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de sa nature. Lorsque, par exemple, on vole dans une église, la circonstance du lieu fait que ce vol devient sacrilége, et lui donne une seconde espèce de malice, qu'il n'aurait pas s'il se commettait dans un lieu profane. Cet acte est tout à la fois contraire à la justice et à la religion.

Les circonstances qui influent sur la bonté ou sur la malice de nos actions sont au nombre de sept, qu'on exprime ainsi dans l'école : Quis, quid, ubi, quibus auxiliis, cur, quomodo, quando? Nous les expliquerons dans le traité des Péchés.

35. Troisièmement, la fin qu'on se propose en agissant concourt à la moralité de l'acte; elle le rend bon ou mauvais, s'il est indifférent de sa nature. La promenade, par exemple, devient moralement bonne, si on la fait dans l'intention de se procurer du délassement, et de se mettre en état d'accomplir plus facilement ses devoirs. Elle est mauvaise, si elle est commandée par un motif de vanité, ou par un autre motif contraire à la sainteté de la morale évangélique.

La fin peut aussi augmenter la bonté ou la malice d'une action qui est bonne ou mauvaise dans son objet. Jeuner par esprit de mortification est une action louable; mais jeûner et pour se mortifier et pour pouvoir faire l'aumône, c'est une action, sans contredit, plus louable encore. De même, voler pour avoir de quoi s'enivrer ou se livrer au libertinage, est certainement, toutes choses égales d'ailleurs, un plus grand mal que de voler pour secourir une famille indigente. « Si objectum sit indifferens, tunc finis bonus << facit actum moraliter bonum, ut est ambulare ex obedientia ; « finis malus facit malum, ut ambulare ad ostensionem luxus. Finis «<malus facit actum ex malo pejorem, ut furari ad concubinam « alendam ; et facit ex bono malum, ut eleemosynam dare ad va« nam gloriam (1). »

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36. Enfin, comme on le voit par le texte que nous venons de citer de saint Alphonse, une action bonne de sa nature devient mauvaise par l'intention de celui qui la fait, lorsque cette intention est réellement mauvaise, et qu'elle peut être regardée comme cause déterminante ou comme principe de cette action. Exemple: jeùner est acte de vertu ; jeûner par hypocrisie, c'est un péché. « Si ob«jectum sit bonum, finis vero operantis sit malus; actus huma- nus est totus malus ex malitia finis quæ destruit omnem boni⚫ tatem (2). .

(1) S. Alphonse de Liguori, Theol. moral. de Aclibus humanis, (2) Ibid.; S. Thomas, Sum. part. 1. 2. quæst. 18. art. 4 et 6.

n° 38.

37. Mais si l'intention peut rendre mauvaise une action qui est bonne de sa nature, une action mauvaise ne peut jamais devenir bonne, ni mème excusable, par la pureté de l'intention. Nous ne devons point faire le mal, dit saint Paul, pour le bien qui peut en résulter : « Non faciamus mala, ut eveniant bona (1). »

Nous terminerons cette question, en faisant remarquer qu'un acte ne peut être moralement bon qu'autant qu'il l'est tout à la fois sous le rapport de son objet, sous le rapport des circonstances qui l'accompagnent, et sous le rapport de l'intention de celui qui le fait.«Non est actio bona, nisi omnes bonitates concurrant; quia quilibet singularis defectus causat malum; bonum autem causa« tur ex integra causa (2). »

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38. Un seul et même acte peut avoir différentes espèces de bonté ou de malice; car, comme nous l'avons déjà fait remarquer, il peut être tout à la fois conforme ou contraire à plusieurs vertus. Si une personne pratique le jeûne pour expier ses péchés et pour pouvoir en même temps secourir les pauvres, elle fait un acte doublement méritoire: méritoire comme acte de pénitence, et méritoire comme acte de charité. Le vol d'une chose sacrée est un vol sacrilége; il est contraire et à la justice qui veut qu'on respecte le bien d'autrui, et à la religion qui nous prescrit de respecter les choses saintes.

