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Les questions qui divisaient les titulaires n'étaient pas purement théologiques; elles touchaient à des choses qui intéressent les droits respectifs du sacerdoce de l'Empire; elles étaient nées des lois que la puissance civile avait promulguées sur les matières ecclésiastiques. Il n'était pas possible de terminer par les voies ordinaires des dissensions qui, relatives à des objets mêlés avec l'intérêt d'État, et avec les prérogatives de la souveraineté nationale, n'étaient pas susceptibles d'être décidées par un jugement doctrinal, et qui ne pouvaient conséquemment avoir que le triste résultat d'inquiéter la conscience du citoyen, ou de faire suspecter sa fidélité.

Une grande mesure devenait nécessaire. Il fallait arriver jusqu'à la racine du mal, et obtenir simultanément les démissions de tous les titulaires, quels qu'ils fussent. Ce prodige préparé par la confiance que la sagesse du gouverne ment avait su inspirer, et par l'ascendant que l'éclat de ses succès en tout genre lui assurait sur les esprits et sur les cœurs, s'est opéré, avec l'étonnement et l'admiration de l'Europe, à la voix consolante de la religion, et au doux nom de patrie.

Par là tout ce qui est utile et bon est devenu possible; et les sacrifices que la force n'avait jamais pu arracher nous ont été généreusement offerts par le patriotisme, , par la conscience et par la liberté.

Que donne l'État en échange de tous ces sacrifices? Il donne à ceux qui seront honorés de son choix le droit de faire du bien aux hommes, en exerçant les augustes fonctions de leur ministère; et si les raisons supérieures qui ont engagé le gouvernement à diminuer le nombre des offices ecclésiastiques ne lui permettent pas d'employer les talents et les vertus de tous les pasteurs démissionnaires, il n'oubliera jamais avec quel dévouement ils ont contribué au rétablissement de la paix religieuse.

Nous avons dit en commençant que, dès les premières années de la révolution, le clergé catholique fut dépouillé des grands biens qu'il possédait. Le temporel des États étant entièrement étranger au ministère du pontife de Rome, comme à celui des autres pontifes, l'intervention du pape n'était certainement pas requise pour consolider et affermir la propriété des acquéreurs des biens ecclésiastiques. Les ministres d'une religion qui n'est que l'éducation de l'homme pour une autre vie n'ont point à s'immiscer dans les affaires de celle-ci. Mais il a été utile que la voix du chef de l'Église, qui n'a point à promulguer des lois dans la société, pùt retentir doucement dans les consciences, et y apaiser des craintes ou des inquiétudes que la loi n'a pas toujours le pouvoir de calmer. C'est ce qui explique la clause par laquelle le pape, dans sa convention avec le gouvernement, reconnait les acquéreurs des biens du clergé comme propriétaires incommutables de ces biens. Nous ne croyons pas avoir besoin d'entrer dans de plus longs détails sur ce qui concerne la religion catholique. Je ne dois pourtant pas omettre la disposition par laquelle on déclare que cette religion est celle des trois consuls, et de la très-grande majorité de la nation. Mais je dirai en même temps qu'en cela on s'est réduit à énoncer deux faits qui sont incontestables, sans entendre, par cette énonciation, attribuer au catholicisme aucun des caractères politiques qui seraient inconciliables avec notre nouveau système de législation. Le catholicisme est en France, dans le moment actuel, la religion des membres du gouvernement, et non celle du gouvernement même. Il est la religion de la majorité du peuple français, et non celle de l'État. Ce sont là des choses qu'il n'est pas permis de confondre, et qui n'ont jamais été confondues.

Comme la liberté de conscience est le vœu de toutes nos Cultes

lois, le gouvernement, en s'occupant de l'organisation du protestants,

culte catholique, s'est pareillement occupé de celle du culte protestant. Une portion du peuple français professe ce culte, dont l'exercice public a été autorisé en France jusqu'à la révocation de l'Édit de Nantes.

A l'époque de cette révocation, le protestantisme fut proscrit, et on déploya tous les moyens de persécution contre les protestants. D'abord on les chassa du territoire français. Mais comme l'on s'aperçut ensuite que l'émigration était trop considérable et qu'elle affaiblissait l'État, on défendit aux protestants de sortir de France, sous peine des galères. En les forçant à demeurer au milieu de nous, on les déclara incapables d'occuper aucune place et d'exercer aucun emploi; le mariage même leur fut interdit: ainsi une partie nombreuse de la nation se trouva condamnée à ne plus servir Dieu ni la patrie. Est-il sage de précipiter par de telles mesures des multitudes d'hommes dans le désespoir de l'athéisme religieux et dans les dangers d'une sorte d'athéisme politique qui menaçait l'Etat? Espérait-on pouvoir compter sur des hommes que l'on rendait impies par nécessité, que l'on asservissait par la violence, et que l'on déclarait tout à la fois étrangers aux avantages de la cité et aux droits mêmes de la nature?

