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dant pleurer autour de lui, il les consola par des paroles pleines de foi, de confiance en Dieu et de soumission à sa sainte volonté. Deux ministres anglicans se présentèrent à leur tour: il refusa de les écouter. Au moment où les soldats se disposaient à le conduire au supplice, plusieurs des officiers de la reine le pressèrent de solliciter son pardon. « Je n'ai point de pardơn à demander à la reine, dit-il ; jamais je ne l'ai offensée. » Le peuple, amassé aux abords de la prison, entendant cette réponse, poussa des cris de fureur contre « le traître papiste. » Ce fut au milieu de ces vociférations de la foule que Nelson arriva à la place des exécutions : « Seigneur, je remets mon âme entre vos mains,» s'écria-t-il au moment où s'arrêta la claie sur laquelle on le traînait. Puis, debout sur le char, il invita les catholiques présents à prier avec lui : « Je vous prends tous à témoin, dit-il ensuite au peuple, que je meurs dans l'unité de l'Église catholique, que c'est pour elle que je vais avoir le bonheur de répandre mon sang. Je conjure le Seigneur que, dans sa miséricorde, il lui plaise de vous rendre tous catholiques fidèles, disposés à vivre et à mourir dans l'unité de notre mère l'Église catholique romaine. » La multitude lui répondit de nouveau par des cris de fureur : << Loin d'ici cet homme ; loin d'ici l'Église catholique romaine! » Quand le silence fut un peu rétabli, le confesseur de la foi demanda pardon à tous ceux qu'il avait pu offenser, et déclara qu'il pardonnait lui-même à ses ennemis, à ses persécuteurs, comme il désirait que Dieu lui pardonnât. Voyant le bourreau achever ses préparatifs, il se recueillit, fit une dernière prière, puis le char roula et le laissa suspendu, pendant qu'un grand nombre de spectateurs s'écriaient : « Seigneur,

recevez son âme ! » Le martyr était encore plein de vie, quand l'exécuteur, coupant la corde, le laissa tomber par terre, puis, le trainant vers le billot, l'étendit dessus et lui ouvrit la poitrine. Au moment où il en arrachait le cœur, plusieurs des assistants, plus rapprochés, entendirent la victime prononcer ces paroles : « Je pardonne à la reine et à tous ceux qui sont les auteurs de ma mort. » Pour moi, dit le témoin oculaire qui rapporte ces détails, je vis remuer ses lèvres, mais je ne pus entendre ses paroles. Le bourreau n'abattit la tête qu'après plusieurs coups. On la plaça sur une des piques du pont de Londres. Le corps, partagé en quatre quartiers, fut suspendu aux portes de la ville.

Sur la même place de Tyburn expirait quelques jours après Thomas Sherwood, né à Londres de parents catholiques. Après un séjour de quelques années au collège de Douai, il revint dans sa patrie pour certaines affaires de famille. Un jeune libertin, qui le soupçonna d'être prêtre, quoiqu'il ne fût encore qu'étudiant, l'ayant reconnu dans les rues de la capitale, cria aussitôt : « Un traître, un traître, arrêtezle traître! >> Au tribunal, Sherwood déclara qu'il ne croyait pas que la reine eût la suprématie dans l'église d'Angleterre; cette suprématie ne pouvant appartenir qu'au Pape. Malgré les tortures, on ne put lui arracher les noms des personnes qui avaient eu des rapports avec lui. Tous les tourments imaginables lui furent infligés: la faim, la soif, le froid et la privation des choses même les plus indispensables. La vigilance des gardes était si active que M. Rooper, gendre de l'illustre Thomas Morus, ne put faire parvenir au prisonnier quelques pièces d'argent pour subvenir à sa détresse. Tout ce qu'il fut possible d'obtenir du lieutenant de

la Tour fut qu'on renouvelât la paille sur laquelle il était couché. Pendant six mois, Thomas Sherwood en dura ces tourments avec une inaltérable patience : << Seigneur Jésus, répétait-il souvent, je ne suis point digne de souffrir ainsi pour vous; beaucoup moins le suis-je encore des récompenses que vous promettez à ceux qui vous auront confessé. » Traduit une dernière fois devant les juges, il fut condamné à mort pour refus de reconnaître la suprématie de la reine, et exécuté comme criminel de haute trahison. La réforme, qui avait proclamé la liberté absolue de conscience, ne reculait pas plus devant l'inconséquence des tortures que devant celle des doctrines. Élisabeth décrétait les unes comme les autres. La persécution devenait une nécessité pour imposer sa religion nouvelle; mais afin d'arracher avec la vie l'auréole même du martyre, on condamnait comme rebelles les Anglais assez courageux pour prêcher ou défendre la vieille foi de leurs ancêtres. Tactique odieuse, empruntée aux tyrans de Rome; aussi est-il vrai de dire que « rien ne ressemble davantage aux persécutions contre les premiers chrétiens que les persécutions d'Angleterre contre les catholiques (1).»

