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La personne de Jésus tient donc si étroitement au christianisme qu'elle ne saurait en être séparée; il est l'incarnation de l'idée même de la religion, il est l'autorité absolue en fait de religion parce que en lui la Parole s'est faite chair. Jésus est en

< On l'a dit avec beaucoup de raison, la grande évolution que les laïques modernes sont en train d'accomplir par rapport à la connaissance religieuse, consiste en ceci : il faut chercher la pierre angulaire et le centre du christianisme, non pas dans un livre, mais dans une personne.... >

Citons encore quelques paroles caractéristiques de ce théologien éminemment croyant sur le besoin pressant de donner aux laïques une notion plus exacte de la Bible: « C'est, dit-il, une des missions les plus importantes et les plus pressantes de la théologie moderne de faire connaître à l'église, avec réflexion et prudence, mais en toute droiture, et avec une ingénuité pleine de confiance, comment les théologiens ont été amenés consciencieusement à considérer la Bible dans son ensemble et dans ses détails, en mettant à profit toutes les ressources que la science a placées à leur disposition. Il est impossible, avant tout, il est contraire à l'Evangile que les choses continuent longtemps d'aller comme elles vont. D'un côté, nous avons la théologie qui étudie la Bible au point de vue critique et qui, par suite de ce travail, se fortifie toujours plus dans une opinion qui, tout en préservant la dignité du livre, diffère du tout au tout de l'idée traditionnelle: d'un autre côté, l'église qui persiste dans l'ancienne manière de voir, dans une parfaite innocence que la théologie ne vient en rien troubler. Cela ne saurait durer, de part et d'autre il faut revenir à la vérité et à l'honnêteté; c'est à la théologie qu'il appartient de faire le premier pas. Il est de son devoir de faire proclamer, au sein de l'église, le droit et le devoir de traiter la Bible comme elle le fait elle-même et de familiariser les croyants avec les résultats critiques qui doivent être considérés comme assurés. Le problème est difficile, mais il ne saurait être insoluble, aussi sûr que le vrai Christ réel, celui de l'histoire et non celui de la dogmatique, est la vérité absolue. Ce qui rend le problème particulièrement épineux, c'est qu'il a été négligé depuis longtemps par notre théologie et qu'aucune base n'a été posée pour sa solution. Les théologiens qui jouissent de la pleine confiance de l'église doivent les premiers mettre la main à l'œuvre; qu'ils le fassent donc avec joie, car l'entreprise est assez importante pour qu'ils ne craignent pas de compromettre pendant quelque temps la confiance qu'ils inspirent. Il y a déjà des années que l'un de nos théologiens les plus respectables, Tholuck, leur a donné un exemple qu'ils devraient se hâter de suivre en foule. C'est notre plus strict devoir de rectifier les idées de nons-théologiens qui s'imaginent naïvement qu'il faut être incrédule pour ne pas considérer la Bible du même œil que l'ont fait jadis nos pères. Il importe de leur

même temps le chemin, la vérité et la vie. Quand donc on nous demande de placer l'autorité dans la vérité, nous y consentons sans peine, pourvu qu'il soit bien convenu qu'il faut entendre par là non ce que Jésus a enseigné, mais sa personne même qui

faire comprendre que la critique historique, bien loin d'être une invention de l'incrédulité ou du rationalisme, hostile à la révélation divine, est une exigence à laquelle l'église évangélique ne pourra, sous aucun prétexte, se soustraire en bonne conscience aussi longtemps qu'elle demeurera fidèle à son principe. Bien qu'elle ne mette pas le moins du monde en danger la foi en Jésus-Christ, elle arrive certainement à des résultats divers qui doivent effrayer ceux qui ne connaissent pas d'autre manière de considérer la Bible que celle qu'ils ont apprise de l'ancienne dogmatique. Laisser ignorer aux laïques cet état de la question et les difficultés réelles auxquelles vient se heurter une critique sans préjugés surtout quand il s'agit de l'Ancien Testament, et même aussi souvent du Nouveau, serait avant tout un manque de droiture et de charité impardonnable, et de plus une imprudence manifeste. Voici, en effet, ce qui ne manquerait pas d'arriver. Le nombre de ceux qui ont des doutes à l'endroit de la Bible étant incalculable, une complète défiance finirait par s'établir au sujet de sa crédibilité. On se déciderait à la laisser de côté, comme un livre n'offrant nulle part un fondement solide. »

