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donnoit à chacun d'eux un pouvoir sans bornes. Les apôtres alloient suivant que l'Esprit les envoyoit ; et comme l'inspiration divine est au-dessus de toute règle humaine, ils n'avoient d'autres bornes de leur juridiction et de leurs travaux, que celles qui leur étoient marquées par l'Esprit de Dieu. Ainsi cette puissance si étendue n'étoit qu'une suite naturelle et nécessaire de cette inspiration, qui étoit, comme nous venons de le voir, purement accidentelle et ajoutée à la nature du ministère. De plus, cette mission donnée au collége apostolique pour annoncer l'Evangile à toute créature a passé au collége épiscopal qui lui a succédé. Les mêmes paroles qui donnent la mission aux uns, la donnent aussi aux autres; ils n'ont point d'autre titre, et le titre commun est également sans restriction pour tous. C'est donc par la tradition toute seule, que nous savons que chaque évêque n'a pas personnellement la puissance sans bornes que les apôtres avoient reçue, et qu'ils sont bornés au troupeau particulier que l'Eglise leur marque. Qui ne consulteroit que l'Ecriture, n'y trouveroit en rigueur aucune différence à cet égard entre les apôtres et les pasteurs qui leur ont succédé : car les apôtres, dans leurs Epîtres mêmes, qui règlent le détail de la discipline, n'ont jamais marqué des bornes à la juridiction des pasteurs qu'ils ont établis. Si Timothée et Tite paroissent attachés à des troupeaux particuliers, ne voit-on pas que les apôtres ont été de même? Chacun d'eux s'étudioit autant qu'il le pouvoit, dans ces commencemens, à n'entrer point dans la moisson d'autrui, et à n'édifier pas sur un fondement étranger. L'ordre le vouloit ainsi.

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ainsi. Vous voyez saint Pierre, qui, nonobstant sa vigilance sur tout le troupeau de Jésus-Christ, prend singulièrement en partage les Juifs. Saint Paul est destiné pour les Gentils. Saint Jacques le Mineur se borne à l'église de Jérusalem. Saint Jean s'attache aux églises d'Asie, et principalement à celle d'Ephèse, dont il a été appelé l'évêque par les anciens. Les autres se dispersent et partagent entre eux l'univers. Ainsi l'Ecriture ne marque aucune différence, pour la puissance d'évangéliser, entre les apôtres et leurs successeurs. Cette différence, que les Protestans supposent avec tant de confiance, et qui est tant vantée dans leurs écrits, ne peut être prouvée que par la tradition, si abhorrée parmi eux. Etrange effet d'une haine aveugle, qui appelle à son secours, contre l'Eglise, ce qui élève l'Eglise même au-dessus de tout, et qui se tourne à la ruine de la Réforme! Qu'ils cessent donc de supposer ce que la tradition seule enseigne, ou qu'ils rougissent de blasphémer contre cette tradition, s'ils continuent de la supposer.

Quoique les apôtres fussent immédiatement inspirés pour annoncer les mystères, ils n'agissoient pourtant pas toujours, dans les choses de conduite, par une actuelle inspiration. Saint Pierre, répréhensible au jugement de saint Paul qui lui résiste en face, en est une preuve qui ne sera jamais oubliée. Il n'est pas question d'alléguer ici la sainteté des apôtres, puisqu'il s'agit, non des dispositions personnelles des ministres, mais de la nature du ministère. Faire dépendre l'autorité des pasteurs de leur sainteté, ce seroit retomber dans une erreur semblable à celle des Vaudois. Judas, avare et perfide, n'étoit pas moins véFÉNÉLON. II.

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ritablement apôtre que ses collègues. C on, dans la suite des siècles, de saints n'étoient point apôtres!

