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votre canonisation par la voix de l'Eglise. C'est à la requête de son roi, à l'instance de ses prélats, à la sollicitation de tout son clergé, que vous avez été proclamé saint. Il étoit juste qu'elle vous rendît, autant qu'elle le pouvoit, devant les hommes, ce que vous lui avez donné devant Dieu. Pendant votre vie, vous avez travaillé à la sanctifier : il étoit juste qu'après votre mort elle travaillat à faire déclarer authentiquement et hautement votre sainteté. Recevez en particulier les hommages que je vous présente, comme membre d'une compagnie à qui l'éducation de votre jeunesse fut confiée, dans les mains de qui vous remîtes le plus précieux dépôt de votre conscience, et qui eut enfin la consolation de recueillir vos derniers soupirs, et de conduire votre bienheureuse ame dans le sein de Dieu. Du reste, mes chers auditeurs, entrons tous dans l'esprit de cette solennité. Qu'est-ce que la canonisation d'un saint? Un engagement à acquérir nous-mêmes, avec la grâce et le secours de Dieu, toute la sainteté qui nous convient. Car célébrer la canonisation d'un saint, c'est professer que la véritable gloire consiste dans la sainteté, qu'il n'y a rien de grand et de solide dans le monde que la sainteté, que toute la félicité et tout le bonheur de l'homme est attaché à la sainteté. Or je ne puis professer tout cela sans me sentir excité fortement, et sollicité à la poursuite de la sainteté ; et je me condamne moi-même par ma propre confession, si reconnoissant tout cela, je n'en ai pasplus de zèle pour ma sanctification. Il n'est pas nécessaire que nous soyons canonisés dans l'Eglise, comme François de Sales ; mais il est d'une nécessité absolue que nous soyons saints par proportion comme lui. Nous trouverons dans sa doctrine de quoi nous éclairer, dans ses exemples de quoi nous animer, et dans la gloire où il est parvenu, de quoi éternellement et pleinement nous récompenser. C'est ce que je vous souhaite, etc.

POUR LA FÊTE

DE SAINT FRANÇOIS DE PAULE.

Ego minimus in domo patris mei.

Je suis le plus petit dans la maison de mon père. Au livre des Juges, chap. 6.

CEs paroles que j'applique au glorieux patriarche dont nous célébrons ici la fête, furent autrefois prononcées par Gédéon, l'un des plus grands hommes de l'ancienne loi. Dieu l'avoit choisi pour combattre les Madianites enflés de leur victoire, pour délivrer les Hébreux ses compatriotes de l'oppression, et pour être enfin le chef, le conducteur, et le souverain de son peuple. Mais qui suis-je, dit ce saint capitaine, surpris du choix que Dieu faisoit de lui pour une si haute entreprise; et comment est-ce, Seigneur, que vous avez jete les yeux sur moi? Je suis de la dernière des douze tribus, qui est celle de Manassés. Dans la tribu de Manassès ma famille est la moindre de toutes; et moi je suis le plus petit de la maison de mon père : par où donc pourrai-je sauver Israël? In quo liberabo Israel? ecce familia mea infirma est in Manasse, et ego minimus in domo patris mei (1). Va, lui répondit le Seigneur, ne sois point en peine : je me joindrai à toi; je t'éleverai, et te ferai grand. Cette promesse s'accomplit, et vous savez à quel point de grandeur Gédéon parvint, et combien son nom fut redouté des ennemis du peuple de Dieu, et fameux dans toute la terre. N'est-ce pas là, chrétiens, l'image la plus

(1) Jud. 6.

naturelle et la plus parfaite de l'incomparable François de Paule; et ne semble-t-il pas que le Saint-Esprit, sous ces traits, ait prétendu nous le marquer par avance, et nous le faire connoîtrè? Dieu le destinoit à des commissions importantes : à fonder dans l'Eglise un nouvel ordre; à combattre le monde, le démon et la chair, ces dangereux ennemis de notre salut : et sur cela, quel étoit le sentiment de ce saint instituteur? Le même que celui de Gédéon. Hé quoi! mon Dieu, s'écrioit-il, vous me . connoissez ; je suis le plus petit des hommes; et le moyen que dans mon extrême foiblesse, je sois en état de seconder vos vues sur moi, et de les remplir? Ego minimus in domo patris mei. Je le sais, répond le Seigneur ; mais c'est pour cela même que je t'exalterai, et que je te comblerai de gloire. Arrêtons-nous là, mes chers auditeurs, puisque c'est la plus juste idée de l'éloge que j'entreprends. Faire le panégyrique de François de Paule, c'est faire le panégyrique de l'humilité; ou faire le panégyrique de l'humilité, c'est faire celui de François de Paule. Toutes ses vertus se sont comme abîmées dans celle-là sa foi merveilleuse, sa charité ardente et zélée, son austérité de vie, et sa mortification. Mais avant que de vous expliquer mon dessein, implorons le secours du ciel, et demandons-le par l'intercession de la plus humble des vierges. Ave, Maria.

