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qu'il a données à l'Eglise, qu'il n'y a point d'autre action pour faire des pasteurs, que l'imposition des mains. A cette autorité des apôtres, nous joignons la doctrine et la discipline constante de toutes les églises, certifiée par le témoignage de saint Augustin. «< Personne ne doute, dit-il, que l'ordination » ne soit un sacrement comme le baptême; » mais un sacrement, qui, bien loin de ne rien opérer, imprime un caractère que la déposition d'un pasteur qu'on ôte de sa fonction, ni l'hérésie, ni l'apostasie, ne peuvent jamais effacer. Mais si, malgré ce témoignage si formel de saint Augustin sur la tradition, et malgré l'aveu de Calvin sur la nature du sacrement de l'ordination, on persiste encore à douter de la tradition constante de tous les siècles sur cet article, on peut consulter Calvin même, comme un témoin non suspect de cette tradition. « L'opinion » des sept sacremens, dit-il (1), a été toujours tant >> commune entre les hommes, et tant démenée en disputes et sermons, que d'ancienneté elle est en>> racinée au cœur de tous, et y est encore mainte» nant fichée. » Ce n'est donc pas, comme M. Jurieu a osé le dire, une simple cérémonie humainement instituée. Les hommes n'instituent point les sacremens leurs commissions étant révocables n'impriment aucun caractère fixe; leurs cérémonies ne peuvent donner rien d'ineffaçable; et comme ils en sont les auteurs, ils peuvent les réitérer aussi souvent qu'ils le croient utile. De là vient que tant de pasteurs protestans, en quittant la France, n'ont fait aucun scrupule de se faire réordonner en An(1) Instit. liv. IV.

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gleterre. Ils ont jugé avec raison, selon leurs principes, qu'une simple bénédiction instituée par les hommes pouvoit être renouvelée toutes les fois qu'il conviendroit de le faire pour leur repos et pour la conservation de leur emploi de pasteur. Ceux qui ont été plus scrupuleux ont senti que l'ordination n'est pas une simple cérémonie, quoique leur Réforme l'assure, et n'ont pas voulu se faire réordonner en Angleterre. Aussi l'antiquité, qui avoit reçu des apôtres des idées toutes contraires à la prétendue réforme, à regardé la réordination avec horreur. Si nous trouvons dans Gratien quelques règles pour les réordinations des simoniaques, c'est qu'alors on a supposé, bien ou mal, qu'il manquoit à ces ordinations quelque circonstance nécessaire à leur validité. Et, sans entrer dans le détail des faits, il est certain qu'on ne les a réitérées qu'à cause qu'on les a crues nulles. Ainsi l'ordination est si essentielle, qu'on a cru la devoir faire de nouveau dès qu'on a douté qu'elle eût été faite validement la première fois. L'erreur de ceux qui s'y sont trompés ne nous importe en rien; car il nous est inutile d'examiner si on a eu raison ou tort de croire certaines ordinations nulles, puisqu'il est constant qu'on ne les a refaites qu'à cause de leur prétendue nullité. Ainsi, si elles ont été réitérées sans avoir été nulles, c'est par ignorance que cela s'est fait, comme parle saint Augustin. C'est ce que les auteurs contemporains ont dit des ordinations du pape Formose, que Sergius ou Etienne voulut réitérer par un aveugle emportement contre sa mémoire. C'est ainsi qu'en parle le célèbre Auxilius dans le dialogue qu'il fit pour répondre à

Léon de Nole, parce que celui-ci résistoit pour n'être point réordonné. Il allègue l'exemple du pape Anastase, qui avoit confirmé les ordinations faites par l'hérétique Acacius, et les preuves dont ce pape s'étoit servi. Il ajoute que les réordinations sont un crime semblable aux rebaptisations. Enfin il parle comme nous, et ne permet pas de douter que la tradition en ce point ne demeurât alors constante, malgré quelques exemples où des particuliers paroissent ne l'avoir pas consultée. Luitprand condamne cette conduite. « Ce n'est pas là, dit-il, ce que le » droit permet, mais ce que la rage persuade. Ce » n'est pas une erreur dans la foi, mais une violente >> tyrannie dans le fait.... La bénédiction, ajoute» t-il, que le ministre donne, est répandue, non par >> le pontife qu'on voit, mais par celui qu'on ne voit » pas; car ni celui qui arrose, ni celui qui plante » n'est quelque chose, mais Dieu, qui donne l'ac» croissement. » Vous reconnoissez dans ces paroles le langage de la tradition. N'est-ce pas ainsi que saint Augustin parloit contre les Donatistes? Il est vrai que la passion et l'ignorance des intrus faisoit que, sans examiner les règles, ils vouloient que leurs prédécesseurs fussent regardés comme n'ayant jamais été pasteurs, et que leurs ordinations passassent pour nulles. Mais ce n'est pas une discipline qu'on puisse reprocher à l'Eglise ; c'est seulement un excès de grossièreté et une vengeance personnelle que l'Eglise a condamnée avec horreur dès ces temps-là. Les auteurs que je viens de nommer le montrent assez. De plus, Jean IX, dans un concile Romain, condamna tout ce qui avoit été fait dans

