Obrazy na stronie
PDF
ePub

presque habitée que par des goîtreux; au commencement de ce siècle, elle comptait au moins un crétin par famille et elle avait de la peine à fournir un conscrit pendant les guerres du premier Empire. Elle doit une éternelle reconnaissance à un homme intelligent et courageux, M. Jean Cathaud, qui, en 4808, employa son modeste patrimoine à acheter et à améliorer une propriété de peu de valeur, quoique d'une grande étendue, qui était couverte de marécages et de flaques d'eau stagnante. Il s'opposa aux inondations de l'Arve par des digues et divers travaux; il dessécha le sol, le mina et le mit en culture. Les résultats furent merveilleux sous le point de vue agricole ; sa petite fortune, qui n'était que de 7,000 fr., s'éleva bientôt à 50,000 fr. Ses voisins, entraînés pas son exemple, l'imitèrent et obtinrent les mêmes succès, et la rive gauche de l'Arve, entre Sallanches et Saint-Gervais, fut entièrement transformée. Ce qui fut plus heureux, c'est que la population de Domancy ne tarda pas à devenir vigoureuse; les goîtres disparurent en grande partie et le crétinisme cessa.

Des faits semblables se sont produits sur un grand nombre de points de la Savoie. Rien de plus frappant que la double régénération du sol et des habitants obtenue dans la Maurienne, notamment depuis Aiguebelle jusqu'à la Chambre, par le diguement de l'Arc et de ses affluents et par le dessèchement de la vallée.

Mais il reste beaucoup à faire encore, non-seulement dans les plaines, mais aussi dans nos communes montagneuses. Il serait digne de l'Académie impériale de Savoie d'employer tous ses moyens pour secouer l'apathie des populations et détruire leur ignorance sur ce point. Le dessèchement des marais et des terres humides est un

des progrès les plus importants vers lequel le pays tout entier doit marcher avec persévérance.

En terminant sa communication, M. Chamousset invite l'Académie à prendre sur ses fonds une somme de 300 francs, pour proposer un prix à l'auteur du meilleur mémoire, où seraient décrits, sous le double point de vue hygiénique et agricole, tant les funestes effets des marais et des terres humides que les résultats importants obtenus par leur dessèchement, dans une localité quelconque, laissée au choix de chaque concurrent, mais appartenant à l'un des deux départements savoisiens.

L'Académie prend en considération le vœu émis par M. Chamousset et nomme une commission pour lui faire un rapport dans une prochaine séance.

M. d'Oncieu communique des documents qu'il a recueillis sur nos finances et leur organisation à diverses époques, et qui font connaître les mœurs, les usages, la fortune publique de ces époques plus ou moins éloignées de nous. Cette communication intéressante mérite d'être reproduite ici:

« J'ai l'honneur de vous soumettre aujourd'hui quelques documents ayant trait à l'histoire de nos finances et à leur organisation à diverses époques des âges qui nous ont précédés. L'histoire des finances est l'histoire de toutes les branches de l'administration, et rien n'est plus vrai que ce mot célèbre : « Donnez-nous de bonne politique et <<< vous aurez de bonnes finances. » En retournant cet axiome, nous en aurons un autre qui n'est pas moins juste: De bonnes finances supposent une bonne politique ; un système simple et peu compliqué dans la perception et l'emploi des revenus públics suppose une administration fonctionnant aisément et sans rouages trop multipliés, et

par suite la décentralisation et les libertés locales. Un compte général de trésorerie par recettes et dépenses, par entrées et sorties, nous fait connaître les sources des revenus publics; or, comme les revenus publics ne sont que la somme des revenus individuels et que ceux-ci ne s'alimentent que par le travail et l'activité des hommes, par là nous apprenons à connaître les mœurs, les coutumes, l'état relatif de prospérité et de richesse des diverses classes de la société, comme par l'emploi et la distribution des deniers publics nous sommes instruits de l'organisation des divers services, militaire, administratif, judiciaire, politique, à l'aide desquels fonctionne cette machine aujourd'hui si compliquée qu'on appelle l'État. Infiniment plus simple était ce mécanisme dans les siècles passés, et rien n'est curieux et instructif comme l'exposé général des finances de tout le royaume de Sardaigne, que Grillet, notre historien national, nous a conservé dans son dictionnaire historique.

