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En auray-je? reprit le Rat.
Je jure éternelle alliance

Avec toy, repartit le Chat.
Difpofe de ma griffe, & fois en afsurance:
Envers & contre tous je te protegeray.
Et la Belette mangeray.

Avec l'époux de la Chouette.

Ils t'en veulent tous deux. Le Rat dit: Idiot!
Moy ton liberateur? je ne fuis pas fi fot.
Puis il s'en va vers fa retraite.
La Belette étoit prés du trou.

Le Rat grimpe plus haut; il y void le Hibou:
Dangers de toutes parts; le plus preffant l'emporte.
Ronge-maille retourne au Chat, & fait en forte
Qu'il détache un chaifnon, puis un autre & puis tant
Qu'il dégage enfin l'hypocrite.
L'homme paroit en cet inftant.

Les nouveaux alliez prennent tous deux la fuite.
A quelque-temps de là nôtre Chat vit de loin
Son Rat qui fe tenoit à l'erte & fur fes gardes.
Ah! mon frere, dit-il, vien m'embraffer; ton foin
Me fait injure; Tu regardes

Comme ennemy ton allié.

Penfes-tu que j'aye oublié

Qu'aprés Dieu je te dois la vie?

Et moy, reprit le Rat, penfes-tu que j'oublie
Ton naturel? aucun traité

Peut-il forcer un Chat à la reconnoiffance;
S'affure-t-on fur l'alliance

Qu'a faite la neceffité ?

CLXIV. Les

A

CLXIV.

Le Torrent & la Riviere.

Vec grand bruit & grand fracas

Un Torrent tomboit des montagnes:

Tout fuyoit devant luy; l'horreur fuivoit fes pas; Il faifoit trembler les campagnes.

Nul voyageur n'ofoit paffer

Une barriere fi puiffante:

Un feul vit des voleurs, & fe fentant preffer,
Il mit entre cux & luy cette onde menaçante.
Ce n'étoit que menace, & brait, fans profondeur;
Nôtre homme enfin n'eut que la peur.

Ce fuccés luy donnant courage,

Et les mêmes voleurs le pourfuivant toûjours,
Il rencontra fur fon paffage

Une Riviere dont le cours

Image d'un fommeil doux, paifible & tranquille
Luy fit croire d'abord ce trajet fort facile.
Point de bords efcarpez, un fable pur & net.
Il entre, & fon cheval le meti

A couvert des voleurs, mais non de l'onde noire:
Tous deux au Styx allerent boire;
Tous deux à någer malheureux
Allerent traverfer au fejour tenebreux,
Bien d'autres fleuves que les nôtres,
Les gens fans bruit font dangereux;
Il n'en eft pas ainfi des autres.

CLXV. L'E

CLXV.

L'Education.

Aridon & Cefar, freres dont l'origine
Venoit de chiens fameux, beaux, bienfaits &
hardis,

A deux maîtres divers échûs au temps jadis
Hantoient, l'un les forests, & l'autre la cuifine.
Ils avoient eu d'abord chacun un autre nom;
Mais la diverse nourriture

Fortifiant en l'un cette heureuse nature.
En l'autre l'alterant, un certain marmiton
Nomma celui-ci Laridon:

Son frere ayant couru mainte haute avanture,
Mis maint Cerf aux abois, maint Sanglier abatu,
Fut le premier Cefar que la gent chienne ait eu.
On cut foin d'empécher qu'une indigne maîtresse
Ne filt en fes enfans dégenerer fon fang:
Laridon négligé témoignoit fa tendrelle
A l'objet le premier paffant.

Il peupla tout de fon engeance:

Tourne-broches par luy rendus communs en France
Y font un corps à part, gens fuyans les hazards,
Peuple antipode des Cefars.:

On ne fuit pas toûjours fes ayeux ni fon pere:
Le peu de foin, le temps, tout fait qu'on dégenere:
Faute de cultiver la nature & fes dons,

O combien de Cefars deviendront Laridons!

CLXVI. Les

CLXVI. 11)

Les deux Chiens l'Ane mort,

Es vertus devroient étre fours,
Ainfi que les vices font freres?

Dés que l'un de ceux-ci s'empare de nos cœurs,
Tous viennent à la file, il ne s'en manque gueres;
J'entends de ceux qui n'étant pas contraires
Peuvent loger fous méme toit.

A l'égard des vertus, rarement on les voit
Toutes en un fujet eminemment placées
Se tenir par la main fans étre difperfécs.
L'un eft vaillant, mais prompt; l'autre eft prudent,
mais froid.

Parmi les animaux le Chien fe pique d'étre
Soigneux & fidele à fon maître.
Mais il eft fot, il eft gourmand,

Témoin ces deux mâtins qui dans l'éloignement
Virent un Ane mort qui flotoit fur les ondes.
Le vent de plus en plus l'éloignoit de nos Chiens.
Amy, dit l'un, tes yeux font meilleurs que les miens.
Porte un peu tes regards fur ces plaines profondes.
J'y crois voir quelque chofe: Eft-ce un Boeuf, un Che-
val?

Hé qu'importe quel animal?

Dit l'un de ces mâtins; voilà toujours curée.
Le point eft de l'avoir; car le trajet eft grand;"
Et de plus il nous faut nager contre le vent.
Beuvons toute cette cau; nôtre gorge alterée

En

En viendra bien à bout: ce corps demeurera
-Bien-tôt à fec, & ce fera
Provifion pour la femaine.

Voilà mes Chiens à boire; ils perdirent l'haleine,
Et puis la vie; ils firent tant

Qu'on les vit crever à l'inftant.

L'homme eft ainfi bâti: Quand un fujet l'enflame L'impoffibilité difparoit à fon ame.

Combien fait-il de voeux, combien perd-il de pas?
S'outrant pour acquérir des biens ou de la gloire?
Si j'arrondiffois mes Etats!

Si je pouvois remplir mes coffres de ducats!
Si j'apprenois l'hebreu, les fciences, l'hiftoire!
Tout cela c'eft la mer à boire;

Mais rien à l'homme ne fuffit:

Pour fournir aux projets que forme un feul efprit,
Il faudroit quatre corps? encor loin d'y fuffire
A my-chemin je crois que tous demeureroient :
Quatre Methufalems bout à bout ne pourroient
Mettre à fin ce qu'un feul defire.

Q

CLXVII.

Democrite & les Abderitains.

Ue j'ay toujours hay les penfers du vulgaire! Qu'il me femble profane, injufte, & temeraire, Mettant de faux milieux entre la chofe & luy, Et mefurant par foy ce qu'il voit en autruy! Le maître d'Epicure en fit l'apprentissage.

Son

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