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Jugez fi chacun s'y trouva.
Le Prince aux cris s'abandonna.

Et tout fon antre en réfonna.

Les Lions n'ont point d'autre temple.
On entendit à fon exemple

Rugir en leur patois Meffieurs les Courtisans,
Je definis la Cour un pais où les gens
Triftes, gais, prefts à tout, à tout indifferens,
Sont ce qu'il plaift au Prince, ou s'ils ne peuvent l'étre,
Tâchent au moins de le parêtre,

Peuple caméleon, peuple finge du maître;
On diroit qu'un efprit anime mille corps;
C'est bien là que les gens font de fimples refforts.
Pour revenir à nôtre affaire,

Le Cerf ne pleura point, comment eut-il pu faire?
Cette mort le vengcoit; la Reine avoit jadis
Etranglé fa femme & fon fils.

Bref il ne pleura point. Un flateur l'alla dire,
Et foûtint qu'il l'avoit veu rire.

La colere du Roi, comme dit Salomon,
Eft terrible, & fur tout celle du Roi Lion.
Mais ce Cerf n'avoit pas accoutumé de lire.
Le Monarque lui dit, Chetif hôte des bois,
Tu ris, tu ne fuis pas ces gemiffantes voix.
Nous n'appliquerons point fur tes membres profanes
Nos facrez ongles, venez Loups
Vengez la Reine, immolez tous

Ce traître à fes auguftes manes.

Le Cerf reprit alors: Sire; le temps des pleurs
Eft paffé; la douleur eft ici fuperfluë.

Vôtre digne moitié couchée entre des fleurs,
Tout prés d'ici m'est apparue;

Et je l'ai d'abord reconnue.

Ami, m'a-t-elle dit, garde que ce convoi,
Quand je vais chez les Dieux, ne t'oblige à des larmes
Aux champs Elifiens j'ai goûté mille charmes,
Converfant avec ceux qui font faints comme moi
Laiffe agir quelque-temps le defespoir du Roi.
J'y prens plaifir. A peine on eut ouï la chose,
Qu'on fe mit à crier, Miracle, Apotheofe.
Le Cerf eut un prefent, bien loin d'étre puni.
Amufez les Rois par des fonges,

Flatez-les, payez-les d'agreables menfonges,
Quelque indignation dont leur cœur foit rempli,
Ils gobcront l'appât, vous ferez leur ami.

CLVI.

Le Rat & l'Elephant.

(Ecroire un perfonnage, eft fort commun en Fran

SE cr

ce:

On y fait l'homme d'importance,

Et l'on n'eft fouvent qu'un Bourgeois :
C'eft proprement le mal François.

La fotte vanité nous eft particuliere.

Les Espagnols font vains, mais d'une autre maniere.
Leur orgueil me femble en un mot
Beaucoup plus fou, mais pas fi fot.
Donnons quelque image du notre

Qui fans doute en vaut bien un autre.
Un Rat des plus petits voyoit un Elephant
Des plus gros, & railloit le marcher un peu lent
De la béte de haut partage,

Qui marchoit à gros équipage.

Sur

Sur l'animal à triple étage

Une Sultane de renom,

Son Chien, fon Chat, & fa Guenon, Son Perroquet, fa vieille, & toute fa maison, S'en alloit en pelerinage.

Le Rat s'étonnoit que les gens

Fuffent touchez de voir cette pefante maffe: Comme fi d'occuper ou plus ou moins de place, Nous rendoit, difoit-il, plus ou moins importans. Mais qu'admirez-vous tant en lui vous autres hommes?

Seroit-ce ce grand corps, qui fait peur aux enfans? Nous ne nous prisons pas, tout petits que nous fom

mes,

D'un grain moins que les Elephans.
Il en auroit dit davantage;

Mais le Chat fortant de fa cage,
Lui fit voir en moins d'un instant
Qu'un Rat n'est pas un Elephant.

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Un pere cut pour toute lignée

Un fils qu'il aima trop, jufques à confulter
Sur le fort de fa geniture,

Les difeurs de bonne avanture.

Un de ces gens lui dit; que des Lions fur tout

Il éloignaft l'enfant jufques à certain age;
Jufqu'à vingt ans, point davantage.
Le pere pour venir à bout

D'une précaution fur qui rouloit la vie
De celui qu'il aimoit, défendit que jamais
On lui laiffaft paffer le feuil de fon Palais.
Il pouvoit fans fortir contenter fon envie,
Avec fes compagnons tout le jour badiner,
Sauter, courir, fe promener.

Quand il fut en l'âge où la chaffe
Plaist le plus aux jeunes efprits,
Cet exercice avec mépris

Lui fut dépeint: mais quoi qu'on faffe,
Propos, confeil, enfeignement,

Rien ne change un temperament.
Lejeune homme inquiet, ardent, plein de courage,
A peine fe fentit des bouillons d'un tel âge,
Qu'il foûpira pour ce plaifir.

Plus l'obftacle étoit grand, plus fort fut le defir.
Il favoit le fujet des fatales défenses;
Et comme ce logis plein de magnificences,
Abondoit par tout en tableaux,

Et que la laine & les pinceaux
Traçoient de tous coftez chaifes & païfages,
En cet endroit des animaux,

En cet autre des perfonnages,

Le jeune homme s'émeut voiant peint un Lion. Ah! monftre, cria-t-il, c'eft toi qui me fais vivre Dans l'ombre & dans les fers. A ces mots il fe livre Aux tranfports violens de l'indignation,

Porte le poing fur l'innocente béte. Sous la tapifferie un clou fe rencontra. Ce clou le bleffe, il penetra

Juf.

Jufqu'aux refforts de l'ame; & cette chere tefte
Pour qui l'art d'Efculape en vain fit ce qu'il put,
Deut fa perte à ces foins qu'on prit pour fon falut.
Méme precaution nuifit au Poëte Æfchile.
Quelque Devin le menaça, dit-on,
De la cheute d'une maison.
Auffi-tôt il quitta la ville,

Mit fon lit en plein champ, loin des toits, fous les
Cieux.

1

Un Aigle qui portoit en l'air une Tortuë,
Pafla par là, vit l'homme, & fur fa téte nuë,
Qui parut un morceau de rocher à fes yeux,
Etant de cheveux dépourveuë,

Laiffa tomber fa proye, afin de la caffer:
Le pauvre Æfchile ainfi fceut fes jours avancer.
De ces exemples il refulte,

Que cet art, s'il eft vrai, fait tomber dans les maux,
Que craint celui qui le confulte.

Mais je l'en juftifie, & maintiens qu'il eft faux: Je ne crois point que la Nature

Se foit lié les mains, & nous les lie encor, Jufqu'au point de marquer dans les Cieux nôtre fort. Il dépend d'une conjoncture

De lieux, de perfonnes, de temps;

Non des conjonctions de tous ces charlatans. Ce Berger & ce Roi font fous même Planete; L'un d'eux porte le fceptre & l'autre la houlete: Jupiter le vouloit ainfi.

Qu'eft-ce que Jupiter? un corps fans connoiffance. D'où vient donc que fon influence,

Agit differemment fur ces deux hommes cy? Puis comment penetrer jufques à nôtre monde? Comment percer des airs la campagne profonde?

Per

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