<< Il y a un peu plus d'un siècle, en 1738, le revenu total de tous les États de terre-ferme s'élevait à 13 millions 509 mille 999 livres 19 sous neuf deniers (le revenu de la Sardaigne était de 429,352 livres). Les dépenses de tout l'État s'élevaient à 16 millions 740 mille 787 livres 13 sous huit deniers. Mais, comme il y avait en caisse, ou disponibles, provenant des épargnes faites avant l'an 1738, 40 millions 491 mille 104 livres 44 sous huit deniers, il en résulte que l'exercice de l'année se soldait par un excédant de recette de 7 millions et plus, c'est-à-dire par un excédant dépassant la moitié du revenu total de l'année. Dans quatre pages et demie se trouve compris tout le budget de l'année; là nous voyons que le roi, qui n'était autre que Charles-Emmanuel le Grand, touchait annuel

lement, pour ses menus plaisirs (je copie textuellement), 35 mille livres; la reine avait de même 35 mille livres et monseigneur le duc de Savoie 6 mille!! O tempora! o mores! Et pourtant moins de cent trente ans nous séparent de cet âge d'or! Qui connaissait, à cette époque de finances mythologiques, l'art de grouper les chiffres si secourable à nos financiers modernes, et comment avec un budget de quatre pages et demie pouvoir disposer si ingénieusement ses chapitres, sous-chapitres, articles et articles additionnels, de tant de façons diverses que le budget soit comme un thermomètre qui dans la main de l'un marque la chaleur de la vie et de la richesse, pendant que dans la main d'un autre il marque la froide misère et la menace des calamités publiques.

<< Les documents que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui sont au nombre de trois. L'un remonte à l'année 1393. C'est le compte général des recettes et des dépenses de la châtellenie de Rumilly en Albanais, rendu par Jean de Mionnaz, damoiseau, à la comtesse de Genevois, haute et puissante dame Marguerite de Joinville, fille d'Henri, sire de Joinville, comte de Vaudémont, et de Marie de Luxembourg. Elle avait épousé, le 2 mai 1374, Pierre, comte de Genevois, qui régna de l'année 1370 jusqu'au mois de mars 1394. Le compte dont il s'agit est rendu entre les mains de la comtesse, bien que son époux fût vivant alors, soit parce qu'en ce moment il était engagé dans quelque expédition de guerre, soit parce que la ville de Rumilly faisait partie du domaine particulier de la comtesse, ainsi que nous l'apprennent les historiens. Le premier article du compte est le froment. A cette époque de l'enfance de la science de la comptabilité, le receveur, soit le châtelain de Rumilly, recevait du froment; il livrait

d

du froment en quantité égale; il recevait de l'avoine, il livrait de même de l'avoine. Aussi les articles de recette sont-ils suivis immédiatement de l'article de dépense qui leur est correspondant. Dans notre compte figurent d'abord le revenu et l'emploi du froment et de l'avoine, qui s'élèvent, pour le premier, au chiffre de 356 coupes, et à celui de 144 coupes pour l'avoine. Viennent ensuite les tourtes, puis les poules et poulets, puis la cire dont une partie a été livrée pour l'hôtel de la comtesse, l'autre pour sa chapelle; le chanvre, les deniers de cense, les tailles, les fermes, les revenus provenant des droits de toisage (theysia), de garde, d'introge; les bans concordés (article spécialement intéressant pour la pénalité et les mœurs de l'époque), les bans de la champerie (le champier dépendait du châtelain), les échutes, les plaicts, les objets légués, les objets trouvés, les lauds et ventes. En dernier lieu, viennent certaines dépenses spéciales, les réparations au château, à divers bâtiments; enfin, les sommes livrées pour l'hôtel de la comtesse, puis le salaire du châtelain.

<< Ce compte est écrit sur un rouleau de parchemin composé de plusieurs peaux.

<< Le second de ces documents est un aperçu sommaire des revenus du duché de Savoie, dressé par ordre et pour compte de la cour de France, selon toute apparence, à l'époque du ministère du cardinal de Richelieu.

<«<Le troisième, qui est beaucoup plus détaillé et beaucoup plus intéressant, est intitulé: Sommaire calcul de la trésorerie générale de Savoye tant des restants que des quartiers de mars et juin 1659.

<< Ce compte, présenté le sixième septembre 1659, est signé Métral. Il s'agit de noble Jacques Métral, conseiller de S. A. R. et son trésorier général deçà les monts. On y

« PoprzedniaDalej »