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CCVII.

Le Fermier, le Chien, & le Renard.

E Loup & le Renard font d'étranges voisins:

Lje ne bâtirai point autour de leur demeure.

Ce dernier guettoit à toute heure

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Les poules d'un Fermier; & quoi que des plus fins,
Il n'avoit pu donner d'atteinte à la volaille.
D'une part l'appetit, de l'autre le danger,
N'étoient pas au compere un embarras leger.
Hé quoi, dit-il, cette canaille,
Se moque impunément de moi?

Je vais, je viens, je me travaille,
J'imagine cent tours; le ruftre en paix chez foi
Vous fait argent de tout, convertit en monnoye,
Ses chapons, fa poulaille; il en a même au croc:
Et inoi maître paffé, quand j'atrape un vieux coq,
Je fuis au comble de la joye!

Pourquoi Sire Jupin m'a-t'il donc appellé-
Au métier de Renard? je jure les puiffances
De l'Olimpe & du Stix, il en fera parlé.
Roulant en fon cœur ces vengeances,

Il choifit une nuit liberale en pavots:
Chacun étoit plongé dans un profond repos;
Le Maître du logis, les valets, le chien même,
Poules, poulets, chapons, tout dorioit, le Fermier
Laillant ouvert fon poulailler,

Commit une fottife extrême.

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Le voleur tourne tant qu'il entre au lieu guetté;
Le dépeuple, remplit de meurtres la cité:
Les marques de fa cruauté,
Parurent avec l'Aube: on vid un étalage
De corps fanglans, & de carnage.
Peu s'en falut que le Soleil

Ne rebrouflat d'horreur vers le manoir liquide.
Tel, & d'un fpectacle pareil,

Apollon irrité contre le fier Atride

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Joncha fon camp de morts: on vid prefque détruit L'oft des Grecs, & ce fut l'ouvrage d'une nuit. Tel encore autour de fa tente

Ajax à l'ame impatiente

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De moutons, & de boucs fit un vaste debris, Croiant tuer en eux fon concurrent Uliffe, Et les autheurs de l'injustice

Par qui l'autre emporta le prix. Le Renard autre Ajax aux volailles funefte, Emporte ce qu'il peut, laiffe étendu le refte. Le Maître ne trouva de recours qu'à crier Contre fes gens, fon chien; c'est l'ordinaire ufage, Ah maudit animal qui n'es bon qu'à noier, Que n'avertiffois-tu dés l'abord du carnage? Que ne l'évitiez-vous? c'eut été plûtot fait. Si vous Maître & Fermier à qui touche le fait, Dormez fans avoir foin que la porte foit clofe, Voulez-vous que moi chien qui n'ai rien à la chofe, Sans aucun interêt je perde le repos br Ce chien parloit tres-à propos Son raifonnement pouvoit étre Fort bon dans la bouche d'un Maitre; Mais n'étant que d'un fimple chien, On trouva qu'il ne valoit rien irudie CY

On

On yous fangla le pauvre drille. Toi donc, qui que tu fois, ô peré de famille, (Et je ne t'ai jamais envié cét honneur,)

T'attendre aux yeux d'autrui, quand tu dors, c'eft er

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Couche-toi le dernier,, & voi fermer ta porte.
Que fi quelque affaire t'importé,
Ne la fais point par procureur

J

CCVIII.

367

Le fonge d'un habitant du Mogol.

Adis certain Mogol vid en fongé un Vizir,
Aux champs Elifiens poffeffeur d'un plaifir,
Auffi pur qu'infini, tant en prix qu'en durée;
Le même fongeur vid en une autre contrée
Un Hermite entourné de feux,

Qui touchoit de pitié même les malheureux.
Le cas parut étrange, & contre l'ordinaire,
Minos en ces deux morts fembloit s'étre inépris.'
Le dormeur s'éveilla tant il en fut furpris:
Dans ce fonge pourtant foupçonnant du mystere,
Il fe fit expliquer l'affaire.

L'Interprete lui dit: Ne vous étonnez point,
Vôtre fonge a du fens, & fi j'ai fur ce point
Aquis tant foit peu d'habitude,

C'est un avis des Dieux. Pendant l'humain féjour
Ce Vizir quelquefois cherchoit la folitude;
Cét Hermite aux Vizirs alloit faire fa cour.

Si j'ofois ajoûter au mot de l'interprete,
J'infpirerois ici l'amour de la retraite :

Elle offre à fes amans des biens fans embarras,
Biens purs, prefens du Ciel, qui naiffent fous les pas:
Solitude où je trouve une douceur secrete,

Lieux que j'aimai toûjours, ne pourrai-je jamais,
Loin du monde & du bruit goûter l'ombre & le frais ?
O qui m'arrétera fous vos fombres aziles?
Quand pourront le nouf Sœurs, loin des cœurs &
des Villes,

M'occuper tout entier, & m'apprendre des Cieux
Les divers mouvemens inconnus à nos yeux,
Les noms & les vertus de ces clartez errantes,
Par qui font nos deftins & nos mœurs differentes?
Que li je ne suis né pour de fi grands projets,
Du moins que les ruiffeaux m'offrent de doux objets!
Que je peigne en mes Vers quelque rive fleurie!!
La Parque à filets d'or n'ourdira point ma viec;
Je ne dormirai point fous de riches lambris.
Mais voit-on que le fomme en perde de fon prix,
En eft il moins profond, & moins plein de délices?
Je lui vouë au desert de nouveaux facrifices.
Quand le moment viendra d'aller trouver les morts,
J'aurai vêcu fans foins, & mourrai fans remords.

CCIX. Le

CCIX.

Le Lion, le Singe, les deux Anes.

E Lion, pour bien gouverner,
Voulant apprendre la morale,
Se fit un beau jour amener

Le Singe maître és arts chez la gent animale.
La premiere leçon que donna le Regent,
Fut celle-ci: Grand Roi, pour regner fagement,
Il faut que tout Prince prefere
Le zele de l'Etat à certain mouvement,
Qu'on appelle communément,

Amour propre; car c'eft le pere,
C'est l'autheur de tous les défauts,
Que l'on remarque aux animaux.
Vouloir que de tout poinct ce fentiment vous quitte,
Ce n'est pas chofe fi petite

Qu'on en vienne à bout en un jour:

C'est beaucoup de pouvoir moderer cet amour.
Par là vôtre perfonne augufte

N'admettra jamais rien en foi
De ridicule ni d'injuste.
Donne moi, repartit le Roi,
Des exemples de l'un & l'autre.
Toute efpece, dit le Docteur,
(Et je commence par la nôtre)
Toute profeffion s'eftime dans fon cœur,
Traite les autres d'ignorantes,
Y 5

Les

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