N'était-il pas évident que ces hommes, justement aigris, seraient de puissants auxiliaires toutes les fois qu'il faudrait murmurer et se plaindre? Ne les forçait-on pas à se montrer favorables à toutes les doctrines, à toutes les idées, à toutes les nouveautés qui pouvaient les venger du passé et leur donner quelque espérance pour l'avenir? Je m'étonne que nos écrivains, en parlant de la révocation de l'édit de Nantes, n'aient présenté cet événement que dans ses rapports avec le préjudice qu'il porte à notre commerce, sans s'occuper des suites morales que le même événement a eues pour la société, et dont les résultats sont incalculables.

Dans la révolution, l'esprit de liberté a ramené l'esprit

de justice, et les protestants, rendus à leur patrie et à leur culte, sont redevenus ce qu'ils avaient été, ce qu'ils n'auraient jamais dû cesser d'être, nos concitoyens et nos frères. La protection de l'État leur est garantie à tous égards comme aux catholiques.

Dans le protestantisme il y a diverses communions. On a suivi les nuances qui les distinguent.

L'essentiel pour l'ordre public et pour les mœurs n'est pas que tous les hommes aient la même religion, mais que chaque homme soit attaché à la sienne; car lorsqu'on est assuré que les diverses religions dont on autorise l'exercice contiennent des préceptes utiles à la société, il est bon que chacune de ces religions soit observée avec zèle.

La liberté de conscience n'est pas seulement un droit naturel; elle est encore un bien politique. On a remarqué que là où il existe diverses religions également autorisées, chacun dans son culte se tient davantage sur ses gardes, et craint de faire des actions qui déshonoreraient son église, et l'exposeraient au mépris ou aux censures du public. On a remarqué, de plus, que ceux qui vivent dans des religions rivales ou tolérées sont ordinairement plus jaloux de se rendre utiles à leur patrie que ceux qui vivent dans le calme et les honneurs d'une religion dominante. Enfin veut-on bien se convaincre de ce que je dis sur les avantages d'avoir plusieurs religions dans un état? Que l'on jette les yeux sur ce qui se passe dans un pays où il y a déjà une religion dominante et où il s'en établit une autre à côté presque toujours l'établissement de cette religion nouvelle est le plus sûr moyen de corriger les abus de l'ancienne.

En s'occupant de l'organisation des divers cultes, le gou- Des Juifs. vernement n'a point perdu de vue la religion juive. Elle doit participer, comme les autres, à la liberté décrétée par nos lois. Mais les Juifs forment bien moins une religion

Motifs du projet de loi.

qu'un peuple; ils existent chez toutes les nations sans se confondre avec elles. Le gouvernement a cru devoir respecter l'éternité de ce peuple, qui est parvenu jusqu'à nous à travers les révolutions et les débris des siècles, et qui, pour tout ce qui concerne son sacerdoce et son culte, regarde comme un de ses plus grands priviléges de n'avoir d'autres règlements que ceux sous lesquels il a toujours vécu, parce qu'il regarde comme un de ses plus grands priviléges de n'avoir que Dieu même pour législateur.

Après avoir développé les principes qui ont été la base des opérations du gouvernement, je dois m'expliquer sur la forme qui a été donnée à ces opérations.

Dans chaque religion il existe un sacerdoce ou un ministère chargé de l'enseignement du dogme, de l'exercice du culte, et du maintien de la discipline. Les choses religieuses ont une trop grande influence sur l'ordre public pour que l'État demeure indifférent sur leur administration.

D'autre part, la religion en soi, qui a son asile dans la conscience, n'est pas du domaine direct de la loi : c'est une affaire de croyance et non de volonté. Quand une religion est admise, on admet, par raison de conséquence, les principes et les règles d'après lesquelles elle se gouverne.

Que doit donc faire le magistrat politique en matière religieuse? Connaître et fixer les conditions et les règles sous lesquelles l'État peut autoriser, sans danger pour lui, l'exercice public d'un culte.

C'est ce qu'a fait le gouvernement français relativement au culte catholique. Il a traité avec le pape, non comme souverain étranger, mais comme chef de l'Eglise universelle, dont les catholiques de France font partie. Il a fixé avec ce chef le régime sous lequel les catholiques continueront à professer leur culte en France. Tel est l'objet de la convention passée entre le gouvernement et Pie VII, et des articles organiques de cette convention.

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