Cet appel direct à la conscience et à la droiture des théologiens, qui, paraît-il, ne serait pas déplacé en Allemagne, est parmi nous d'une opportunité saisissante. Mais le bon Rothe est bien naïf quand il exhorte « les théologiens qui jouissent de la pleine confiance de l'église à être des premiers à mettre la main à l'œuvre pour faire disparaître le malentendu entre le peuple chrétien et la théologie moderne. » Bien loin de risquer de compromettre leur influence en abordant ces questions délicates, ils ont recours aux interprétations les plus ingénieuses pour favoriser les préjugés populaires et empêcher le jour de se faire. Fort peu désireux de porter l'opprobre de la vérité, on la tait, ou la voile, laissant les téméraires aux prises avec les superstitions régnantes, sans entendre la voix de la conscience qui devrait inspirer un élan généreux pour voler au secours de ces imprudents. Le tort unique de ces derniers n'est-il pas, en effet, de proclamer hautement ce que l'on se dit soi-même tout bas? Au point où nous en sommes, si ceux qui jouissent de la confiance du peuple chrétien ne craignaient pas de compromettre leur influence en lui disant la vérité, il aurait bientôt perdu ses dernières illusions. Attendra-t-on qu'une théologie impossible ait entièrement perdu la cause de la religion? La position de la chrétienté évangélique est certes assez critique pour que tous ceux qui comprennent quelque chose à la question ne retiennent pas plus longtemps une parole de paix.

est la vérité. L'Ecriture à son tour ne contient la vérité que parce qu'elle nous a conservé vivante la personne de Jésus et dans la mesure où elle nous l'a conservée.

III

On le voit, nous acceptons les conditions sans lesquelles, d'après M. Vernes, il ne peut y avoir de développement théologique normal. Il faudrait que de son côté il se gardât de toute réaction en faveur d'une autorité extérieure qui, bien loin de favoriser les progrès d'une théologie nouvelle, ne manquerait pas de les arrêter. Nous applaudissons des deux mains quand notre auteur s'écrie: « Rebâtissons une église à laquelle on puisse croire et se soumettre, qui soit assez supérieure par la pensée et la foi aux simples individus pour que ces sentiments, si décriés aujourd'hui, de foi en l'église et de soumission à l'église n'aient plus rien que de naturel pour le jeune homme, qui, entrant dans ce grandiose édifice de l'église de Jésus-Christ, toujours une dans sa diversité, s'inclinera plein de respect et recevra avec recueillement les enseignements d'un plus savant que lui. Aujourd'hui nous avons changé tout cela, à droite comme à gauche. Le Réveil a jeté par dessus bord la théologie de l'église, et nous voilà livrés aux imaginations particulières; la théologie nouvelle a jeté par dessus bord la théologie apostolique, et nous allons à la libre pensée. » Notre auteur a raison, voilà trop longtemps que l'ignorance, au service de la fantaisie individuelle, fait des siennes dans les deux camps. Nous avons assez gémi sous le despotisme des hommes sans mandat pour qu'il soit permis de désirer le retour d'une autorité ecclésiastique à laquelle on puisse se soumettre avec confiance. N'oublions pas toutefois que si l'église comme ensemble a perdu la place qui lui revenait de droit, cela tient à ce que les représentants des innovations les plus innocentes et les plus légitimes l'ont constamment trouvée sur leur chemin. Le Réveil en particulier est moins coupable d'avoir jeté par dessus bord la théologie de l'église que d'avoir, à première vue et sans y regarder de trop près, choisi dans la dogmatique traditionnelle ce qui paraissait

lui convenir. S'il avait possédé le courage et la liberté d'esprit joints à la vitalité nécessaire pour se faire une théologie nouvelle; si au lieu de tourner de bonne heure au piétisme, il se fût montré un mouvement franchement novateur et mystique, nous ne serions pas où nous en sommes. La tentative doit être reprise aujourd'hui en sous-œuvre dans des circonstances peu favorables. On ne croira de nouveau à l'église, on ne se soumettra à son autorité que lorsque, se bornant à demander des fidèles l'adhésion personnelle et vivante à ces vérités morales et religieuses élémentaires qui se saisissent par le cœur et la conscience, elle laissera chacun libre de se former une théologie, en tenant grand compte des leçons et des expériences du passé. Nous n'avons jusqu'à présent que trop méprisé la tradition; n'allons pas nous mettre à l'adorer; nous ne faciliterions pas la marche du char du progrès en transportant le sabot simplement d'une roue à l'autre.