Pendant que ces missionnaires répandent leur sang, par les ordres de la fille de Henri VIII, pour la cause de Dieu et de son Église, d'autres en plus grand nombre se préparent au martyre dans les comtés divers où ils sont disséminés et cachés, mais surtout au Collège de Douai transféré à Reims. C'est là que va se fonder, d'une manière stable et permanente, cette mission d'Angleterre dont la Providence se servit pour conserver, en dépit de toutes les fureurs de l'hérésie, la foi catholique dans ce royaume.

(1) Lamennais, Essai sur l'indifférence, t. 1, p. 77.

Chapitre VIII. O

Le collège anglais à Reims. Commencement de la mission d'Angleterre.-Le docteur Allen et le père Mercurian. Robert Persons et Edmond Campian. - Le voyage et l'arrivée de ces deux jésuites en Angleterre. - Premiers travaux des missionnaires. - Conversions remarquables.

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- Lettre de Campian aux conseillers de la reine. velles conversions. Conduite des missionnaires et des catholiques pendant la persécution, Nouveaux écrits du père Campian; son livre intitulé: Dix raisons. Le Directo- 3 rium Christianum de Robert Persons. Proclamation de la reine et lois pénales contre les catholiques.

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ETTE période de quinze ans, pendant laquelle le Collège anglais de Douai résida à Reims, occupe une large place dans l'histoire de la persécution religieuse en Angleterre. C'est alors que la mission y fut régulièrement établie, et qu'en différents lieux d'autres collèges s'élevèrent sur le modèle du premier; alors que le despotisme d'Élisabeth s'appesantit plus durement sur les catholiques, et que le sang des martyrs coula à flots dans plusieurs villes du royaume. Avant de rappeler ces faits si glorieux pour l'Église, ajoutons quelques mots sur les moyens providentiels par lesquels Dieu se préparait à multiplier les apôtres qui accompliront ses desseins sur cette nation égarée.

On a vu les intrigues des ministres d'Élisabeth pour forcer les disciples d'Allen de quitter leur collège de Douai. Peu s'en fallut que de semblables manœuvres ne vinssent jeter le trouble jusque dans la ville de Reims. La difficulté d'atteindre cette place située au

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cœur du royaume, l'impossibilité de lâcher contre elle les hérétiques des Pays-Bas, ses complaisants auxiliaires, ne faisaient qu'enflammer davantage l'animosité de la reine. D'ailleurs les plus influents des membres de son conseil, Cecil, Leicester et Walsingham, ne cessaient de la provoquer à toutes les rigueurs afin d'effrayer la famille des Guise, si bienveillante pour les exilés, et en particulier le cardinal qui leur ouvrait un asile. Elle donna l'ordre d'interroger sévèrement Marie Stuart, sa prisonnière et la nièce des Guise, sur tout ce qui était relatif à cette translation du Collège de Douai à Reims. Peu satisfaite encore, elle avertit son ambassadeur à Paris qu'il eût à se rendre auprès de Henri III pour solliciter l'expulsion des réfugiés anglais. Le roi de France n'y consentit point, et ce simple refus, que lui imposait la dignité de sa couronne

autant que le respect de la religion, suffit pour exas

pérer l'implacable fille de Henri VIII.

C'est alors, dans un de ces moments de dépit furieux aussi déshonorant pour la femme qu'injuste dans la souveraine, qu'Élisabeth adopta avec ses ministres un plan de persécution atroce dont l'exemple ne se rencontre dans l'histoire d'aucun peuple. Un prétexte manquait encore pour dissimuler ces honteuses colères du pouvoir on le trouva dans l'arrivée en Angleterre de deux jésuites, les premiers qui prirent part aux tra vaux de la mission.

Les sentiments d'Allen pour les fils de saint Ignace étaient connus. Une lettre qu'il leur écrivit en 1578 sera toujours un des témoignages les plus flatteurs que présentera cette illustre société à ses détracteurs et à ses ennemis. Aussi son désir le plus ardent étaitil de voir entrer dans la mission, avec ses propres dis

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