l'affaire

l'affaire de Formose. Il faut toujours conclure que ce qui s'étoit fait d'irrégulier s'étoit fait par ignorance, selon l'expression de saint Augustin. Ainsi la règle générale demeure dans son intégrité. Jamais aucun auteur catholique n'a enseigné qu'une ordination valide peut être réitérée. C'est suivant cette règle, que le concile de Nicée admet les ordinations des Novatiens, et ne veut pas qu'on les réitère (1). C'est encore par la même raison que saint Jérôme soutient, contre les Lucifériens, l'ordination des évêques ariens. C'est sur ce principe si bien développé par saint Augustin, comme nous l'avons vu, que les évêques catholiques offrirent en Afrique aux évêques donatistes de descendre de leurs chaires pour les leur céder. Il n'étoit point question de les réordonner, quoiqu'ils eussent reçu l'imposition des mains hors de l'unité catholique. Ecoutons du Moulin même. « Nous tenons, dit-il (2), que l'ordination ne » doit être réitérée, quand par cette ordination on a >> reçu simplement une charge dont l'institution se » trouve en la parole de Dieu. » Puis il cite les exemples que nous avons rapportés du concile de Nicée et de saint Jérôme, contre les réordinations. C'est encore suivant la même règle invariable que⚫ l'Eglise s'est conduite dans le neuvième siècle. Le concile huitième avoit condamné l'intrusion de Photius, et avoit déclaré qu'il n'avoit rien donné dans les ordinations qu'il avoit faites, parce qu'il n'avoit rien reçu dans la sienne. Par ces paroles si fortes l'Eglise vouloit seulement témoigner son horreur de

(1) Can. viii. Conc. tom. 11, p. 31. — (2) Chap. 11 du tr. 111. du tre liv. de la Voc. des Pasteurs:

FÉNÉLON. II.

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l'ordination illégitime de ce schismatique, La suite le montre évidemment. Par là elle exprimoit le défaut de juridiction qui étoit en sa personne et en celle de tous les ministres qu'il avoit ordonnés. Mais il parut bien dans la suite que l'Eglise, qui croyoit ces ordinations illégitimes et nulles quant à la juridiction, ne les croyoit pourtant pas nulles pour le caractère, et qu'elle persévéroit dans l'ancienne doctrine contre les réordinations; car Jean VIII, écrivant aux empereurs, déclare qu'il reçoit Photius, et le reconnoît pour patriarche de Constantinople. On ne peut point dire qu'il présuppose tacitement que Photius se fera réordonner, puisqu'au contraire il le reconnoît d'abord pour son confrère dans l'office pontifical et dans l'autorité pastorale du sacerdoce, pourvu qu'il satisfasse en demandant miséricorde. De plus, il use, dit-il, de cette condescendance, contre la rigueur des lois ecclésiastiques, pour imiter le concile Africain, qui offrit de recevoir dans leurs fonctions les clercs donatistes ; et le pape Innocent, lequel, pour effacer le scandale de l'Eglise, reçut ceux qui avoient été ordonnés par l'hérétique Bonose. Vous voyez donc qu'il reçoit Photius sans . réordination, comme saint Augustin nous apprend que les pères d'Afrique recevoient sans réordination les Donatistes qui avoient été ordonnés dans le schisme. Ce n'est point une chose faite sans réflexion. Elle est résolue avec les patriarches, les métropolitains, les évêques, et le clergé même de Constantinople, autrefois ordonné par Méthodius et par saint Ignace. Elle est résolue après avoir consulté la tradition, et dans le dessein d'imiter l'Eglise d'Afrique.

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