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LETTRES

SUR

L'AUTORITÉ DE L'ÉGLISE.

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SUR

L'AUTORITÉ DE L'ÉGLISE.

LETTRE PREMIÈRE.

Il n'y a qu'une véritable Eglise : celui qui la cherche sincèrement doit prier beaucoup, et se défier de ses pensées.

Il n'y a qu'une seule vraie religion, et qu'une seule Eglise épouse de Jésus-Christ: il n'en a voulu qu'une; les hommes ne sont pas en droit d'en faire plusieurs. La religion n'est pas l'ouvrage du raisonnement des hommes; c'est à eux à la recevoir telle qu'elle leur a été donnée d'en-haut. Un homme peut raisonner avec un autre homme; mais avec Dieu il n'y a qu'à prier, qu'à s'humilier, qu'à écouter, qu'à se taire, qu'à suivre aveuglément. Ce sacrifice de notre raison est le seul usage que nous puissions faire de notre raison même, qui est foible et bornée. Il faut que tout cède quand la raison suprême décide. Encore une fois, Jésus-Christ n'a voulu qu'une seule église et qu'une seule religion : il n'y a donc plus qu'à comparer ensemble l'Eglise nouvelle avec l'ancienne, et celle qui livre l'homme à son orgueil, en le faisant juge, quoiqu'il soit visiblement incapable de juger, avec celle qui use de l'autorité qui lui est promise par son époux, pour fixer les esprits incertains, pour

guider les ignorans, pour humilier les superbes, et pour les réunir tous.

Je reviens au besoin de prier. C'est la prière qui finiroit toutes les disputes. Heureux les hommes que la vanité ne rend point jaloux de leur liberté, qui sont sincèrement neutres entre leur pensée et celle d'autrui, qui se défient de la leur, et qui sont souvent recueillis en silence devant Dieu, pour écouter l'esprit de grâce! Dès qu'on a au dedans de soi cet esprit humble et pacifique, on est bien avancé : on sent d'abord, sans controverse, que c'est dans le sein de l'Eglise catholique qu'on devient petit, et qu'on apprend à mourir à soi, pour vivre dans la dépendance.

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LETTRE II.

Nécessité d'une autorité visible, pour réunir et fixer tous les esprits.

Je prie Dieu de tout mon cœur qu'il vous fasse sentir combien les hommes les plus éclairés ont besoin d'humilier leur esprit sous une autorité visible. Les mystères nous sont proposés pour dompter notre raison, et pour la sacrifier à la suprême raison de Dieu. La religion n'est qu'humilité; on n'est digne de la trouver, on ne la pratique même qu'autant qu'on s'abaisse intérieurement, qu'on reconnoît sa foiblesse, et qu'on croit sans comprendre. Quand on entre dans le détail des points contestés, on voit d'abord que nos frères séparés de nous ont voulu justifier leur séparation, en nous imputant des er

reurs

reurs et des idolâtries dont nous sommes infiniment éloignés. Ce détail démontre l'injustice du schisme et la nécessité de se réunir. Mais de plus, il faut toujours revenir au point principal; c'est celui d'une autorité visible qui parle et qui décide, pour soumettre, pour réunir et pour fixer tous les esprits dans une même explication des saintes Ecritures : autrement ce livre divin, qui nous a été donné pour nous humilier, ne serviroit qu'à nourrir notre vaine curiosité, notre présomption, la jalousie de nos opinions et l'ardeur des disputes scandaleuses. Il n'y auroit qu'un seul texte des saintes Ecritures; mais il y auroit autant de manières de les expliquer, autant de religions que de têtes. Que diroit-on d'une république qui auroit des lois écrites, mais où tous les particuliers seroient libres de s'élever au-dessus des décisions des magistrats sur la police? Chacun, le livre des lois en main, voudroit corriger les jugemens des magistrats, et on disputeroit au lieu d'obéir; et, pendant la dispute, le livre des lois, loin de réunir et de soumettre les esprits, seroit lui-même le jouet des vaines subtilités de tous les citoyens. Une telle république seroit dans l'état le plus ridicule et le plus déplorable.

Mais comment peut-on croire que Jésus-Christ, ce divin législateur de l'Eglise, l'ait abandonnée à ce désordre, que le moins prudent de tous les hommes n'auroit pas manqué de prévoir et de prévenir? H faut donc une autorité qui vive, qui parle, qui décide, qui explique le texte sacré, et qui soumette tous ceux qui veulent l'expliquer à leur mode : quand on est présomptueux, on supporte impatiem

FÉNÉLON. II.

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