Obrazy na stronie
PDF
ePub

Comme nos citoyens de race désireux,
Qui bercent les enfans qui ne sont pas à eux.
Ainsi, tirant profit d'une fausse doctrine,
S'ils en sont accusés, ils feront bonne mine,
Et voudront, le niant, qu'on lise sur leur front,
S'il se fait un bon vers, que c'est eux qui le font".
Jaloux d'un sot honneur, d'une bastarde gloire,
Comme gens entendus s'en veulent faire accroire:
A faux titre insolens, et, sans fruict hazardeux,
Pissent au benestier 8, afin qu'on parle d'eux.
Or avecq' tout cecy, le point qui me console,
C'est que la pauvreté comme moi les affole9;
Et que, la grace à Dieu 10, Phoebus et son troupeau,
Nous n'eusmes sur le dos jamais un bon manteau.
Aussi lors que l'on voit un homme par la ruë,
Dont le rabat est sale et la chausse rompuë,

7 Vers monosyllabique.

8 Autre expression proverbiale non moins énergique que la précédente. Les Grecs avoient un proverbe semblable, Evo Xσx, qu'on peut rendre ainsi en latin : In Pythii templo cacare. ERASM. Adag., chil. 4, cent. 2, 65. Benestier : Anciennement on disoit beñoitier et benétier; aujourd'hui on ne dit que bénitier.

9 Les affole.] Les foule, les blesse, les incommode. Affoler, en ce sens, n'est plus en usage:

Encor est-ce un confort à l'homme malheureux,
D'avoir un compagnon au malheur qui l'affole.

C'est la fin d'un des sonnets de Philippe Desportes, Amours de Diane, sonnet 14.

10 On dit maintenant grâces à Dieu; mais la grâce à Dieu› étoit la façon de parler usitée du temps de Regnier, et même plus anciennement, car dans les Nouvelles Récréations de Bonaventure Des Periers, imprimées en 1558, et dont le privilége est de 1557, on lit : « Le bon homme lui respond qu'il n'en avoit point été malade, et qu'il avoit tousjours bien ouy, la grace à Dieu. » Nouv. x, p. 42.

[ocr errors]

Ses gregues11 aux genoux, au coude son pourpoint,
Qui soit de pauvre mine, et qui soit mal en point,
Sans demander son nom on le peut reconnoistre ;
Car si ce n'est un poëte 12, au moins il le veut estre.
Pour moy, si mon habit, par tout cicatrisé,
Ne me rendoit du peuple et des grands mesprisé,
Je prendrois patience, et parmy la misere
Je trouverois du goust; mais ce qui doit desplaire
A l'homme de courage et d'esprit relevé,
C'est qu'un chacun le fuit ainsi qu'un réprouvé.
Car, en quelque facon, les malheurs sont propices.
Puis les gueux en gueusant trouvent maintes délices,
Un repos qui s'esgaye en quelque oysiveté..
Mais je ne puis patir 13 de me voir rejetté.

11 Les grègues étoient une espèce de haut-de-chausses ou de culottes. Le pourpoint étoit une sorte de vêtement à manches, et que notre habit a remplacé.

12 Regnier fait toujours ce mot poëte de deux syllabes, quoiqu'il en ait trois, suivant son étymologie, rointùs, poëta, et suivant l'usage. Daus la première édition, de 1608, ce même mot est partout imprimé avec une diphtongue, en cette manière pate. Notre auteur n'a fait ce mot de trois syllabes que dans un seul endroit, qui est le vers 49 de la satire XII. L'usage de faire poëte et poëme de deux syllabes s'est conservé long-temps après Regnier :

Tout vient dans ce grand poëme admirablement bien,

dit Th. Corneille.

Comme un poëte fameux il se fait regarder.

P. CORNEILLE.

Quintilien, Instil. orat., lib. 1, cap. 5, cite un vers de Varron où ce poëte avoit aussi resserré deux syllabes en une dans le mot Phaeton, qui en a trois :

Cum te flagranti dejectum fulmine Phæton.

13 Pâtir est hors d'usage dans le sens de ce vers; on dit à présent souffrir, mot qu'on a substitué à l'autre dans l'édition de 1642 et dans les suivantes.