39. En morale, l'acte extérieur, considéré en lui-même, ne renferme ni plus ni moins de bonté, ni plus ni moins de malice que l'acte intérieur. Lorsque la volonté de faire une bonne ou une mauvaise action est sincère, aussi forte qu'elle peut moralement l'être pour la faire effectivement, la bonté ou la malice de l'acte intérieur est égale à la bonté ou à la malice de l'acte extérieur. Celui-ci ne peut rien ajouter au premier, puisque l'acte extérieur est l'expression de l'acte de la volonté. C'est le cœur qui est le foyer du bien et du mal; c'est la volonté qui en est le principe: « Ex corde e exeunt cogitationes malæ, homicidia, adulteria, fornicationes, « furta, falsa testimonia, blasphemiæ (3). » Il n'y a donc dans un acte extérieur que le bien ou le mal qui est dans la volonté. « Actus exterior nihil adjungit ad præmium essentiale, tantum enim meretur qui habet perfectam voluntatem aliquod bonum faciendi, « quantum si faceret illud (4). »

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Cependant, quel que soit aux yeux de Dieu le mérite d'un acte intérieur, on convient que l'exécution des actes de la volonté sera

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suivie d'une récompense particulière, que le Docteur angélique nomme récompense accidentelle : « Actus exterior adjungit aliquid << ad præmium accidentale (1).

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40. Nous avons parlé de l'acte extérieur considéré en lui-même; car si on le considère, soit dans la manière dont il se produit au dehors, soit dans ses résultats à l'égard du prochain, il acquiert un plus haut degré de malice ou de bonté. La bonté ou la malice d'un acte est en proportion du temps que l'on met à son exécution, des efforts plus ou moins grands qu'il réclame, et de ses suites pour le bien ou pour le mal, pour l'édification ou le scandale des fidèles. Ainsi il est vrai de dire que celui qui consomme extérieurement le péché est plus coupable que celui qui le désire seulement. «< Actus exterior nihil addit ad bonitatem, nisi contingat ipsam volunta« tem secundum se fieri meliorem in bonis, vel pejorem in malis : quod quidem videtur posse contingere tripliciter. Uno modo se« cundum numerum, puta cum aliquis vult aliquid facere bono << fine vel malo, et tunc quidem non facit; post modum autem « vult et facit; duplicatur actus voluntatis, et sic fit duplex bonum, « vel duplex malum. Alio modo, quantum ad extensionem; puta « cum aliquis vult facere aliquid bono fine vel malo, et propter aliquod impedimentum desistit; alius autem continuat motum « voluntatis, quousque opus perficiat; manifestum est quod hujus « modi voluntas est diuturnior in bono vel malo; et secundum hoc « est melior vel pejor. Tertio, secundum intentionem; sunt enim quidam actus exteriores, qui in quantum sunt delectabiles vel morosi, nati sunt intendere voluntatem, vel remittere. Constat « autem quod quanto intensius tendit in bonum vel malum, tanto « est melior vel pejor (2). ·

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CHAPITRE V.

De la Fin des Actes humains.

41. Il ne peut y avoir aucun acte humain sans une fin quelconque. L'homme ne fait rien sans se proposer un but, une fin dont le choix dépend de sa volonté. « Manifestum est quod omnes ac

(1) S. Thomas, in 2. dist. 40. quæst. 1. art. 3. quæst. 20. art. 4.

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(2) Ibid., Sum. part. 1. 2.

a tiones quæ procedunt ab aliqua potentia, causantur ab ea secun• dum rationem sui objecti. Objectum autem voluntatis est finis et .bonum; unde oportet quod omnes actiones humanæ propter « finem sint (1). » Non-seulement l'homme ne peut rien faire sans se proposer une fin; mais toutes ses affections, tous ses désirs, toutes ses démarches se rapportent nécessairement à une fin dernière. « Necesse est quod omnia quæ homo appetit, appetat propter « ultimum finem (2). »

42. En morale, on entend par fin le but qu'on se propose dans ses actions, le bien auquel on tend et qu'on désire d'obtenir. C'est toujours sous l'idée d'un bien réel ou apparent qu'une fin nous fait agir.

On distingue d'abord la fin qui est intrinsèque, et la fin qui est extrinsèque à l'acte. La première est celle à laquelle l'acte se rapporte de lui-même, indépendamment de la volonté de celui qui agit: tel est, dans l'aumône, le soulagement de celui qui la reçoit. La fin extrinsèque est celle qui dépend du choix de notre volonté. Ainsi, dans l'aumône, outre le soulagement du pauvre, qui est inhérent à l'acte, il peut arriver qu'on se propose une fin différente, bonne ou mauvaise, comme de satisfaire à la justice de Dieu, ou de s'attirer les louanges des hommes.

