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La fotte vanité de ce jargon frivole.

Le Pâtre dit: Amis, vous parlez bien; mais quoi, Le mois a trente jours, jufqu'à cette écheance Jeûnerons-nous par votre foi?

Vous me donnez une efperance.
Belle, mais éloignée, & cependant j'ai faim.
Qui pourvoira de nous au dîner de demain?
Ou plûtôt fur quelle aflurance
Fondez-vous, dites moi, le fouper d'aujourd'hui ?
Avant tout autre c'est celui

Dont il s'agit: vôtre science
Eft courte là-deffus; ma main y fupplera.
A ces mots le Pâtre s'en va

Dans un bois; il y fit des fagots dont la vente,
Pendant cette journée & pendant la fuivante,
Empécha qu'un long jeûne à la fin ne fit tant
Qu'ils allaffent là bas exercer leur talent.
Je conclus de cette avanture,

Qu'il ne faut pas tant d'art pour conferver fes jours;
Et grace aux dons de la nature,

La main eft le plus feur & le plus prompt fecours.

CCV. Le

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Ultan Leopard autrefois

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Eut, ce dit-on, par mainte aubeine,

Force bœufs dans fes prez, force Cerfs dans fes bois, Force moutons parmi la plaine.

Il nâquit un Lion dans la forest prochaine. Aprés les complimens & d'une & d'autre part, Comme entre grands il fe pratique,

Le Sultan fit venir fon Vifir le Renard,
Vieux routier & bon politique.

Ta crains, ce lui dit-il, Lionceau mon voifin:
Son pere eft mort, que peut-il faire?
Plains plutot le pauvre orphelin.

Il a chez lui plus d'une affaire;

Et devra beaucoup au destin

S'il garde ce qu'il a fans tenter de conquête.
Le Renard dit branlant la tête:

Tels orphelins, Seigneur, ne me font point pitié;
Il faut de celui-ci conferver l'amitié,

Ou s'efforcer de le détruire,
Avant que la griffe & la dent

Lui foit crue, & qu'il foit en état de nous nuire:
N'y perdez pas un feul moment.

J'ai fait fon horofcope: il croitra par la guerre, Ce fera le meilleur Lion

Pour les amis qui foit fur terre,

Tâchez donc d'en être, finon

Tâchez de l'affoiblir. La harangue fut vaine.
Le Sultan dormoit lors; & dedans son domaine
Chacun dormoit auffi, bétes, gens; tant qu'enfin
Le Lionceau devient vrai Lion. Le tocfin
Sonne auffi-tôt fur lui; l'alarme se promeine
De toutes parts; & le Vifir
Confulté là-deffus dit avec un foûpir:

Pourquoi l'irritez-vous? la chofe eft fans remede-
En vain nous appellons mille gens à notre aide.
Plus ils font, plus il coûte, & je ne les tiens bons
Qu'à manger leur part des moutons.
Appaifez le Lion: feul il paffe en puiffance
Ce monde d'alliez vivans fur notre bien :
Le Lion en a trois qui ne lui coûtent rien,
Son courage, fa force, avec fa vigilance.
Jettez-lui promptement fous la griffe un mouton;
S'il n'en eft pas content jettez en davantage.
Joignez-y quelque boeuf: choififfez pour ce don
Tout le plus gras du paturage.
Sauvez le reste ainfi. Ce confeil ne plut pas,
Il en print mal, & force Etats
Voifins du Sultan en pâtirent;
Nul n'y gagna; tous y perdirent.
Quoi que fit ce monde ennemi,
Celui qu'ils craignoient fut le maître.
Propofez-vous d'avoir le Lion pour ami
Si vous voulez le laiffer craitre.

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CCVI.

Pour Monfeigneur le Duc du Maine.

J

Upiter eut un fils qui fe fentant du lieu
Dont il tiroit fon origine.

Avoit l'ame toute divine.

L'enfance n'aime rien: celle du jeune Dieu
Faifoit fa principale affaire

Des doux foins d'aimer & de plaire.
En lui l'amour & la raifon

Devancerent le temps, dont les ailes legeres
N'amenent que trop-tôt, helas! chaque faifon.
Flore aux regards riants, aux charmantes manieres
Toucha d'abord le cœur du jeune Olimpien.
Ce que la paffion peut infpirer d'adreffe,
Sentimens délicats & remplis de tendreffe,
Pleurs, foûpirs, tout en fut: bref il n'oublia rien.
Le fils de Jupiter devoit par fa naiffance
Avoir un autre efprit & d'autres dons des Cieux,
Que les enfans des autres Dieux.

Il fembloit qu'il n'agît que par réminiscence,
Et qu'il eut autrefois fait le métier d'amant,
Tant il le fit parfaitement.

Jupiter cependant voulut le faire inftruire.
Il affembla les Dieux, & dit; J'ai fçu conduire
Seul & fans compagnon jufqu'ici l'Univers:
Mais il eft des emplois divers
Qu'aux nouveaux Dieux je diftribuë.
Y 2

Sur

Sur cet enfant cheri j'ay donc jetté la veuë.
C'eft mon fang: tout eft plein déja de fes Autels.
Afin de mériter le rang des Immortels,

Il faut qu'il fçache tout. Le maître du Tonnerre
Eut à peine achevé que chacun applaudit.
Pour fçavoir tout, l'enfant n'avoit que trop d'efprit.
Je veux, dit le Dieu de la guerre,

Lui montrer moi-même cet art
Par qui maints Heros ont eu part
Aux honneurs de l'Olimpe, & groffi cét empire.
Je ferai fon maître de lyre,

Dit le blond & docte Apollon.

Et moi, reprit Hercule à la peau de Lion,
Son maitre à furmonter les vices,

A domter les transports, monftres empoifonneurs,
Comme Hydres renaiffans fans ceffe dans les cœurs.
Ennemi des molles délices,

Il apprendra de moi les fentiers peu battus
Qui meinent aux honneurs fur les pas des vertus.
Quand ce vint au Dieu de Cythere,

Il dit qu'il lui montreroit tout.

L'amour avoit raifon: de quoi ne vient à bout L'efprit joint au defir de plaire?

CCVII. Le

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