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fection du Confesseur, et si aurez la commodité de vous confesser à vostre gré. Mais cecy ne se doit pas faire à la legere, et pour des causes de rien: il faut esviter les extremitez; car comme il n'est pas bon de supporter de notables defauts en la Confession, aussi ne faut-il pas estre si delicates, qu'on n'en puisse supporter quelques petits.

Troisiesmement, je voudrois fort que les Sœurs de ceans prissent un grand soin de particulariser leurs pechez en la Confession. Je veux dire que celles qui n'auront rien remarqué qui fust digne de l'absolution, dissent quelque peché particulier; car de dire qu'on s'accuse d'avoir eu plusieurs mouvemens de colere, de tristesse, et ainsi des autres, cela n'est pas à propos; car la colere et la tristesse sont des passions, et leurs mouvemens ne sont pas pechez, d'autant qu'il n'est pas en nostre pouvoir de les empescher. Il faut que la colere soit dereglée, ou qu'elle nous porte à des actions dereglées pour estre peché. Il faut donc particulariser quelque chose qui porte peché. Je voudrois bien, de plus, que l'on eust un grand soin d'estre bien veritables, simples et charitables en la Confession (veritable et simple est une mesme chose), dire bien clairement ses fautes, sans fard, sans artifice, faisant attention que c'est à Dieu que nous parlons, auquel rien ne peut estre celé; fort charitables, ne meslant aucunement le prochain en vostre Confession : par exemple, ayant à vous confesser dequoy vous avez murmuré en vous-mesme ou bien avec les Sœurs, de ce que la Superieure vous a parlé trop sechement, n'allez pas dire que vous avez murmuré de la correction trop brusque qu'elle vous a faite, mais simplement que vous avez murmuré contre la Superieure. Dites seulement le mal que vous avez fait, et non pas la cause et ce qui vous y a poussé ; et jamais, ny directement ny indirectement, ne descouvrez le mal des autres, en accusant le vostre, et ne donnez jamais sujet au Confesseur de soupçonner qui c'est qui a contribué à vostre peché. N'apportez aussi

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aucunes accusations inutiles en la Confession. Vous avez eu des pensées d'imperfection sur le prochain, des pensées de vanité, voire mesme de plus mauvaises ; vous avez eu des distractions en vos oraisons; si vous vous y estes arrestées deliberément, dites-le à la bonne foy, et ne soyez pas contentes de dire que vous n'avez pas apporté assez de soin à vous tenir recolligées durant le temps de l'oraison, mais si vous avez esté negligentes à rejetter une distraction, dites-le, car ces accusations generales ne servent de rien à la Confession.

Je voudrois bien encore, mes cheres filles, qu'en ceste maison l'on portast grand honneur à ceux qui vous annoncent la parole de Dieu : certes on a beaucoup d'obligation de le faire, car il semble que ce soient des messagers celestes qui viennent de la part de Dieu pour nous enseigner le chemin du salut; il les faut regarder comme tels, et non pas comme de simples hommes; car quoy qu'ils ne parlent pas si bien que les hommes celestes, il ne faut pourtant rien rabattre de l'humilité et reverence avec laquelle nous devons recevoir la parole de Dieu, qui est tousjours la mesme, aussi pure, aussi saincte que si elle estoit dite et proferée par les Anges. Je remarque que quand j'escris à une personne sur de mauvais papier, et par consequent avec un mauvais caractere, elle me remercie avec autant d'affection que quand je lui escris sur de meilleur papier et avec de plus beaux caracteres. Pourquoy cela, sinon parce qu'elle ne fait pas attention, ny sur le papier (qui n'est pas si bon), ny sur le caractere (qui est mauvais), ains seulement sur moy qui lui escris. De mesme faut-il faire de la parole de Dieu; ne point regarder qui est-ce qui la nous apporte, ou qui est-ce qui la nous declare il nous doit suffire que Dieu se sert de ce Predicateur pour la nous enseigner. Et puis que nous voyons que Dieu l'honnore tant que de parler par sa bouche, comment est-ce que nous autres pourrions manquer d'honnorer et de respecter sa personne?

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ENTRETIEN XVI.

Touchant les aversions; comme il faut recevoir les livres, et de ce qu'il ne se faut point estonner de voir des imperfections aux personnes Religieuses, ny mesme aux Superieurs.