43. La fin extrinsèque, dont il s'agit principalement, est ou prochaine, ou éloignée, ou dernière. La fin prochaine est ainsi appelée, parce qu'on l'a prochainement en vue dans ses actes. La fin éloignée est celle à laquelle on tend par le moyen de la fin prochaine. La fin dernière est celle à laquelle notre volonté s'arrête, sans aller plus loin. On étudie, par exemple, pour se mettre en état d'être élevé au sacerdoce, avec le désir de pouvoir travailler au salut des âmes, afin d'arriver plus sûrement au salut éternel. Le sacerdoce est la fin prochaine des études; le salut des âmes en est la fin éloignée; le bonheur éternel en est la fin dernière.

44. Nous devons rapporter toutes nos actions à Dieu, comme à notre fin dernière. Soit que vous mangiez, dit l'Apôtre, soit que vous buviez, soit que vous fassiez autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu : « Sive manducatis, sive bibitis, sive aliud quid facitis, omnia in gloriam Dei facite (3). » Ce qui doit s'entendre d'un précepte, d'une loi proprement dite, et non d'un conseil. Quidam dicunt quod hoc est consilium; sed hoc non est vcrum. »

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(1) S. Thomas, Sum. part. 1. 2. quæst. 1. art. 1.—(2) Ibid., art. 6.—(3) Corinth. c. 10. v. 31.

Ainsi s'explique saint Thomas (1); et l'interprétation qu'il nous donne des paroles de saint Paul est conforme à la doctrine des Pères de l'Eglise (2).

45. Le précepte de l'Apôtre est affirmatif et négatif. Comme négatif, il défend tout ce qui est contraire à la loi divine; on ne peut offrir à Dieu ce qu'il condamne. Comme affirmatif, il nous prescrit de rapporter toutes nos actions à Dieu, toutes, sans exception. Mais on peut les lui rapporter de différentes manières. En effet, on distingue ici le rapport actuel, le rapport virtuel, le rapport implicite, et le rapport habituel ou interprétatif. Le rapport est actuel, lorsque par un acte exprès de la volonté on offre ses actions à Dieu; il est virtuel, lorsque, après avoir offert à Dieu une action en particulier ou toutes ses actions en général, on agit en vertu de cette première intention; tandis que celle-ci n'a point été révoquée ni par un acte subséquent, ni par un trop grand laps de temps. Il y a rapport implicite d'une action à Dieu, lorsque la volonté se porte à cette action, uniquement parce qu'elle est bonne, sans y mêler aucune circonstance, aucune fin qui en puisse vicier la nature. Le rapport habituel ou interprétatif consiste dans la disposition où l'on est de rapporter ses actions à Dieu, sans qu'il y ait de la part de la volonté aucune intention ni actuelle, ni virtuelle, ni même implicite.

46. Or, une action peut être moralement bonne, quoiqu'on ne la rapporte pas à Dieu d'une manière explicite. L'intention actuelle n'est pas nécessaire pour accomplir le précepte dont il s'agit; car l'obligation de rapporter en détail et d'une manière expresse toutes ses actions au Créateur demanderait une contention d'esprit dont l'homme, quoique aidé de la grâce, n'est point capable. Il suffit donc de les lui rapporter virtuellement. « Non oportet, dit saint Thomas, ut semper aliquis cogitet de ultimo fire, quandocumque aliquid appetit vel operatur; sed virtus primæ intentionis, quæ « est respectu ultimi finis, manet in quolibet appetitu cujuscumque « rei, etiamsi de ultimo fine actu non cogitetur, sicut non oportet quod qui vadit per viam in quolibet passu cogitet de fine (3). Saint Alphonse parle dans le même sens; voici ce qu'il dit : « Non requiritur actualis relatio omnium sive verborum sive operum in «< bonum honestum; quod esset importabile pondus, et res sexcentis implexa scrupulis; sed sufficit relatio virtualis; unde quamvis

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(1) In Epist. ad Colossenses. — (2) Célestin I. Epist. 1. S. Maxime, homil. 2. de gratia; S. Ambroise, in Luc. lib. n. no 84. — (3) Sum. part. 1. 2. quæst. 1. art. 6.

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