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la consideration que l'ame fait de Dieu en elle-mesme. En la quatrieme, l'empeschement et la fatigue du corps et partie sensitive; le remede sont les colloques et devis spirituels; le degré est mediter Dieu, non en lui-mesme, mais en son humanité.

En la cinquieme, l'empeschement est des respects humains; le remede est la solitude; le degré, la consideration de Dieu en luy-mesme, mais comme Dieu.

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LE CANTIQUE DES CANTIQUES,

EGLOGUE DE SALOMON,

MYSTIQUEMENT DECLARÉ.

ARGUMENT.

Le present livre traitte de la maniere d'arriver à une parfaitte forme d'orayson mentale: il designe quels en sont les empeschemens, quels sont les remedes à ces empeschemens, et par combien de degrés on peut arriver à cette orayson parfaite. La scene est Hierusalem, ou l'Eglise militante.

DISCOURS PREMIER.

Premier empeschement : la souvenance des playsirs sensibles.

Qui delibere de ne plus offenser Dieu, rencontre plusieurs occasions suggerées par le diable pour pecher. Qui se resoult de ne plus vouloir de consolation qu'en Dieu, rencontre le monde qui luy presente de nouveaux playsirs temporels; ce luy est un grand empeschement pour apprehender les consolations divines, de ne se pouvoir separer ni défaire des anciennes compagnies, conversations et recreations.

Doncques l'Espouse, c'est à dire l'ame desja en grace, voulant entrer à la vie spirituelle par les baisers de son divin Espoux, qui sont les consolations spirituelles, a une grande peine à se déprendre du chœur des dames (conversations anciennes), qui luy offrent des vins et parfums, qui sont les playsirs temporels : donc l'ame languissante pour l'absence de son Espoux, desirant s'unir à luy par l'orayson, le chœur des dames la veut conforter avec vins et parfums, luy

remettant en memoire les playsirs passés, nonobstant lesquels elle demande : Qu'il me baise d'un baiser de sa bouche;

Osculetur me osculo oris sui.

Remede au premier empeschement : desir et demande des biens spirituels.

Premierement, elle considere que les biens et playsirs mondains, aupres des divins, ne sont que vanité; secondement, que Dieu est doux et souhaittable en luy-mesme; troisiemement, que plusieurs ames saintes ont frayé le chemin, n'ayant trouvé aucun playsir qu'en Dieu; quatriemement, elle demande à Dieu qu'il luy oste toutes affections ter

restres.

Et quant au premier elle dit: Tes amours sont meilleurs que le vin, et plus odorants que les parfums;

Quia meliora sunt ubera tua vino, fragrantia unguentis optimis.

Quant au second: Ton nom est le parfum mesme repandu;

Oleum effusum nomen tuum.

Pour le troisieme : Les jeunes filles t'ont aimé;

Ideo adolescentulæ dilexerunt te.

Et pour le quatrieme : Tire-moy apres toy; nous te suivrons et courrons à l'odeur de tes parfums;

Trahe me post te; curremus in odorem unguentorum tuorum. Et tout incontinent, portée par une grande confiance d'obtenir ce qu'elle demande, comme si desja c'estoit fait, elle adjouste: Mon roy m'a menée en ses cabinets; nous sauterons de joie, et nous nous resjouirons en luy et avec luy de la souvenance de tes amours, qui sont meilleurs que le vin: les bons t'ayment et te prisent;

Introduxit me rex in cellaria tua: exultabimus et lætabimur in te, memores uberum tuorum super vinum: recti diligunt te.

Les scrupules neanmoins surviennent par la memoire des pechés passés, dont elle dit: Je suis noire. Mais l'integrité

de sa conscience presente fait qu'elle adjouste: Mais je suis belle, ô filles de Jerusalem, comme les tabernacles de Cedar et comme les peaux de Salomon;

Nigra sum, sed formosa, filiæ Jerusalem, sicut tabernacula Cedar, sicut pelles Salomonis.

Le foyer de la concupiscence y apporte du dechet, mais sans qu'il luy puisse estre reproché ni imputé à peché :

Noli me considerare quod fusca sim, quia decoloravit me sol!

Ne prenez donc pas garde à ce que je suis brune, car mon soleil m'a voulu ainsi laisser en cette guerre; le soleil m'a donné le teint que j'ai; et ce ne m'est pas advenu par ma faute, mais par celle des premiers enfants de la nature humaine ma mere. Les fils de ma mere ont combattu contre moi;

Filii matris mee pugnaverunt contra me.

Ce fut par leur peché que je fus mise en necessité de prendre tant de soins et garde à moy-mesme, comme si j'estois à garder une vigne. Ils m'ont mise à garder les vignes;

Posuerunt me custodem in vineis,

contre les assauts de la concupiscence; et tout cela, helas! non par ma faute propre et actuelle, mais par celle d'autruy, dont je puis dire: La vigne que j'ay gardée n'estoit pas à

moy;

Vineam meam non custodivi

Et partant, que la confiance revienne en moy, et que je commence à chercher mon espoux, où il est plus aysement trouvé par l'orayson.

Indica mihi, quem diligit anima mea, ubi pascas, ubi cubes in meridie, ne vagari incipiam post greges sodalium tuorum.

O vous que mon ame ayme, enseignés-moy où vous paissés et où vous couchés à l'ombre du midy; afin que je ne coure çà et là égarément aux troupeaux de vos compagnons; c'est à dire apres les creatures. Enseignés-moy où je pourray

vous trouver en l'orayson avec vos lumieres et consolations, sans m'arrester à la creature.

Premier degré d'orayson. Consideration de Dieu es choses

corporelles.

Vois-tu bien ce soleil, ô mon espouse, ces estoiles, ces cieux, cette terre, ces rochers? Ce sont autant de voyes et chemins pour me trouver : elles ne se sont pas faites ellesmesmes; elles ne sont pas sans quelque principe qui les a faites, et qui est leur fin derniere, qui les conserve, qui les garde. Mais qui est ce principe et cette fin? C'est Dieu : les meres de toutes choses sont les idées qui en sont en moy, en ma puissance et bonté. Mais les agneaux, aussitost que l'huis de la bergerie est ouvert, courent droit à leurs meres: ainsi l'homme voyant les creatures monte petit à petit à Dieu, c'est un moyen de me trouver.

Si ignoras te; ô pulcherrima inter mulieres, egredere et abi post vestigia gregum;

Si tu n'as pas encore une entiere connoissance, ô la plus belle des femmes, parce que tu es encore commençante, sors de la souvenance des playsirs passés, et va suivant les pas de tes troupeaux; cherche mes sentiers en toutes les creatures, laisse-toy guider et mener là par où elles-mesmes retournent, et tu trouveras qu'elles iront reposer aux pasturages de leur premier berger. Fais paistre tes chevreaux prés les loges des pasteurs;

Et pasce hædos tuos juxta tabernacula pastorum :

Tu seras conduite à trois paissans et un pasteur, à trois creans et un createur. Toutes les creatures sensibles te meneront là, et les plus nobles encore mieux.

Sur tout la nature humaine, en tes premieres meditations, t'y sera profitable. Tu verras les biens surnaturels qui sont en elle, comme, qu'elle est l'habitation de Dieu, son throsne, et quasi son chariot, dont il luy peut dire : O ma bien-aimée,

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