La premiere demande est : Qu'est-ce qu'aversion? Les aversions sont certaines inclinations qui sont aucunefois naturelles, lesquelles font que nous avons un certain petit contre-cœur à l'abord de ceux envers qui nous les avons, qui empesche que nous n'aymions leur conversation, s'entend que nous n'y prenons pas de plaisir, comme nous ferions en celle de ceux envers lesquels nous avons une inclination douce qui nous les fait aymer d'un amour sensible, parce qu'il y a une certaine alliance et correspondance entre nostre esprit et le leur. Or pour monstrer que cecy est naturel, d'aymer les uns par inclination et non pas les autres, ne void-on pas que si deux hommes entrent dans un tripot où deux autres joüent à la paume, d'abord ceux qui entrent auront de l'inclination que l'un gaigne plustost que l'autre? et d'où vient cela, puis qu'ils ne les ont jamais veus ny l'un ny l'autre, ny n'en avoient jamais ouy parler, ne sçachant point si l'un est plus vertueux que l'autre? c'est pourquoy ils n'ont point de raison d'en affectionner plus l'un que l'autre. Il faut donc confesser que ceste inclination d'aymer les uns plus que les autres est naturelle, et l'on le void mesmes aux bestes, lesquelles n'ayant point de raison, ont toutesfois de l'aversion et de l'inclination naturellement. Faites-en l'experience en un petit agnelet qui ne fait naistre ; monstrez-luy la peau d'un loup (quoy qu'il soit mort), il se mettra à fuyr, il beslera, il se cachera sous les flancs de sa mere; mais monstrez-luy un cheval (qui est bien une plus grosse beste), il ne s'en espouvantera nullement, ains il se jouera avec lui: la raison de cela n'est autre, sinon

que

de

que le naturel luy donne de l'alliance avec l'un et de l'aversion pour l'autre. Or de ces aversions naturelles il n'en faut pas faire grand cas, non plus que des inclinations, pourveu que nous sousmettions le tout à la raison. Ay-je de l'aversion de converser avec une personne, laquelle je sçay bien estre de grande vertu, et avec laquelle je puis beaucoup profiter; il ne faut pas que je suive mon aversion qui me fait eviter de la rencontrer; il faut que j'assujettisse ceste inclination à la raison qui me doit faire rechercher sa conversation, ou au moins y demeurer avec un esprit de paix et de tranquillité quand je m'y rencontre. Mais il y a des personnes qui ont si grand peur d'avoir de l'aversion pour ceux qu'ils ayment par inclination, qu'ils en fuyent la conversation dans la crainte qu'ils ont de rencontrer quelque defaut qui leur oste la suavité de leur affection et de leur amitié.

Quel remede à ces aversions, puis que nul n'en peut estre exempt, pour parfait qu'il soit? Ceux qui sont d'un naturel aspre auront de l'aversion pour celuy qui sera fort doux, et estimeront ceste douceur une trop grande mollesse, bien que ceste qualité de douceur soit la plus universellement aymée. L'unique remede à ce mal (comme à toute autre sorte de tentation) c'est une simple diversion, je veux dire, n'y point penser mais le malheur est que nous voulons trop bien cognoistre si nous avons raison, ou non, d'avoir aversion pour quelque personne. O! jamais il ne faut s'amuser à ceste recherche; car nostre amour propre qui ne dort jamais nous dorera si bien la pillule, qu'il nous fera accroire qu'elle est bonne, je veux dire qu'il nous fera voir qu'il est vray que nous avons certaines raisons, lesquelles nous sembleront bonnes, et puis celles-là estant approuvées de nostre propre jugement et de l'amour propre, il n'y aura plus de moyen de nous empescher de les trouver justes et raisonnables. O certes, il faut bien prendre garde à cecy. Je m'estens un peu à en parler, parce qu'il est d'importance. Nous n'avons jamais

raison d'avoir de l'aversion, beaucoup moins de la vouloir nourrir je dis donc : quand ce sont de simples aversions naturelles, il n'en faut faire aucun estat, ains s'en divertir sans faire semblant de rien, et tromper ainsi nostre esprit; mais il les faut combattre et abattre, quand on void que le naturel passe plus outre, et nous veut faire departir de la sousmission que nous devons à la raison qui ne nous permet jamais de rien faire en faveur de nos aversions, non plus que de nos inclinations (quand elles sont mauvaises), de crainte d'offenser Dieu. Or quand nous ne faisons autre chose en faveur de nos aversions, que de parler un peu moins agreablement que nous ne ferions à une personne pour laquelle nous aurions de grands sentimens d'affection, ce n'est pas grande chose; ains il n'est presque pas en nostré pouvoir de faire autrement. Quand nous sommes en l'émotion de ceste passion, l'on auroit tort de requerir cela de

nous.

La seconde demande est comment on se doit comporter en la reception des livres que l'on nous donne à lire? La Superieure donnera à une des Sœurs un livre qui traite fort bien des vertus; mais parce qu'elle ne l'ayme pas, elle ne fera point de profit de sa lecture; ains elle le lira avec une negligence d'esprit, et la raison est qu'elle sçait desja sur le doigt ce qui est comprins dans ce livre, et qu'elle auroit plus de desir que l'on luy en fist lire un autre. Or je dis que c'est une imperfection de vouloir choisir ou desirer un autre livre que celuy que l'on nous donne, et c'est une marque que nous lisons plustost pour satisfaire à la curiosité de l'esprit, que non pas pour profiter de nostre lecture. Si nous lisions pour profiter et non pas pour nous contenter, nous serions esgalement satisfaits d'un livre comme d'un autre; au moins accepterions-nous de bon cœur tous ceux que nostre Superieure nous donneroit pour lire. Je dis bien plus; car je vous asseure que nous prendrions plaisir à ne lire jamais

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