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Qu'au Livre du Deftin les mortels peuvent lire.
Mais ce Livre qu'Homere & les fiens ont chanté
Qu'est-ce que le hazard parmi l'Antiquité,
Et parmi nous la Providence?

Or du hazard il n'eft point de fcience.
S'il en étoit, on auroit tort,

De l'appeller hazard, ni fortune, ni fort,
Toutes chofes tres-incertaines.

Quant aux volontez fouveraines

De celui qui fait tout, & rien qu'avec deffein,
Qui les fçait que lui feul? comment lire en fon fein?
Auroit-il imprimé fur le front des étoiles

Ce que la nuit des temps enferme dans les voilest
A quelle utilité? pour exercer l'efprit

De ceux qui de la Sphere & du. Globe ont écrit?
Pour nous faire éviter des maux inevitables?
Nous rendre dans les biens de plaifir incapables;
Et caufant du dégout pour ces biens prevenus.
Les convertir en maux devant qu'ils foient venus?.
C'eft erreur, ou plutôt c'eft crime de le croire.
Le Firmament fe meut; les Aftres font leur cours
Le Soleil nous luit tous les jours;

Tous les jours fa clarté fuccede à l'ombre noire;:
Sans que nous en puiffions autre chose inferer
Que la neceffité de luire & d'éclairer,

D'amener les faifons, de meurir les femences,
De verfer fur les corps certaines influences.
Du refte, en quoi répond au fort toûjours divers
Ce train toûjours égal dont marche l'Univers?
Charlatans, faifeurs d'horofcope,

Quittez les Cours des Princes de l'Europe.
Emmenez avec vous les foufleurs tout d'un temps.
Vous ne meritez pas plus de foi que ces gens.

Je m'emporte un peu trop; revenons à l'hiftoire De ce Speculateur qui fut contraint de boite... Outre la vanité de fon art menfonger

C'est l'image de ceux qui baaillent aux chimeres, Cependant qu'ils font en danger,

Soit pour eux, foit pour leurs affaires.

XXXVI.

Le Lievre & les Grenouilles.

Ucar que en fougie
UN

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N Lievre en fon gîte fongeoit,
(Car que faire en un gîte à moins que l'on ne fon
ge?)

Dans un profond ennui ce Lievre fe plongedit:
Cét animal eft trifte, & la crainte le ronge.
Les gens de naturel peureux

Sont, difoit-il, bien mal-heureux.

Ils ne fçauroient manger morceau qui leur profite.
Jamais un plaifir pur: toujours affauts divers.
Voila comme je vis: cette crainte maudite
M'empêche de dormir finon les yeux ouverts.
Corrigez-vous, dira quelque fage cervelle.
Et la peur fe corrige t-elle ?

Je crois même qu'en bonne foi
Les hommes ont peur comme moi.
Ainfi raifonnoit nôtre Lievre,

Et cependant faifoit le guet.

Il étoit douteux, inquiet:

Un fouffle, une ombre, un rien,tout lui donnoit la fiè

VIC.

Le

Le melancolique animal

En révant à cette matiere

Entend un leger bruit: ce lui fut un fignal
Pour s'enfuir devers fa taniere.

Il s'en alla paffer fur le bord d'un êtang.
Grenouilles auffi-tôt de fauter dans les ondes.
Grenouilles de rentrer en leurs grottes profondes.
Oh, dit-il, j'en fais faire autant
Qu'on m'en fait faire! ma prefence.
Effraye auffi les gens, je mets l'alarme au camp!
Et d'où me vient cette vaillance?

Comment, des animaux qui tremblent devant moi?
Je fuis donc un foudre de guerre.

Il n'eft, je le vois bien, fi poltron fur la terre, Qui ne puiffe trouver un plus poltron que foi.

XXXVII,

Le Coq & le Renard.

Ur la branche d'un arbre étoit en fentinelle
Un vieux Coq adroit & matois,

SU

Frere, dit un Renard adouciffant fa voix,
Nous ne fommes plus en querelle,

Paix generale cette fois.

Je viens te l'annoncer; décends que je t'embrasse. Ne'me retarde point de grace

Je dois faire aujourd'hui vingt poftes fans manquer, Les tiens & toi pouvez vaquer,

Sans nulle craint affaires :

Nous vous y fervirons en freres.

F 3

Fai

Faites-én les feux dés ce foir.
Et cependant vien recevoir

Le baifer d'amour fraternelle.

Ami; reprit le Coq, je ne pouvois jamais Apprendre une plus douce & meilleure nouvelle, Que celle

De cette paix.

Et ce m'eft une double joye

De la tenir de toi. Je vois deux Levriers
Qui je m'affeure font couriers,

Que pour ce fujet on envoye.

Ils vont vite, & feront dans un moment à nous.
Je defcends; nous pourrons nous entrebaiser tous.
Adieu, dit le Renard: ma traite eft longue à faire.
Nous nous réjouirons du fuccés de l'affaire.
Une autre fois. Le galant auffi-tôt

Tire fes gregues, gagne au haut,
Mal-content de fon ftratageme,
Et nôtre vieux Coq en foi-même
Se mit à rire de fa peur;

Car c'est double plaifir de tromper le trompeur.

XXXVIII.

Le Corbeau voulant imiter Aigle.

Oifeau de Jupiter enlevant un Mouton,
Un Corbeau rémoin de l'affaire,

Er plus foible de reins, mais non pas moins glouton,
En voulut fur l'heure autant faire.

Il tourne à l'entour du troupeau
AUT
E. T

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Marque entre cent Moutons le plus gras, le plus beau, Un vrai Mouton de facrifice."

On l'avoit refervé pour la bouché des Dieux.
Gaillard Corbeau difoit, en le couvant des yeux.
Je ne fçai qui fut ta nourrice;

Mais ton corps me paroit en merveilleux état,
Tu me ferviras de pâture.

Sur l'animal bélant à ces mots il s'abat.
La Moutonniere creature

Pefoit plus qu'un fromage; outre que fa toifon
Etoit d'une épaiffeur extrême,

Et mélée à peu prés de la même façon
Que la barbe de Polipheme.

Elle empétra fi bien les ferres du Corbeau,
Que le pauvre animal ne pût faire retraitte;
Le Berger vient, le prend, l'encage bien & beau,
Le donne à fes enfans pour fervir d'amufette.
Il faut fe mesurer, la confequence eft nette.
Mal prend aux Volereaux de faire les voleurs."
L'exemple eft un dangereux leure.

Tous les mangeurs de gens 'ne font pas grands Seig neurs,

Où la Guefpe a paffé le Moucheron demeure.

XXXIX.

Le Pan fe plaignant à Junon.

E Pan fe plaignoit à Junon.

LDeeffe, difoit-il, ce n'eft pas fans raifon,

Que je me plains, que je murmure;

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