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MAZA E E.

Le fang et l'amitié les uniffent tous deux;
Mais je n'ai jamais vu....

SALOM E.

Vous n'avez pas mes yeux!

Sur mon malheur nouveau je fuis trop éclairée :
De ce trompeur hymen la pompe différée,
Les froideurs de Sohême et fes difcours glacés,
M'ont expliqué ma honte et m'ont inftruite affez.

MAZA E L.

Vous penfez en effet qu'une femme févère,
Qui pleure encore ici fon aïeul et fon frère,
Et dont l'efprit hautain, qu'aigriffent fes malheurs,
Se nourrit d'amertume et vit dans les douleurs,
Recherche imprudemment le funefte avantage
D'enlever un amant qui fous vos lois s'engage!
L'amour eft-il connu de fon superbe cœur?

SALOM E.

Elle l'inspire au moins, et c'eft-là mon malheur,

MAZA E L.

Ne vous trompez-vous point? Cette ame impérieuse, Par excès de fierté femble être vertueufe:

A vivre fans reproche elle a mis fon orgueil.

SALOM E.

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Cet orgueil fi vanté trouve enfin fon écueil.

Que m'importe, après tout, que fon ame hardie,
De mon parjure amant flatte la perfidie;

Ou qu'exerçant fur lui fon dédaigneux pouvoir,
Elle ait fait mes tourmens fans même le vouloir?
Qu'elle chériffe ou non le bien qu'elle m'enlève,
Je le perds, il fuffit; fa fierté s'en élève;

Ma honte fait fa gloire; elle a dans mes douleurs,
Le plaifir infultant de jouir de mes pleurs.
Enfin c'eft trop languir dans cette indigne gêne;
Je veux voir à quel point on mérite ma haine.

Sohême vient: allez, mon fort va s'éclaircir.

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APPROCHEZ; votre cœur n'est point né pour trahir,

Et le mien n'eft pas fait pour fouffrir qu'on l'abuse.
Le roi revient enfin: vous n'avez plus d'excufe.

Ne confultez ici que vos feuls intérêts,

Et ne me cachez plus vos fentimens fecrets.
Parlez je ne crains point l'aveu d'une inconftance,
Dont je mépriserais la vaine et faible offense.
Je ne fais point defcendre à des tranfports jaloux,
Ni rougir d'un affront dont la honte eft pour vous.

SOHEM E.

Il faut donc m'expliquer, il faut donc vous apprendre
Ce que votre fierté ne craindra point d'entendre.
J'ai beaucoup, je l'avoue, à me plaindre du roi;
Il a voulu, Madame, étendre jusqu'à moi
Le pouvoir que Céfar lui laisse en Palestine;
En m'accordant fa fœur il cherchait ma ruine :
Au rang de fes vaffaux il ofait me compter.
J'ai foutenu mes droits, il n'a pu l'emporter.
J'ai trouvé comme lui des amis près d'Augufte:
Je ne crains point. Hérode, et l'empereur eft jufte.

Mais

Mais je ne puis fouffrir (je le dis hautement)
L'alliance d'un roi dont je fuis mécontent.
D'ailleurs vous connaiffez cette cour orageufe;
Sa famille avec lui fut toujours malheureuse;
De tout ce qui l'approche il craint des trahifons:
Son cœur de toutes parts eft ouvert aux foupçons.
Au frère de la reine il en coûta la vie;

De plus d'un attentat cette mort fut fuivie.
Mariamne a vécu, dans ce triste séjour,
Entre la barbarie et les tranfports d'amour;
Tantôt fous le couteau, tantôt idolâtrée,
Toujours baignant de pleurs une couche abhorrée;
Craignant et fon époux, et de vils délateurs
De leur malheureux roi lâches adulateurs.

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Que fon fang eft le mien, que fon fort m'intéresse?

SALOM E.

Je ne l'ignore pas.

SOHEM E.

Apprenez encor plus :

J'ai craint long-temps pour elle, et je ne tremble plus.
Hérode chérira le fang qui la fit naître,

Il l'a promis, du moins, à l'empereur fon maître.
Pour moi, loin d'une cour, objet de mon courroux,
J'abandonne Solime, et votre frère et vous;
Je pars. Ne penfez pas qu'une nouvelle chaîne
Me dérobe à la vôtre et loin de vous m'entraîne
Théâtre. Tom. I.

Je renonce à la fois à ce prince, à fa cour,
A tout engagement, et fourtout à l'amour.
Epargnez le reproche à mon efprit fincère:

Quand je ne m'en fais point, nul n'a droit de m'en faire.

SALOM E.

Non, n'attendez de moi ni courroux ni dépit;
J'en favais beaucoup plus que vous n'en avez dit.
Cette cour, il eft vrai, Seigneur, a vu des crimes;
Il en eft quelquefois où des cœurs magnanimes
Par le malheur des temps fe laiffent emporter;
Que la vertu répare, et qu'il faut respecter.
Il en eft de plus bas, et de qui la faibleffe
Se pare arrogamment du nom de la fageffe.
Vous m'entendez peut-être? En vain vous déguisez
Pour qui je fuis trahie, et qui vous féduisez;
Votre fauffe vertu ne m'a jamais trompée.

De votre changement mon ame eft peu frappée;
Mais fi de ce palais, qui vous femble odieux,
Les orages paffés ont indigné vos yeux;

Craignez d'en exciter qui vous fuivraient, peut-être,
Jufqu'aux faibles Etats dont vous êtes le maître.

(elle fort.)

SCENE I I I.

SOHE ME, AM MO N.

U

SOHE M E.

Ou tendait ce difcours ? que veut-elle ? et pourquoi
Penfe-t-elle en mon cœur pénétrer mieux que moi?
Qui? moi, que je foupire! et que, pour Mariamne,
Mon auftère amitié ne foit qu'un feu profane!
Aux faibleffes d'amour, moi, j'irais me livrer,
Lorfque de tant d'attraits je cours me féparer.

AM MO N.

Salome eft outragée, il faut tout craindre d'elle.
La jaloufie éclaire, et l'amour fe décèle.

SOHEM E.

Non, d'un coupable amour je n'ai point les erreurs: La fecte dont je fuis forme en nous d'autres mœurs. Ces durs Efféniens, ftoïques de Judée,

Ont eu de la morale une plus noble idée.

Nos maîtres, les Romains, vainqueurs des nations,
Commandent à la terre, et nous aux paffions.

Je n'ai point, grâce au ciel, à rougir de moi - même
Le fang unit de près Mariamne et Sohême;

Je la voyais gémir fous un affreux pouvoir,
J'ai voulu la fervir, j'ai rempli mon devoir.

AM MO N.

Je connais votre cœur et jufte et magnanime,
Il fe plaît à venger la vertu qu'on opprime;

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