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ments que les dogmes subissent, de certains principes qui ont agi sur l'esprit, sur la matière, sur la forme de la pensée, mais on fait de tout cela un mélange assez arbitraire d'éléments fort hétérogènes.

Münscher ramène à quatre les causes générales qui ont agi pour amener les changements que les dogmes ont subis : 1o la nature de l'esprit humain en général (spéculation, progrès, temps de calme, retour en arrière, passions humaines); 2o les milieux divers dans lesquels les chrétiens ont vécu différence de climat (orient et occident), circonstances intérieures des chrétiens (constitution et usages ecclésiastiques) et extérieures (condition des religions refoulées par le christianisme); 3o les changements dans les besoins des diverses époques; 4o les changements divers survenus dans les sciences auxiliaires de la dogmatique (exégèse, philosophie, histoire). — Tout cela est extérieur et superficiel.

Chez Baumgarten-Crusius, on doit signaler un manque de logique dans l'énumération des causes et surtout l'absence d'un principe général dominant le tout les discussions des apôtres, l'application qu'ils ont faite des idées chrétiennes ont donné lieu à des études dogmatiques, à la formation de certains systèmes; l'état de la Bible, son interprétation littérale, le besoin de l'esprit humain de s'élever du sentiment à l'idée, de la foi à la science, de passer de la pratique à la théorie, de systématiser; l'esprit de certaines époques et des religions étrangères; l'histoire générale de l'humanité, le développement du christianisme et de l'église; climat, mœurs, caractère national; constitutions, législations, judaïsme et paganisme, philosophie; docteurs et chefs de l'église. L'auteur,-cette remarque suffira, ne signale guère que des causes extérieures comme ayant agi sur l'histoire des dogmes. La seule exception c'est la tendance générale de l'esprit humain. En divisant l'histoire des dogmes en générale et en spéciale, Baumgarten-Crusius ne fait que combiner d'une manière purement extérieure ce qu'on a appelé la méthode chronologique et la méthode systématique. On n'arrive pas à l'unité, faute d'avoir pénétré plus loin que la surface et pour s'en être tenu à l'extérieur.

C'est aussi là le défaut de Néander. Il est d'autant plus frappant que ce théologien a rompu avec tout ce qu'il y a d'extérieur dans la manière de comprendre et d'exposer l'histoire. Bien loin de ne voir que des subtilités dans les controverses des anciens temps, il reconnaît qu'elles avaient leur raison d'être dans la nature même des choses. Pour ne pas être exposé à attribuer un trop grand rôle, soit aux circonstances extérieures, soit aux individualités, Néander demande qu'on se place au centre même de tout le développement dogmatique; les controverses d'un moment donné sont les conséquences naturelles des points de vue opposés qui se sont formés pendant une période dans la manière de concevoir le dogme chrétien. Mais comme chaque période est déterminée par celle qui l'a précédée, il faut se demander quel doit être, en dernière analyse, le point de départ du développement dogmatique en général. Néander explique tout par la grande antithèse du réalisme et de l'idéalisme. Mais d'où vient-elle à son tour? Evidemment de la nature humaine en général. Le dogme chrétien prendrait une forme différente suivant que les individus seraient naturellement portés au réalisme ou à l'idéalisme. C'est là le côté défectueux de la conception de Néander. Comme la nature humaine n'a d'existence que dans les individus, nous ne rencontrons dans tout le cours de l'histoire que des individualités. Néander ne s'élève pas plus haut que la considération psychologique. L'élément général, qui est le principe du mouvement de l'histoire, devient une pure abstraction : la nature humaine, qui dans sa généralité est une notion purement abstraite. Il ne s'élève pas jusqu'à cette généralité concrète, l'esprit pensant, qui possède dans la nature même de la pensée le principe de son mouvement, et qui dans les individus, membres vivants de l'organisme historique, s'efforce d'arriver à la liberté de la conscience de lui-même. Aussi, bien qu'il s'efforce de saisir tout leur sens profond, les phases diverses du développement dogmatique demeurent chez Néander de simples opinions, les opinions subjectives de quelques individus. Nous n'arrivons jamais à des pensées de l'esprit déterminant la notion de la chose elle-même, vraie en soi, indépendamment de toute

opinion subjective, de la forme accidentelle qu'elles peuvent revêtir dans la conscience individuelle, et ne pouvant par conséquent être comprises que du point de vue général de la spéculation. Grâce à ce qu'il y a de défectueux dans le point de vue de Néander, on ne peut jamais remarquer chez lui le progrès immanent de l'histoire. On voit toujours apparaître des individualités nouvelles, mais jamais de nouvelles époques de développement, résultat de la nécessité intérieure des choses. Il ne se passe rien de réellement nouveau; les vieilles choses vont se reproduisant sans cesse; les controverses nouvelles ne sont que la répétition des anciennes sous des formes nouvelles. Dans la lutte provoquée par la réformation entre le protestantisme et le catholicisme, Néander ne sait voir qu'une reproduction de l'ancienne controverse entre Augustin et Pélage. Tout se divise en supranaturalisme, mysticisme, tendance contemplative d'une part, et en spéculation, tendance rationnelle, rationaliste, exclusivement intellectuelle, dialectique, d'autre part. Mais tandis que les matériaux se rangent ainsi à droite ou à gauche, se classant d'après les principales catégories, on obtient, il est vrai, certaines tendances marchant parallèlement, mais on cherche en vain au milieu un grand courant progressif de l'esprit. La plus grande antithèse sur laquelle tout repose, est d'une part, le christianisme pénétrant l'humanité comme un levain et d'autre part la nature humaine diversement pénétrée, suivant les aptitudes diverses des individus. La conception ne peut s'élever au-dessus de cette antithèse; on ne sort pas du cercle étroit de certaines oppositions qui se reproduisent sans cesse. Cette conception de l'histoire ne soupçonne pas que, bien loin de se borner à s'opposer l'un à l'autre extérieurement, le christianisme et la nature humaine forment une unité, parce que le christianisme a sa base dans l'essence même de l'esprit qui, par conséquent, ne saurait prendre à l'égard du dogme une attitude exclusivement négative. Ici encore il nous manque quelque chose de vraiment général renfermant tout en soi et pouvant en laisser tout sortir. La méthode de l'his toire des dogmes n'est pas la simple reproduction du mouvement du dogme lui-même, aussi n'obtient-on pas de progrès

