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Qu'on ne fe plaindra de rien.

Le Ciel eut pour ces voeux une bonté cruelle.
Souvent fa complaifance a de méchants effets.
Il devroit étre fourd aux aveugles fouhaits.
Il ne le fut pas lors: & la guide nouvelle,
Qui ne voioit au grand jour,

Pas plus clair que dans un four,
Donnoit tantot contre un marbre,
Contre un paffant, contre un arbre.
Droit aux ondes du Styx elle mena fa fœur.
Malheureux les Etats tombez dans fon erreur.

CXLI.

Du Animal dans la Lune.

Endant qu'un Philofophe affure,

que toûjours par leurs fens les hommes font dupez, Un autre Philofophe jure.

Qu'il ne nous ont jamais trompez.

Tous les deux ont raifon; & la Philofophie
Dit vrai, quand elle dit, que les fens tromperont
Tant que fur leur rapport les hommes jugeront;
Mais auffi fi l'on rectifie

L'image de l'objet fur fon éloignement,
Sur le milieu qui l'environne,
Sur l'organe, & fur l'inftrument,

Les fens ne tromperont perfonne.

La Nature ordonna ccs chofes fagement:
J'en dirai quelque jour les raifons amplement.
J'apperçois le Soleil; quelle en eft la figure;

Ici bas ce grand corps n'a que trois pieds de tour:
Mais fi je le voyois là haut dans fon fejour,
Que feroit-ce à mes yeux que l'œil de la nature?
Sa diftance me fait juger de fa grandeur;
Sur l'angle & les côtez ma main la détermine:
L'ignorant le croit plat, j'épaiffis fa rondeur:
Je le rends immobile, & la terre chemine.
Bref je déments mes yeux en toute fa machine.
Ce fens ne me nuit point par fon illusion.
Mon ame en toute occafion
Développe le vrai caché fous l'apparence..
Je ne fuis point d'intelligence

Avecque mes regards peut-étre un peu trop prompts,
Ni mon oreille lente à m'apporter les fons.
Quand l'eau courbe un bâton ma raifon le redreffe,
La raifon décide en maîtreffe.

Mes yeux, moyennant ce fecours,

Ne me trompent jamais en me mentant toûjours.
Si je crois leur rapport, erreur affez commune,
Une téte de femme eft au corps de la Lune.
Y peut-elle étre? Non. D'où vient donc cet objet?
Quelques lieux inégaux font de loin cet effet.
La Lune nulle part n'a fa furface unie:
Montueufe en des lieux, en d'autres applanie,
L'ombre avec la lumiere y peut tracer fouvent
Un homme, un Boeuf, un Elephant.
N'aguere l'Angleterre y vid chofe pareille.
La lunette placée, un animal nouveau
Parut dans cet astre si beau;

Et chacun de crier merveille.

Il étoit arrivé là haut un changement,

Qui préfageoit fans doute un grand évenement.
Savoit-on fi la guerre entre tant de Puiffances
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N'en

N'en étoit point l'effet? Le Monarque accourut;
Il favorife en Roi ces hautés connoiffances.
Le Monftre dans la Lune à fon tour lui parut.
C'étoit une Souris cachée entre les verres :
Dans la lunette étoit la fource de ces guerres.
On en rit: Peuple heureux, quand pourront les Fran-
çois

Se donner comme vous entiers à ces emplois ?
Mars nous fait recueillir d'amples moiffons de gloire:
C'est à nos ennemis de craindre les combats,
A nous de les chercher, certains que la victoire
Amante de Louis fuivra par tout les pas.

Ses lauriers hous rendront celebres dans l'Histoire.
Même les filles de memoire

Ne nous ont point quitez: nous goûtons des plaifirs:
La paix fait nos fouhaits, & non point nos foûpirs.
Charles en fçait joüir: Il fçauroit dans la guerre
Signaler fa valeur, & mener l'Angleterre
A ces jeux qu'en repos elle voit aujourd'hui.
Cependant s'il pouvoit appaifer la querelle,
Que d'encens! Eft-il rien de plus digne de lui!
La carriere d'Augufte a-t-elle été moins belle
Que les fameux exploits du premier des Cefars?
O peuple trop heureux, quand la paix viendra-t-elle
Nous rendre comme vous tout entiers aux beaux arts?

CXLII. La

CXLII.

La mort & le mourant.

A mort ne furprend point le fagc;
Il cft toûjours prêt à partir,
S'étant fceu lui-même avcrtir,

Du temps où l'on fe doit refoudre à ce paffage.
Ce temps, helas! embraffe tous les temps';
Qu'on le partage en jours, en heures, en momens
Il n'en eft point qu'il ne comprenne

Dans le fatal tribut; tous font de fon domaine;
Et le premier inftant où les enfans des Rois
Ouvrent les yeux à la lumiere,

Eft celui qui vient quelquefois
Fermer pour toûjours leur paupiere.
Défendez vous par la grandeur,
Alleguez la beauté, la vertu, la jeuneffe;
La mort ravit tout fans pudeur.
Un jour le monde entier accroîtra fa richeffe.
Il n'eft rien de moins ignoré,

Et puis qu'il faut que je le die,
Rien où l'on foit moins preparé.

Un mourant qui contoit plus de cent ans de vie,
Se plaignoit à la mort que précipitamment
Elle le contraignoit de partir tout à l'heure,
Sans qu'il eût fait fon teftament,
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Sans

Sans l'avertir au moins. Eft-il jufte qu'on meure
Au pied levé? dit-il: attendez quelque peu.
Ma femme ne veut pas que je parte fans elle;
Il me reste à pourvoir un arriere neveu;
Souffrez qu'à mon logis j'ajoûte encore une aisle.
Que vous étes preffante, & Deeffe cruelle!
Vieillard, lui dit la Mort, je ne t'ai point surpris.
Tu te plains fans raifon de mon impatience.
Eh! n'as-tu pas cent ans trouve moi dans Paris
Deux mortels auffi vieux, trouve m'en dix en France.
Je devois, ce dis tu, te donner quelque avis
Qui te difpofat à la chofe:

J'aurois trouvé ton teftament tout fait,
Ton petit fils pourveu, ton bastiment parfait;
Ne te donna-t-on pas des avis quand la caufe
Du marcher & du mouvement,

Quand les efprits, le fentiment,

Quand tout faillit en toi? Plas de gouft, plus d'oüie.
Toute chofe pour toi femble étre évanouie:
Pour toi l'aftre du jour prend des foins fuperflus:
Tu regretes des biens qui ne te touchent plus.
Je t'ai fait voir tes camarades,

Ou morts, ou mourans; ou malades.
Qu'est-ce que tout cela, qu'un avertiffement?
Allons vieillard, & fans replique;

Il n'importe à la Republique;

Que tu faffes ton teftament.

La Mort avoit raison: Je voudrois qu'à cet âge
On fortit de la vie ainfi que d'un banquet,
Remerciant fon hofte, & qu'on fift fon paquet;
Car de combien peut-on retarder le voyage?
Tu murmures vieillard; voi ces jeunes mourir,
Voi les marcher, voi les courir

A des

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