M. Maurice Vernes ne dépasse-t-il pas la juste limite lorsqu'il s'écrie avec une confiance qui, il est vrai, ne se maintient pas jusqu'au bout du paragraphe: « Plût à Dieu que nous eussions compris plus tôt la force, la vérité admirable qui résident dans ce grand organisme catholique dont nous nous sommes séparés malgré nous il y a trois siècles. Malgré nous, voyez Luther et ses efforts incessants pour ne pas déchirer l'église. Quoi de plus beau que cette immense église, abordant par l'organe de ses grandes assemblées les litiges du jour et les tranchant selon les besoins nouveaux, si elle ne s'était montrée infidèle à sa cause et si cette organisation faite pour favoriser les mouvements légitimes de la pensée, tout en les réglant, et précisément par là, n'avait fini par devenir oppressive des consciences.

Sans remonter au schisme de l'orient et de l'occident, en mettant celui du XVIe siècle sur le compte de Rome, M. Vernes avoue qu'il arrive immanquablement un moment critique où ces organismes grandioses vont à l'encontre du but pour lequel ils ont été formés. A mesure qu'ils se consolident, ils deviennent impitoyables à l'égard des esprits indépendants qu'ils expulsent comme hérétiques; ils perdent la flexibilité nécessaire pour donner essor à la vie nouvelle qui aspire à les trans

former. Bien loin de renoncer aux funestes tendances qui les compromettent ils y abondent, ils les exagèrent au moment critique. Dans ces heures de vertige, l'exemple du concile de 1870 est là pour le prouver, on espère se sauver plutôt par l'exagération de ses défauts que par un retour à ses vertus. Et il ne faut pas croire que les grands organismes protestants montrassent plus de sagesse. Nous l'avons dit plus haut, il n'est pas d'église de la réformation qui ait su au bon moment alléger sa confession de foi pour répondre aux nouveaux besoins de l'époque. L'évolution n'est décidément pas à l'usage des grands organismes; ils se laissent miner par la dissidence et emporter par la révolution. Nous verrons en peu d'années si l'Amérique saura mieux faire que nous. Là aussi il s'est constitué de grandes églises protestantes selon l'idéal de M. Maurice Vernes. Et maintenant que le moment serait venu de répondre au désir qui se fait sentir de divers côtés de réviser les confessions du XVIe siècle, on ne manque pas de nombreuses fins de non recevoir; il semble qu'on veuille et cela dans un pays de jouer exactement le même jeu que les grandes églises du XVIe siècle en Europe.

liberté absolue

Il ne faut donc pas que les inconvénients inhérents au principe protestant nous conduisent à nous forger un catholicisme idéal, dont la simple perspective nous ferait pleurer de tendresse. En faisant dépendre les rapports du fidèle avec Christ, des rapports du fidèle avec l'église, le catholicisme, sur ce point comme sur beaucoup d'autres, a pris rang parmi les religions cléricales, formalistes qui ont fait leur temps. Il est impossible, sans des sous-entendus qui trahissent trop la diplomatie, des fictions percées à jour, qu'une réduction de ce grand organisme catholique puisse convenir à l'église protestante. Dans sa noble ambition, celle-ci doit viser à recueillir dans son sein les seuls hommes de bonne volonté qui sont arrivés à l'âge de majorité en fait de religion.

La théologie indépendante nous paraît s'être mieux tenue dans la juste mesure lorsque, par l'organe des professeurs de la faculté de théologie de l'académie de Lausanne, elle a déclaré dans un rapport mémorable: « Nous vous aurons résumé en quelques

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