Pour fauver fon credit il faut cacher fa perte. Les voilà fans credit, fans argent, fans reffource, Pour contenter cette cohorte. maint détour Le Buiffon accrochoit les paffans à tous coups: Meffieurs, leut difoit-il, de grace apprenez-nous En quel lieu font les marchandifes Que certains gouffres nous ont prises; Suivi de Sergens à toute heure je connois maint detteur, qui n'eft ni SourisChauve, Ni Buiffon, ni Cañard, ni dans tel cas tombé Mais fimple grand Seigneur, qui tous les jours fe fauve CCXXXIV. La querelle des Chiens L des Chats, & celle des Chats & des Souris: A Difcorde a toûjours regné dans l'univers; Nôtre monde en fournit inille exemples divers, Chez nous cette Déeffe a plus d'un Tributaire. Commençons par les Elemens;; Vous ferez étonnez de voir qu'à tous momens Se font une guerre éternelle? Autrefois un logis plein de Chiens & de Chats, Par cent Arrêts rendus en forme folemnelle, Vit terminer tous leurs débats. Le Maître aiant reglé leurs emplois, leurs repas, Et menacé du fouet quiconque auroit querelle, Ces animaux vivoient entr'eux comme cousins; Cette union fi douce, & prefque fraternelle Edifioit tous les voisins. Enfin elle ceffa. Quelque plat de potage, Quelque os par préférence à quelqu'un d'eux donné,' Fit que l'autre parti s'en vint tout forcené J'ai vu des Croniqueurs attribuer le cas Aux paffe-droits qu'avoit une chienne en géfue Cc 4 Quoi Quoi qu'il en foit, cet altercas Mit en combuftion la falle & la cuisine; Chacun fe déclara pour fon Chat, pour fon Chien. On fit un Reglement dont les Chats fe plaignirent, Et tout le quartier étourdirent. Leur Avocat difoit qu'il faloit bel & bien Recourir aux Arrets. En vain ils les chercherent. Dans un coin où d'abord leurs Agens les cacherent, Les Souris enfin les mangerent. Autre procés nouveau: le peuple Souriquois Et d'ailleurs en voulant à toute cette race, Le Maître du Logis ne s'en trouva que mieux. Ce que je fçais, c'eft qu'aux groffes paroles On en vient fur un rien plus des trois quarts du temps. Humains, il vous faudroit encore à foixante ans CCXXXV. Le Loup & le Renard. 'Où vient que perfonne en la vic DN'eft fatisfait de fon état? Tel Ce qui m'étonne eft qu'à huit ans Les traits dans fa Fable femez, De la chanter fur la Muzette Je ne fuis pas un grand Prophete, Laif Laiffant à part tous ces myfteres, Effaïons de conter la Fable avec fuccez. ༡ Le Renard dit au Loup, Notre cher, pour tous mets J'ai fouvent un vieux Coq, ou de maigres Poulets; C'est une viande qui me laffe. Tu fais meilleure chere avec moins de hazard. J'approche des maifons, tu te tiens à l'écart. Apprens-moi ton métier, Camarade, de grace: Rens-moi le premier de ma race Qui fourniffe fon croc de quelque Mouton gras, Tu ne me mettras_point au nombre des ingrats. Je le veux, dit le Loup: Il m'cft mort un mien frere, T Allons prendre fa peau, tu t'en revêtiras. Repetoit les leçons que lui donnoit fon maître. D'abord il s'y prit mal, puis un peu mieux, puis bien, Puis enfin il n'y manqua rien. A peine il fut inftruit autant qu'il pouvoit l'être. Qu'un Troupeau s'approcha. Le nouveau Loup y court, Et répand la terreur dans les lieux d'alentour. Patrocle mit l'alarme au Camp & dans la Ville. tous. L'oft du Peuple bêlant crut voir cinquante Loups. |