Quoique l'humilité soit de toutes les vertus la plus pacifique, la plus soumise et la plus modeste, souvent néanmoins, si je puis ainsi m'exprimer, elle voudroit, aussi bien que l'orgueil, résister à Dieu, et combattre contre Dieu. L'Ecriture sainte, au livre de la Genèse nous représente un combat qui se passa dès le commencement du monde entre Dieu et les hommes, et dont l'orgueil des hommes fut le seul principe des hommes entreprirent de s'élever malgré Dieu même,

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et Dieu, malgré eux, entreprit de les humilier. L'orgueil des géans s'arma d'insolence et de présomption contre la toute-puissance de Dieu, et la toute-puissance de Dieu s'arma de foudres contre l'orgueil des géans. Mais, chrétiens, j'ai à vous proposer aujourd'hui combat bien différent, et non moins saint que l'autre étoit criminel; car quoique ce soit un combat entre Dieu et l'homme, il a cela de propre et de merveilleux, que bien loin de séparer l'homme de Dieu, il l'unit étroitement à Dieu, et l'entretient dans une paix éternelle avec Dieu. Ce combat, mes chers auditeurs, c'est celui de l'humilité de François de Paule, contre la libéralité et la magnificence divine. Dieu veut exalter François, et François, autant qu'il lui est permis, s'oppose à son exaltation. François veut s'abaisser et s'anéantir; et Dieu, pour le relever, le tire de l'obscurité où il veut vivre, et s'oppose à son anéantissement. Voilà tout mon sujet; concevez-le bien, parce que ce sera tout le fond et tout le partage de ce discours. Saint François de Paule a employé tous les efforts de son humilité pour se faire petit dans le monde: c'est la première partie; et Dieu a employé tous les trésors de sa magnificence pour le faire grand : c'est la seconde. Le Sauveur des hommes avoit dit dans son évangile, que celui qui s'humilieroit seroit exalté: Qui se humiliaverit, exaltabitur (1); et il falloit que cet oracle se vérifiât : or, je prétends qu'il n'a jamais été plus authentiquement vérifié, ni dans un exemple plus illustre, que dans la personne du saint fondateur que nous honorons en ce jour; et pour vous en convaincre, je vous ferai voir d'une part François de Paule qui s'humilie, et Dieu de l'autre qui glorifie François de Paule. Appliquez-vous, chrétiens : il y aura là également et de quoi satisfaire à votre dévotion, et de quoi servir à votre instruction.

(1) Matth. 23.

PREMIÈRE

PREMIÈRE PARTIE.

N'être rien, et ne s'estimer rien; être peu de chose, et s'estimer peu de chose; être méprisable, et se mépriser en effet soi-même, c'est l'indispensable devoir de l'humilité. Mais être grand, et s'étudier à devenir petit; être distingué aux yeux de Dieu, et n'être à ses propres yeux qu'un vil sujet; être tout ce que l'on peut être de plus relevé dans l'opinion des hommes, et dans la sienne propre, se rabaisser au-dessous de tous les hommes > c'est la grâce, c'est la perfection de l'humilité, et ce que saint Bernard admiroit plus que toutes les autres vertus: Mirabilem te apparere, et contemptibilem reputare, hoc ego virtutibus ipsis mirabilius judico (1). Or voilà, chrétiens, le caractère de l'humilité de saint François de Paule. Figurez-vous un homme comblé d'honneur et de gloire, un homme puissant en œuvres et en paroles, un homme vénérable aux souverains de la terre chéri des papes, recherché des rois, honoré des peuples; un homme de miracles, et dont tout le soin néanmoins est de se cacher et de s'obscurcir; qui ne travaille que pour cela, et qui n'a de pensée que pour cela ; qui met en usage tout ce que l'esprit de Dieu peut suggérer, et tout ce que l'esprit humain peut imaginer pour cela : voilà en raccourci tout le portrait de ce grand saint.

François réussit d'abord dans cette entreprise. Dès qu'il s'aperçut que Dieu commençoit à opérer en lui des choses extraordinaires ; que dès les premières années de sa vie, le ciel le prévenoit des plus rares bénédictions; que déjà son enfance étoit devenue illustre par divers prodiges, et que le bruit de ses prodiges se répandant au-dehors, son humilité en pourroit recevoir quelque atteinte, que fait-il? il forme un dessein la seule grâce du christianisme lui put inspirer. S'il eût

(') Bern.

TOME XII.

15

que

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