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Caffandre perfifte dans fa prévention, et laiffe la reine feule avec fa confidente.

ARTE MIRE.

Avec quel artifice, avec quelles noirceurs
Pallante a fu tramer ce long tiffu d'horreurs!
Non, je ne reviens point de ma furprise extrême.
Quoi! Ménas à mes yeux maffacré par lui-même,
Vingt conjurés mourans qui n'accufent que moi;
Ah! c'en eft trop, Céphife, et je pardonne au roi,
Hélas! le roi, féduit par ce lâche artifice,
Semble me condamner lui-même avec juftice,

CEP HIS E.

Implorez Philotas, à qui votre vertu

Dès long-temps....

ARTEMIR E.

Juftes Dieux! quel nom prononces - tu?

Hélas! voilà le comble à mon fort déplorable;
Philotas m'abandonne et fuit une coupable;

Il détefte fa flamme et mes faibles attraits;
Et pour moi tous les cœurs font fermés déformais.

CEPH IS E.

Pouvez-vous foupçonner qu'un cœur qui vous adore....

ARTE MIRE.

Si Philotas m'aimait, s'il m'eftimait encore
Il me verrait, Céphife, au péril de fes jours.
De ma trifte retraite il connaît les détours;
L'amour l'y conduirait, il viendrait m'y défendre
Il viendrait y braver le courroux de Caffandre.
Je ne demande point ces preuves de fa foi;
Qu'il me croie innocente, et c'eft affez pour moi.

CEPH IS E.

Ah! Madame, fouffrez que je coure lui dire....

ARTE MIRE.

Va, ma chère Céphife, et devant que j'expire,
Dis-lui, s'il en eft temps, qu'il ofe encor me voir;
Peins-lui mes fentimens, peins - lui mon défefpoir.
Si fon cœur obftiné rebute ta prière,

S'il refufe à mes pleurs cette grâce dernière,
Retourne fans tarder dans ces funeftes lieux,
Tu recevras mon ame et mes derniers adieux.
Conferve après ma mort une amitié fi tendre;
Dans tes fidelles mains daigne amaffer ma cendre;
Remets à Philotas ces reftes malheureux,

Seuls gages d'un amour trop fatal à tous deux.
Eclaircis à fes yeux ma douloureufe hiftoire;

Peut-être après ma mort il pourra mieu t'en croire.
Dis-lui, que fans regret defcendant chez les morts,
Si j'ai pu dans la tombe emporter des remords,
Combattant en fecret le feu qui me dévore,
Je ne me reprochais que de l'aimer encore.

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PHILOT

HILOTAS vient amené par Céphife. L'impofture de Pallante l'a féduit.

ARTE MIRE.

Philotas! Et c'est vous qui me traitez ainfi?

Mon époux me condamne, et vous, Seigneur, auffi?

Je pardonne à Caffandre une erreur excufable;
Nourri dans les forfaits, il m'en a cru capable;
Il m'avait offenfée, il devait me haïr;

Il me cherchait un crime afin de m'en punir.
Mais vous, qui, près de moi foupirant dans l'Epire,
Avez lu tant de fois dans le cœur d'Artémire;
Vous, de qui la vertu mérita tous mes foins;

Vous, qui m'aimiez, hélas! qui le difiez du moins;
C'est vous qui, redoublant ma honte et mon injure,
Du monftre qui m'accufe, écoutez l'imposture?
Barbare! vos foupçons manquaient à mon malheur,
Ah! lorfque de Pallante éprouvant la fureur,
Combattant malgré moi ma flamme et vos alarmes,
Mon cœur défefpéré résistait à vos larmes,

Et trop faible, en effet, contre un charme fi doux,
Cherchait dans le trépas des armes contre vous;
Hélas! qui m'aurait dit, que dans cette journée
Ma vertu par vous-même eût été foupçonnée ?
J'ai cru mieux vous connaître, et n'ai pas dû penfer
Qu'entre Pallante et moi vous puffiez balancer.
Pardonnez-moi, grands Dieux, qui m'avez condamnée!
De l'univers entier je meurs abandonnée;

Ma mort, dans le tombeau cachant la vérité,
Fera paffer ma honte à la postérité.

Toutefois, dans l'horreur d'un fi cruel fupplice,
Si du moins Philotas m'avait rendu juftice;
S'il pouvait m'eftimer et me plaindre en fecret;
Je fens que je mourrais avec moins de regret.

Philotas convaincu de l'innocence de la reine veut s'armer pour la défendre.

ARTE MIRE.

Non, demeurez, Seigneur.

J'aime mieux vos regrets qu'une audace inutile;
Innocente à vos yeux je périrai tranquille;

Et le fort qui m'attend pourra me fembler doux,
Puifqu'il me punira de n'être point à vous.
Adieu, le temps approche où l'on veut que j'expire;
Adieu; n'oubliez point l'innocente Artémire.
Que fon nom vous foit cher, elle l'a mérité;
A fon honneur flétri rendez la pureté;
Et que malgré l'horreur d'une tache fi noire,
Vos larmes quelquefois honorent fa mémoire.

Philotas fort. Artémire refte feule. On vient la chercher pour la conduire à la mort; mais les amis de Philotas l'arrachent des mains de fes gardes. Elle apprend que Philotas a foulevé le peuple, qu'il combat contre Caffandre,

ARTE MIRE,

Dieux, dont la main fur moi fans ceffe appefantie
Me promène à fon gré de la mort à la vie,
Dieux puiffans, fur moi feule étendez votre bras!
Rendez-moi mon fupplice et fauvez Philotas;
Eteignez dans mon fang une ardeur infidelle:
Plus fon péril eft grand, plus je fuis criminelle,
Viens, Caffandre, il eft temps: viens, frappe, venge-toi:
Je te pardonne tout, et n'immole que moi.

Philotas lui apprend que Pallante eft tué, et qu'il a fait en expirant l'aveu de la trame odieufe qu'il avait tissue pour fe venger des mépris de la reine,

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FRAGMENS D'ARTEMIRE.

dont il a déclaré l'innocence; que le roi a été détrompé, mais trop tard. Ce prince a reçu dans le combat une blessure mortelle.

Dans la fcène dernière Caffandre mourant fe fait apporter près d'Artémire. Il eft accompagné d'Hipparque et de fes officiers. Il rend hommage en leur préfence aux vertus de la reine. Il déclare qu'il lui avait ôté l'honneur fur les délations d'un monftre que le ciel à puni, et qui connaisfait trop bien le caractère foupçonneux et jaloux de fon maître et fon penchant à la cruauté.

Caffandre pardonne à Philotas dont il connaît les grandes qualités, et veut engager Artémire à fe donner à lui. Il les conjure de lui pardonner fes injuftices en faveur de fes remords, et de ne ́le regarder que comme une déplorable victime de la calomnie; il expie, dit-il, par la mort qu'il a méritée, tous les crimes dont il a fouillé fa vie.

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