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Ne le valons nous pas? Vous valez cent fois mieux ; Mais que vous fert vôtre merite? --

La Fortune a-t-elle des yeux?

Et puis la Papauté vaut-elle ce qu'on quite,
Le repos, le repos, trefor fi précieux,
Qu'on en faifoit jadis le partage des Dieux.
Rarement la Fortune à fes hôtes le laiffe..
Ne cherchez point cette Déeffe,

Elle vous cherchera; fon sexe en use ainfi.
Certain couple d'amis en un bourg établi,
Poffedoit quelque bien, l'un foûpiroit fans ceffe
Pour la Fortune; il dit à l'autre un jour
Si nous quittions nôtre fejour ?

Vous fçavez que nul n'eft prophete

En fon païs: Cherchons nôtre avanture ailleurs.
Cherchez, dit l'autre ami, pour moi je ne souhaite
Ni climats ni deftins meilleurs.
Contentez-vous; fuivez vôtre humeur inquiete;
Vous reviendrez bien-tôt. Je fais vœu cependant
. De dormir en vous attendant. 948
L'ambitieux, ou fi l'on veut, l'avare,
S'en va par voye & par chemin.

Il arriva le lendemain

En un lieu que devoit la Décffe bizarre Frequenter fur tout autre; & ce lieu c'eft la Cour. Là donc pour quelque-temps il, fixe fon fejour, Se trouvant au coucher, au lever, à ces heures Que l'on fait étre les meilleures;

Bref fe trouvant à tout, & n'arrivant à rien; Qu'eft ceci? ce dit-il; Cherchons ailleurs du bien: La Fortune pourtant habite ces demeures.

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Je la vois tous les jours entrer chez celui-ci
Chez celui-là; D'où vient qu'auffi

1

Je

Je ne puis heberger cette capricieufe?

On me l'avoit bien dit, que des gens de ce lieu
L'on n'aime pas toûjours l'humeur ambitieufe.
Adieu Meffieurs de Cour; Meffieurs de Cour adieu,
Suivez jufques au bout une ombre qui vous flate.
La Fortune a, dit-on, des temples à Surate;
Allons-là. Ce fut un de dire & s'embarquer.
Ames de bronze, humains, celui-là fut fans doute
Armé de diamant, qui, tenta cette route,
Et le premier ofa l'abime défier.

Celui-ci pendant fon voyage

Tourna les yeux vers fon village

Plus d'une fois, effuiant les dangers

Des Pyrates, des vents, du calme & des rochers;
Miniftres de la mort. Avec beaucoup de peines
On s'en va la chercher en des rives lointaines,
evec
La trouvant affez-tot fans quitter la maison.
L'homme arrive au Mogol; on lui dit qu'au Japon
La Fortune pour lors diftribuoit fes graces.
Il y court, les mers étoient laffes
De le porter; & tout le fruit

Qu'il tira de fes longs voyages,

Ce fut cette leçon que donnent les Sauvages.
Demeure en ton païs par la nature inftruit.

I

Le Japon ne fut pas plus heureux à cet homme I

Que le Mogol l'avoit été ;

Ce qui lui fit conclure en fomme,

Qu'il avoit à grand tort fon village quité.
Il renonce aux courfes ingrates,

Revient en fon païs, voit de loin fes pénates,
Pleure de joye, & dit: Heureux qui vit chez foi;
De regler fes defirs faifant tout fon emploi.

Il ne fait que par oui-dire

4

Ce que c'est que la Cour, la mer: & ton empire,
Fortune, qui nous fais paffer devant les yeux
Des dignitez, des biens, que jufqu'au bout du monde
On fuit fans que l'effet aux promeffes réponde,
Deformais je ne bouge, & feray cent fois mieux,
En raisonnant de cette forte.

Et contre la Fortune ayant pris 'cè confeil,
Il la trouve affife à la porte

1

De fon ami plongé dans un profond sommeil.

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Eux Coqs vivoicat en paix, une Poule furvint,
Et voilà la guerre allumée.

Amour, tu perdis Troye; & c'eft de toi que vint
Cette querelle envenimée,

Où du fang des Dieux même on vid le Xante teint.
Longtemps entre nos Coqs le combat fe maintint.
Le bruit s'en répandit par tout le voisinage.
La gent qui porte créte au fpectacle accourut.
Plus d'une Helene au beau plumage
Fut le prix du vainqueur, le vaincu disparut.
Il alla fe cacher au fond de fa retraite,

Pleura fa gloire & fes amours,SS
Ses amours qu'un rival tout fier de fa défaite
Poffedoit à fes yeux. Il voyoit tous les jours..
Čet objet rallumer fa haine & fon courage.
Il aiguifoit fon bec, batoit l'air & fes Blancs,

Et s'exerçant contre les vents!
S'armoit d'une jaloufe rage.

Il n'en eut pas befoin. Son vainqueur far les toits
S'alla percher, & chanter fa victoire.

Un Vautour entendit fa voix ::
Adieu los amours & la gloire.

Tout cet orgueil perit fous l'ongle du Vautour.
Enfin par un fatal retour

Son rival autour de la Poule
S'en revint faire le coquet:
Je laiffe à penfer quel caquets,
Car il eut des femmes en foule.
La Fortune fe plait à faire de grans coups;
Tout vainqueur infolent à fa perte travaille.
Défions-nous du fort, & prenons garde à nous
Aprés le gain d'une bataille.

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M

L'ingratitude l'injustice des hommes envers la Fortune.

N tranfiquant fur mer par bonheur s'enrichit.
It triompha des vents pendant plus d'un voya-
Lege,

Goufre, banc,ni rocher, n'exigea de peage
D'aucun de fes balots; le fort l'en affranchit. 2
Sur tous les compagnons Atropos & Neptune
Recueillirent leur droit, tandis que la Fortune
Prenoit foin d'amener fon marchand à bon port.
Facteurs, affociez, chacun lui fut fidele.

Il vendit fon tabac, fon fucre, fa canele
Ce qu'il voulut, fa porcelaine encor.
Le luxe & la folie enflerent fon tréfor;

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Bref il plût dans fon efcarcelle.

On ne parloit chez luy que par doubles ducats. Et mon homme d'avoir chiens, chevaux, & cabroffes.

Ses jours de jeûne étoient des nopces.
Un fien ami voyant ces fomptueux repas.
Luidit; Et d'où vient donc un fi bon ordinaire?
Et d'où me viendroit il que de mon savoir faire?
Je n'en dois rien qu'à moi, qu'à mes foins, qu'au ta-

De rifquer à propos, & bien placer l'argent.
Le profit lui femblant une fort douce chofe,
Il rifqua de nouveau le gain qu'il avoit fait:
Mais rien pour cette fois ne lui vint à fouhait.
Son imprudence en fut la caufe.

Un vaiffeau mal freté perit au premier vent,
Un autre mal pourveu des armes neceffaires
Fut enlevé par les Corfaires,
Un troifiéme au port arrivant,
Rien n'eut cours ni debit. Le luxe & la folie
N'étoient plus tels qu'auparavant.
Enfin fes facteurs le trompant,

Et lui-même ayant fait grand fracas, chere lie,
Mis beaucoup en plaifirs, en bâtimens beaucoup.
Il devint pauvre tout d'un coup.

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Son ami le voyant en mauvais équipage,
Lui dit: d'où vient cela; de la Fortune, belas!
Confolez-vous, dit l'autre, & s'il ne lui plaît pas
Que vous foiez heureux; tout au moins foiez fage.
Je ne fais s'il crut ce confeil;

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