C'est donc pourquoy, si jeune abandonnant la Fran-
J'allay, vif de courage et tout chaud d'esperance, [ce,
En la cour d'un prélat1 qu'avec mille dangers
J'ay suivy, courtisan, aux païs estrangers.
J'ay changé mon humeur, alteré ma nature;
J'ay beu chaud, mangé froid, j'ay couché sur la dure 15;
Je l'ay, sans le quitter, à toute heure suivy;
Donnant ma liberté je me suis asservy,

En public, à l'église, à la chambre, à la table,
Et pense avoir esté maintefois agréable.

Mais, instruit par le temps, à la fin j'ay connu Que la fidelité n'est pas grand revenu;

Et qu'à mon temps perdu, sans nulle autre esperance,
L'honneur d'estre sujet tient lieu de récompense :
N'ayant autre interest de dix ans ja passez,
Sinon que sans regret je les ay despensez.
Puis je sçay, quant à luy, qu'il a l'ame royalle,
Et qu'il est de nature et d'humeur liberalle.
Mais, ma foy, tout son bien enrichir ne me peut,
Ny domter mon malheur, si le ciel ne le veut.

44 En la cour d'un prélat...] Ne serait-ce pas François de Joyeuse, cardinal en 1583, et archevêque de Toulouse en 1585? Ce prélat fit plusieurs voyages à Rome, où Regnier, en 1583, n'ayant encore que vingt ans, le suivit, et s'attacha à lui jusqu'à la fin de 1603, sans en avoir tiré de récompense, puisque le premier bénéfice qu'il ait eu, et qu'il obtint par une autre voie, fut un canonicat de Chartres, en possession duquel il entra le 30 juillet 1604. J'ajoute à ces conjectures le mot cour, dont le poëte use ici, et l'idée qu'il donne, dans les vers suivants, de la magnificence du prélat.

15 J'ai beu chaud.....] J.-B. Rousseau, épigr. xxv, liv. 2, définit ainsi un courtisan:

[blocks in formation]
[graphic][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed][subsumed]
[graphic]

Les adjuge au mérite, et non point au hazard. Puis l'on voit de son œil, l'on juge de sa teste Et chacun en son dire a droict en sa requeste Car l'amour de soy-mesme et nostre affection Adjouste avec usure à la perfection.

Tousiours le fond du sac ne vient en évidenc Et bien souvent l'effet contredit l'apparence. De Socrate à ce point l'oracle est my-party 18; Et ne sçait-on au vray qui des deux a menty Et si philosophant le jeune Alcibiade 19, Comme son chevalier, en receut l'accolade.

[ocr errors]

18 Ce vers a beaucoup varié. Dans la première édi lit: De Socrate à ce point l'arrest est my-party. Dans ce 1612 et 1613, faites pendant la vie de l'auteur, et d éditions suivantes, il y a l'oracle au lieu de l'arrest. Da de 1642, et les autres qui ont été faites après, on a m Socrate en ce point, etc. L'expression de ce vers et de suivants est embarrassée. Oracle ou arrest, que portoit mière version, ne signifie peut-être en cet endroit q nion publique, qui, en effet, est double sur le compte crate, sa liaison avec Alcibiade ayant été l'objet de so que Cicéron lui-même a tournés en plaisanterie : Qui cratem nonne legimus quemadmodum notarit Zopyrus?..... etiam mulierosum: in quo Alcibiades cachinnum dicitur sus CIC. de Fato.

Boileau, satire XII, s'est emparé de la pensée de Re qu'il a rendue avec son élégance accoutumée.

Et Socrate, l'honneur de la profane Grèce,
Qu'étoit-il, en effet, de près examiné

Qu'un mortel par lui-même au seul mal entraîné,
Et, malgré la vertu dont il faisoit parade,

Très équivoque ami du jeune Alcibiade?

19 Ce vers est encore amphibologique; on ne sait gnier a voulu dire: Et si Socrate philosophant le jeune Alc pour enseignant la philosophie au jeune Alcibiade; ou, pa inversion forcée: Et si le jeune Alcibiade philosophant. Ce nier sens a paru plus convenable à quelques éditeurs depuis 1642, ont mis une virgule après le mot philoso Nous croyons devoir rétablir le premier texte, dans la c

« PoprzedniaDalej »