vraiment vivant. On voit divers facteurs qui agissent, mais l'unité du mouvement manque, parce que celle du principe fait défaut.

Rosenkranz, dans son Encyclopédie des sciences théologiques, a essayé de concevoir l'histoire des dogmes comme un développement continu, déterminé par l'harmonie intérieure des éléments qui la constituent. L'analyse, la synthèse, l'élément systématique sont les trois principes qui pénètrent surtout le développement de l'histoire des dogmes dans les diverses périodes. Au sein de l'église grecque, qui est celle du sentiment substantiel, la connaissance dogmatique est analytique, c'est-àdire elle morcelle la foi régnante, qui est en elle-même savoir et pensée, en ses diverses faces, pour exprimer ensuite ces différences comme propositions générales. C'est ainsi qu'un dogme vient s'enchaîner à un autre jusqu'à que tous les traits caractéristiques de la foi chrétienne éclatent dans tout leur jour. Dans l'église romaine la connaissance devient synthétique. Les dogmes existent déjà. Ils sont admis comme vrais ; il ne s'agit plus que de les prouver. Cette méthode, qui consiste à justifier les dogmes au moyen des preuves logiques, a le défaut de ne pas produire elle-même les matériaux, mais de les recevoir d'ailleurs. Comme il y a encore divorce entre le fond et la forme, on obtient tout au plus un assemblage plus ou moins heureux de dogmes divers avec les preuves qui les accompagnent. Avec le protestantisme, nous voyons apparaître la connaissance systématique dont le nerf, l'âme, est l'idée avec son mouvement immanent. Là, il s'agit moins de quelques dogmes particuliers ou des preuves à l'appui, mais bien d'établir certains principes. Dans la lutte provoquée par ce qu'ils ont d'excessif, ces principes s'élèvent d'eux-mêmes à cette unité organique qui peut seule répondre aux exigences de la science en se développant elle-même d'une manière vivante. La méthode n'est plus que ce qu'elle doit être en réalité : le mouvement dialectique du contenu lui-même; la longue querelle de la théologie et de la philosophie se trouve enfin vidée.

Le défaut de la conception de Rosenkranz c'est de ne déterminer le mouvement du dogme que d'après l'activité formelle

de l'esprit. En prenant ainsi une attitude tour à tour analytique, synthétique, systématique à l'égard du dogme, l'esprit considère l'objet de la connaissance comme quelque chose d'extérieur qui lui est donné à l'avance. Il reste toujours à savoir d'où vient cet objet sur lequel s'effectuent ces diverses opérations intellectuelles. Rosenkranz n'est pas heureux quand il désigne sous le nom d'activité synthétique le fait d'établir la vérité du dogme par des preuves formelles: ce n'est encore là que de l'analyse. Il ne prouve pas non plus la nécessité de passer de l'analyse à la synthèse, et de celle-ci à la systématisation. De plus, comment peut-il être question d'une connaissance absolue se créant son propre objet, alors que dès le commencement le dogme est présenté comme donné du dehors à l'esprit? Il faut que déjà dans les deux premières phases nous avons le mouvement dialectique de l'objet; il faut admettre au point de départ l'identité du sujet et de l'objet. L'analyse, la synthèse et la systématisation sont juxtaposées d'une manière trop extérieure, faute d'avoir été dérivées; de l'essence même de l'esprit et d'avoir été présentées comme son mouvement immanent. Le seul progrès accompli par Rosenkranz consiste à avoir placé le principe de développement continu dans l'esprit lui-même. Il a établi avec beaucoup de raison que les facteurs extérieurs (climat, nationalité, individus, etc.) ne peuvent jamais avoir joué un rôle décisif.

Kliefoth (Introduction à l'histoire des dogmes, 1839) s'est également élevé contre l'empirisme grossier pour se rendre compte de l'essence même de l'histoire des dogmes. Il admet trois grands cycles dogmatiques: celui de la théologie dans le sein de l'église grecque; celui de l'anthropologie dans l'église romaine; celui de la sotériologie dans le protestantisme. L'erreur principale de cette conception consiste à n'admettre qu'une différence du plus au moins d'une période à l'autre. Le dogme va en augmentant en quantité, en quelque sorte, d'une période à l'autre, mais cela tient uniquement à l'attitude différente que la conscience humaine prend à son égard. Le changement que subit le dogme d'une période à l'autre consiste non pas dans une différence de quantité, mais en ce que même ce

MÉL. II.

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