
Qui fut dompter l'Arabe et fléchir les Romains,
Aux pieds de fon époufe, efclave fur fon trône,
Reçoit d'elle en tremblant les ordres qu'il nous donne!

HEROD E.

Malheureux, à mon cœur ceffe de retracer
Ce que de tout mon fang je voudrais effacer:
Ne me parle jamais de ces temps déplorables.
Mes rigueurs n'ont été que trop impitoyables,
Je n'ai que trop bien mis mes foins à l'opprimer ;
Le ciel pour m'en punir me condamne à l'aimer.
Ses chagrins, fa prifon, la perte de fon père,
Les maux que je lui fais, me la rendent plus chère.
Enfin, c'eft trop vous craindre et trop vous déchirer,
Mariamne, en un mot je veux tout réparer.

Va la trouver dis-lui que mon ame affervie

Met à fes pieds mon fceptre, et ma gloire, et ma vie.
Des maux qu'elle a foufferts elle accufe ma fœur ;
Je fais qu'elle a pour elle une invincible horreur;
C'en eft affez ma fœur aujourd'hui renvoyée,

A fes chers intérêts fera facrifiée.

Je laiffe à Mariamne un pouvoir abfolu. ...

MAZA E L.

Quoi! Seigneur, vous voulez. .

...

HERO D E.

Oui, je l'ai réfolu.

Va la trouver, te dis-je: et furtout à fa vue
Peins bien le repentir de mon ame éperdue;
Dis-lui que mes remords égalent ma fureur :

Va, cours, vole et reviens.... Jufte Ciel! c'eft ma fœur.

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