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CXXII.

Le Charlatan.

E monde n'a jamais manqué de Charlatans,
Cette fcience de tout temps

Fut en Profeffeurs tres-fertile.

Tantot l'un en Theatre affronte l'Acheron:
Et l'autre affiche par la ville
Qu'il eft un Paffe-Ciceron.I
Un des derniers fe vantoit-d'étre
En Eloquence fi grand maître,
Qu'il rendroit difert un badaut,
Un manant, un ruftre, un lourdaut.

Oüy, Meffieurs, un lourdaut; un animal, un Ane?
Que l'on m'ameine up Ane, un Ane renforcé;
Je le rendrai maitre paffé;

Et veux qu'il porte la foutane.

Le Prince fçut la chofe: il manda le Rheteur. J'ay, dit-il, en mon ecurie

Un fort beau Rouffin d'Arcadie:

J'en voudrois faire un Orateur.

Sire, vous pouvez tout, reprit d'abord nôtre homme.
On lui donna certaine fomme.

Il devoit au bout de dix' ans'
Mettre fon Ane fur les bancs:

Sinon il confentoit d'étre en place publique
Guindé la hare au col, étranglé court & net,

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Ayánt au dos fa Rhetorique,

Et les oreilles d'un Baudet.

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Quelqu'un des Courtifans lui dit qu'à la potence
Il vouloit l'aller voir; & que pour un pendu
Il auroit bonne grace, & beaucoup de preftance:
Sur tout qu'il fe fouvint de faire à l'affiftance
Un difcours où fon art fût au long étendu;
Un difcours pathetique, & dont le formulaire
Servît à certains Cicerons

Yulgairement nommez larrons.

L'autre reprit: Avant l'affaire

Le Roy, l'Ane, ou moy nous mourrons.

Il avoit raison. C'eft folie

De compter fur dix ans de vie.

Soions bien beuvans, bien mangeans, Nous devons à la mort de trois l'un en dix ans.

L

CXXIII,

La Difcorde:

A Déeffe Difcorde ayant brouillé les Dieux,
Et fait un grand procés là haut pour une pomme,
On la fit déloger des Cieux.

Chez l'animal qu'on appele Homme
On la receut à bras ouverts,

Elle, & que fi, que non, fon frerë,
Avecque tien & mien, fon pere.
Elle nous fit l'honneur en ce bas Univers
De preferer notre Hemisphere

A celuy des mortels qui nous font oppofez.:
Gens groffiers, pcu civilifez,

Et

Et qui fe mariant fans Prêtre & fans Notaire;
De la Difcorde n'ont que faire.

Pour la faire trouver aux lieux où le befoin
Demandoit qu'elle fût prefente,
La renommée avoit le foin
De l'avertir; & l'autre diligente

Couroit vite aux debats, & prevenoit la paix
Faifoit d'une étincelle un feu long à s'éteindre.
La renommée enfin commença de fe plaindre
Que l'on ne lui trouvoit jamais

De demeure fixe & certaine.

Bien fouvent l'on perdoit à la chercher fa peine.
Il faloit donc qu'elle eût un fejour affecté.
Un fejour d'où l'on pût en toutes les familles
L'envoyer à jour arrêté.

Comme il n'étoit alors aucun Convent de Filles,
On y trouva difficulté.

L'Auberge enfin de l'Hymenée
Lui fut pour maison affignée.

CXXIV.

La jeune Veuve.

A perte d'un époux ne va point fans foupirs. On fait beaucoup de bruit, & puis on fe confole. Sur les aîles du temps la trifteffe s'envole; Le temps rameine les plaifirs..

Entre la Veuve d'une ann

Et la Veuve d'une journée,
N

La difference eft grande. On ne croiroit jamais

Que

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Que ce fut la même perfonne.

L'une fait fuïr les gens, & l'autre a mille attraits:
Aux foûpirs vrais ou faux celle-là s'abandonne:
C'est toujours même note, & pareil entretien :
On dit, qu'on eft inconfolable;
On le dit, mais il n'en eft rien;
Comme on verra par cette Fable,
Ou plûtôt par la verité.

L'Epoux d'une jeune beauté

Partoit pour l'autre monde. A fes côtez fa femme
Lui crioit: Attends-moi; je te fuis; & mon ame
Auffi bien que la tienne, eft prête à s'envoler. ́
Le Mari fait feul le voyage.

La Belle avoit une pere homme prudent & fage;
Il laiffa le torrent couler.

A la fin pour la confoler,

Ma fille, lui dit-il, c'eft trop verfer de larmes : Qu'a befoin le défunt que vous noiez vos charmes? Puifqu'il eft des vivans, ne fongez plus aux morts. Je ne dis pas que tout à l'heure

Une condition meilleure

Change en des nopces ces transports:

Mais aprés certain temps fouffrez qu'on vous propose Un époux beau, bien fait, jeune, & tout autre chofe Que le défunt. Ah! dit-elle auffi-tôt,

Un Cloître eft l'époux qu'il me faut.

Le pere lui laiffa digerer fa difgrace.
Un mois de la forte fe paffe.

L'autre mois, on l'employe à changer tous les jours
Quelque chofe à l'habit, au linge, à la coifure.
Le deüil enfin fert de parure,

En attendant d'autres atours.
Toute la bande des amours

Re

Revient au colombier : les jeux, les ris, la danfo

Ont auffi leur tour à la fin.

On fe plonge foir & matin

Dans la fontaine de Jouvence.

Le Pere ne craint plus ce défunt tant cheri. Mais comme il ne parloit de rien à nôtre Belle, Où donc eft le jeune mari

Que vous m'avez promis, dit-elle ?

EPILOGUE.

Ornons ici cette carriere.

B Les longs ouvrages me font peur.

Loin d'épuifer une matiere
On n'en doit prendre que la fleur.
Il s'en va temps que je reprenne
Un peu de forces & d'haleine.
Pour fournir à d'autres projets.
Amour ce tyran de ma vie
Veut que je change de fujets;
Il faut contenter fon envie.
Rétournons à Pfiché: Damon vous m'exhor.

tez,

A peindre fes mal-heurs & fes felicitez.
J'y confens peut-être ma veine.
En fa faveur s'échauffera.

Heureux fi ce travail eft la derniere peine
Que fon époux me caufera,

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