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Ya voir cette beauté fi long-temps adorée.
Non, elle périra: non, fa mort est jurée.
Vous ferez répandu, fang de mes ennemis,
Sang des Afmonéens dans fes veines tranfmis,
Sang qui me haïffez, et que mon cœur déteste. ·
Mais la voici, grand Dieu! quel fpectacle funefte!

SCENE IV.

MARIAMNE, HERODE, ELISE, Gardes.

REPRENEZ

ELIS E.

EPRENEZ VOS efprits, Madame, c'est le roi.

MARIA M NE.

Où fuis-je ? où vais-je ? ô Dieu! je me meurs, je le voi.

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HERO DE.

D'où vient qu'à fon afpect mes entrailles frémiffent?

MARIA M N E.

Elife, foutiens-moi, mes forces s'affaibliffent.

ELIS E.

Avançons.

MARIA M N E

Quel tourment?

HEROD E.

Que lui dirai-je, ô Cieux!

MARIAM NE.

Pourquoi m'ordonnez-vous de paraître à vos yeux ?
Voulez-vous, de vos mains, m'ôter ce faible refte
D'une vie à tous deux également funeste?

Vous le pouvez: frappez, le coup m'en fera doux, Et c'eft l'unique bien que je tiendrai de vous.

HEROD E.

Oui, je me vengerai, vous ferez fatisfaite.
Mais parlez, défendez votre indigne retraite.
Pourquoi, lorfque mon cœur fi long-temps offenfé,
Indulgent pour vous feule, oubliait le paffé,
Lorfque vous partagiez mon Empire et ma gloire,
Pourquoi prépariez-vous cette fuite fi noire?
Quel deffein, quelle haine a pu vous pofféder?

MARIA M NE.

Ah! Seigneur, eft-ce à vous à me le demander?
Je ne veux point vous faire un reproche inutile:
Mais fi, loin de ces lieux, j'ai cherché quelque afyle,
Si Mariamne enfin, pour la première fois,

Du pouvoir d'un époux méconnoiffant les droits,
A voulu fe fouftraire à fon obéiffance;

Songez à tous ces rois dont je tiens la naiffance,
A mes périls préfens, à mes malheurs paffés,
Et condamnez ma fuite après, fi vous l'ofez.

HERO D E.

Quoi! lorsqu'avec un traître un fol amour vous lie;
Quand Sohême....

MARIA M N E.

Arrêtez; il fuffit de ma vie.

D'un fi cruel affront ceffez de me couvrir ;
Laiffez-moi chez les morts defcendre fans rougir.
N'oubliez pas du moins, qu'attachés l'un à l'autre,
L'hymen qui nous unit joint mon honneur au vôtre.
Voilà mon cœur: Frappez. Mais en portant vos coups,
Refpectez Mariamne et même fon époux.

HEROD E.

Perfide! il vous fied bien de prononcer encore
Ce nom qui vous condamne et qui me déshonore!
Vos coupables dédains vous accufent affez,
Et je crois tout de vous, fi vous me haiffez.

MARIA M N E.

Quand vous me condamnez, quand ma mort eft certaine,
Que vous importe, hélas ! ma tendresse ou ma haine?
Et quel droit déformais avez-vous fur mon cœur,
Vous qui l'avez rempli d'amertume et d'horreur?
Vous, qui depuis cinq ans infultez à mes larmes,
Qui marquez fans pitié mes jours par mes alarmes?
Vous, de tous mes parens deftructeur odieux?
Vous, teint du fang d'un père expirant à mes yeux?
Cruel! ah! fi du moins votre fureur jalouse
N'eût jamais attenté qu'aux jours de votre époúfe,
Les cieux me font témoins que mon cœur tout à vous,
Vous chérirait encore, en mourant par vos coups.
Mais qu'au moins mon trépas calme votre furie;
N'étendez point mes maux au-delà de ma vie';
Prenez foin de mes fils, refpectez votre fang;
Ne les puniffez pas d'être nés dans mon flanc.
Hérode, ayez pour eux des entrailles de père;
Peut-être un jour, hélas! vous connaîtrez leur mère.
Vous plaindrez, mais trop tard, ce cœur infortuné
Que feul dans l'univers vous avez foupçonné:
Ce cœur qui n'a point fu, trop fuperbe peut-être,
Déguifer fes douleurs et ménager un maître ;
Mais qui jufqu'au tombeau conferva sa vertu,
Et qui vous eût aimé fi vous l'aviez voulu.

HEROD E.

Qu'ai-je entendu? quel charme, et quel pouvoir fuprême
Commande à ma colère et m'arrache à moi-même ?

Mariamne...

MARIAM NE.

Cruel!

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HEROD E.

.. O faibleffe! ô fureur!

MARIA M NE.

De l'état où je fuis voyez du moins l'horreur.
Otez-moi par pitié cette odieuse vie.

HERO DE..

Ah! la mienne à la vôtre eft pour jamais unie.
C'en eft fait, je me rends: banniffez votre effroi;
Puifque vous m'avez vu, vous triomphez de moi,
Vous n'avez plus befoin d'excufe et de défense.

Ma tendreffe pour vous vous tient lieu d'innocence.

En eft-ce affez, ô ciel! en est-ce assez, amour?
C'est moi qui vous implore et qui tremble à mon tour.
Serez-vous aujourd'hui la feule inexorable?
Quand j'ai tout pardonné, ferai-je encor coupable?
Mariamne, ceffons de nous perfécuter,

Nos cœurs ne font-ils faits que pour se détester?
Nous faudra-t-il toujours redoutér l'un et l'autre?
Finiffons à la fois ma douleur et la vôtre.
Commençons fur nous-même à régner en ce jour;
Rendez-moi votre main, rendez-moi votre amour.

MARIA M N E.

Vous demandez ma main! Jufte Ciel que j'implore,

Vous favez de quel fang la fienne fume encore.

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HEROD E.

Eh bien, j'ai fait périr et ton père et mon roi;
J'ai répandu fon fang pour régner avec toi.
Ta haine en eft le prix, ta haine eft légitime;
Je n'en murmure point, je connais tout mon crime.
Que dis-je ? fon trépas, l'affront fait à tes fils,
Sont les moindres forfaits que mon cœur ait commis.
Hérode a jufqu'à toi porté fa barbarie;

Durant quelques momens je t'ai même haïe;
J'ai fait plus, ma fureur a pu te soupçonner;
Et l'effort des vertus eft de me pardonner,
D'un trait fi généreux ton cœur feul eft capable:
Plus Hérode à tes yeux doit paraître coupable,
Plus ta grandeur éclate à refpecter en moi
Ces noeuds infortunés qui m'unissent à toi.
Tu vois où je m'emporte et quelle eft ma faibleffe;
Garde-toi d'abufer du trouble qui me preffe,

Cher et cruel objet d'amour et de fureur,

Si du moins la pitié peut entrer dans ton cœur,
Calme l'affreux défordre où mon ame s'égare,
Tu détournes les yeux. . . Mariamne. . .

MARIA M N E.

Ah barbare,!

Un jufte repentir produit-il vos transports?
Et pourrai-je en effet compter fur vos remords?

HER ODE.

Oui, tu peux tout fur moi, fi j'amollis ta haine.
Hélas! ma cruauté, ma fureur inhumaine,
C'est toi qui dans mon cœur as fu la rallumer;
Tu m'as rendu barbare en ceffant de m'aimer.

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