Mais enfin, indépendamment du d cles, de l'inspiration particulière, de la verselle, enfin de la sainteté et de tous le personnels attachés aux apôtres, la gra de Jésus-Christ regarde un ministère les apôtres, et qui ne devoit point finir dons étoient passagers. Les apôtres qu reçus devoient mourir bientôt. Cepend ministère même qui ne mourra jamai meurera inaltérable dans leurs successe Jésus-Christ (1), instruisez toutes les baptisant, etc. et voici, je suis avec vou consommation du siècle. Voilà un min et éternel, quoique les grâces miracu traordinaires, qui étoient extérieures au dussent pas être éternelles. Voilà les pr aux apôtres, non en qualité d'hommes res, miraculeux et inspirés, mais en qu teurs dont le ministère ne finira qu'av

Les apôtres, dira-t-on, avoient ce di lement de conduire le troupeau, mais donner eux-mêmes de nouveaux paste succéder. Il est vrai, et c'est par là qu' noître que le ministère se perpétuoit ment du peuple. Mais cette puissance pasteurs, qu'on ne peut refuser aux apô reconnoître tout de même dans leurs su apôtres ont fait des pasteurs, et ont disp

(1) Matth. XXVIII. 19.

montre

c'est ce que l'Ecriture montre. La même Ecriture ne pas moins que les pasteurs qui leur ont succédé ont établi d'autres pasteurs, et leur ont communiqué les clefs. Voilà le droit des apôtres, transmis tout entier et sans réserve à leurs successeurs. Timothée et Tite n'étoient ni apôtres ni évangélistes: cependant écoutez saint Paul, qui dit à l'un : Les choses que tu as entendues de moi entre plusieurs témoins, commets-les à des gens fidèles qui soient suffisans pour enseigner aussi les autres (1). Il dit à l'autre : Que tu établisses des anciens, c'est-à-dire sans difficulté des pasteurs, de ville en ville (2). Les apôtres n'en faisoient pas davantage.

Ainsi il est manifeste que le ministère apostolique, quoique orné accidentellement par des dons extraordinaires et personnels qu'on en peut détacher, étoit dans son fond et dans sa nature le même qui a passé dans leurs successeurs. Et c'est en vain que M. Claude dit : « Il y a donc une grande différence >> entre ces deux ministères : l'un précède l'Eglise, » et l'autre la suit. » Peut-on voir une preuve moins concluante que celle-là? Il est question de savoir si le ministère des apôtres n'est pas le même que celui de leurs successeurs; et pour montrer que ce n'est pas le même, il suppose que celui des successeurs a suivi l'Eglise, au lieu que l'autre l'a précédée. Mais, à moins qu'on ne prouve d'ailleurs que c'étoient deux ministères, je n'ai qu'à lui répondre que le ministère des pasteurs ordinaires a précédé l'Eglise en la personne des apôtres, puisqu'ils ont le même ministère continué. Le ministère d'Aaron avoit sans doute (1) II. Tim. 11. 2. — (2) Tit. 1. 5.

précédé cette église judaïque qui reçut l'ancienne loi après avoir été assemblée en Egypte. En vérité, pourroit-on dire que le ministère d'Aaron étoit différent de celui de ses successeurs, précisément parce que l'un a précédé l'Eglise, et que l'autre la suit?

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M. Claude ajoute : « L'un est immédiatement communiqué par Dieu; l'autre est communiqué » par le moyen des hommes. » J'aimerois autant dire que l'humanité d'Adam n'étoit pas la même humanité que celle de ses enfans, parce que Dieu seul a formé l'un, et que les autres sont venus par une génération successive. Si Jésus-Christ a voulu multiplier et perpétuer le ministère par douze premiers pasteurs, auxquels il ait attaché la génération spirituelle et successive, comme il a multiplié et perpétué le genre humain par un seul homme, en y attachant la génération charnelle et successive, pourquoi faire sur l'un une difficulté qu'on auroit honte de faire sur l'autre?

Continuons d'écouter M. Claude. « L'un a l'indé>> pendance, l'autorité souveraine et l'infaillibilité » pour son partage, l'autre est exposé aux vices, aux » déréglemens, aux erreurs et aux foiblesses humai>>nes, inférieur et dépendant de l'Eglise. L'un est di» vin en toute manière; et l'autre est en partie divin » et en partie humain. » Pour les vices des particuliers, nous avons déjà remarqué qu'ils regardent personnellement les ministres, et non le ministère. Les foiblesses que l'Evangile marque dans les apôtres pendant la vie de Jésus-Christ, ne les empêchoient pas d'être apôtres. Après sa mort, nous voyons en

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