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Ce qu'ils pensoient servir pour le bien de l'empire.
Et comme la jeunesse est vive et sans repos,
Sans peur, sans fiction, et libre en ses propos,
Il semble qu'on luy doit permettre davantage.
Aussi que les vertus fleurissent en cet âge,
Qu'on doit laisser meurir sans beaucoup de rigueur,'
Afin que tout à l'aise elles prennent vigueur.

C'est ce qui m'a contraint de librement escrire,
Et, sans picquer au vif, me mettre à la satyre,
Où, poussé du caprice, ainsi que d'un grand vent,
Je vais haut dedans l'air quelque fois m'eslevant;
Et quelque fois aussi, quand la fougue me quite,
Du plus haut au plus bas mon vers se précipite,
Selon que du suject touché diversement,
Les vers à mon discours s'offrent facilement.
Aussi que la satyre1
e19 est comme une prairie,

se rapporte à jeunes Romains, et non pas un adverbe. C'est ainsi que Ronsard a dit:

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et que Regnier lui-même dit plus loin, satire 11, vers 28:

Et que ces rimasseurs.......

N'approuvent impuissans, une fausse semence.

19 Aussi que la satyre...] Par ce vers et les trois suivants, Regnier a prétendu vraisemblablement désigner la satire des Grecs, qui consistoit, ainsi que nous l'avons dit, dans l'alliance du grave avec le bouffon, car la satire romaine, dont Lucilius fut l'inventeur, est un poëme railleur ou piquant, composé pour critiquer les ouvrages ou pour reprendre les mœurs. «Satira dicitur carmen apud Romanos nunc quidem maledicum, et ad carpenda hominum vitia archææ coinœdiæ caractere compositum, quales scripserunt Lucilius et Horatius et Persius. Sed olim carmen, quod ex variis poematibus

Qui n'est belle sinon en sa bisarrerie;

Et comme un pot pourry 20 des frères mandians,
Elle forme son goust de cent ingredians.

Or, grand roy, dont la gloire en la terre espenduë,
Dans un dessein si haut rend ma muse esperduë,
Ainsi que l'œil humain le soleil ne peut voir,
L'esclat de tes vertus offusque tout sçavoir;
Si bien que je ne sçay qui me rend plus coulpable,
Ou de dire si peu d'un suject si capable,

Ou la honte que j'ay d'estre si mal apris,
Ou la témerité de l'avoir entrepris.

Mais quoy, par ta bonté, qui toute autre surpasse,
J'espère du pardon, avecque ceste grace
Que tu liras ces vers, où jeune je m'esbas
Pour esgayer ma force; ainsi qu'en ces combas
De fleurets on s'exerce, et dans une barriere
Aux pages l'on reveille une adresse guerriere,
Follement courageuse, afin qu'en passe-temps
Un labeur vertueux anime leur printemps,
Que leur corps se desnoue, et se desangourdisse,
Pour estre plus adroits à te faire service.
Aussi je fais de mesme en ces caprices fous:
Je sonde ma portée et me taste le pous,
Afin que s'il advient, comme un jour je l'espere,
Que Parnasse m'adopte 21 et se dise mon pere,

constat, satyra vocabatur, quales scripserunt Pacuvius et Ennius.» DIOMED. ex lib. II Grammat.

20 Pot pourry... Mélange de viandes et de légumes divers. En espagnol, olla podrida.

21 Que Parnasse m'adopte...] Cette version est celle de l'édition de 1608. Celles de 1612 et 1613 portent : Que Parnasse m'adore. Quoique faites pendant la vie de l'auteur, nous regardons ce changement comme une faute plutôt que comme une correction.

Emporté de ta gloire et de tes faits guerriers,
Je plante mon lierre au pied de tes lauriers 22.

22 Ménage a ainsi déguisé ce vers charmant, pour l'insérer dans son églogue à la reine Christine :

Rampe notre lierre au pied de tes lauriers.

ce qui lui a été reproché par Gilles Boileau, dans son Avis à Ménage.

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A MONSIEUR LE COMTE DE CARAMA

omte, de qui l'esprit pénètre l'unive Soigneux de ma fortune et facile à mes Cher soucy de la muse, et sa gloire f Dont l'aimable génie et la douce na Fait voir, inaccessible aux efforts médisans, Que vertu n'est pas morte en tous les courtisa Bien que foible et débile, et que mal reconnu Son habit décousu la montre à demy nuë; Qu'elle ait seche la chair, le corps amenuisé, Et serve à contre-cœurs le vice auctorisé, Le vice qui pompeux tout mérite repousse,

* Ou plutôt le comte de Cramail, nom qui, selon M se dit par corruption, pour Carmain, changé en Crama l'édition de 1642, et dans toutes celles qui l'ont sui lit Caramain dans les éditions précédentes, à remont qu'à la première, de 1608, où il y a Caramain.

Adrien de Montluc, comte de Cramail, fut l'un des esprits de la cour de Louis XIII. Il étoit né l'an 1568, bien de Montluc, fils du fameux maréchal Blaise de M et mourut en 1646. On lui attribue la comédie des Pro pièce singulière, et l'une des plus comiques de son ainsi qu'un livre rempli de quolibets, intitulé les Jeux

2 Comte, de qui l'esprit...] Les douze premiers ver tiennent une apostrophe imparfaite dont le sens n'es fini.

Et va, comme un banquier, en carrosse et en housse3.
Mais c'est trop sermonné de vice et de vertu.
Il faut suivre un sentier qui soit moins rebatu;
Et, conduit d'Apollon, recognoistre la trace
Du libre Juvenal: trop discret est Horace,
Pour un homme picqué; joint que la passion,
Comme sans jugement, est sans discretion.
Cependant il vaut mieux sucrer nostre moutarde':
L'homme, pour un caprice, est sot qui se hazarde.
Ignorez donc l'autheur de ces vers incertains,
Et, comme enfans trouvez, qu'ils soient fils de putains,
Exposez en la ruë, à qui mesme la mere,
Pour ne se descouvrir, fait plus mauvaise chere.

Ce n'est pas que je croye, en ces temps effrontez,
Que mes vers soient sans pere et ne soient adoptez;
Et
que ces rimasseurs, pour feindre une abondance,
N'approuvent impuissans une fausse semence :

3 En housse, c'est-à-dire à cheval. Du temps de Regnier, les carrosses n'étoient pas si communs qu'ils le sont devenus dans la suite. On n'alloit par la ville qu'à cheval, ou monté sur des mules couvertes d'une grande housse qui descendoit presque jusqu'à terre. Cet usage s'est maintenu fort longtemps parmi les médecins de Paris, témoin ce vers de Boileau, satire vii, en 1667 :

Quand il voit.

Courir chez un malade un assassin en housse.

Expression proverbiale bien énergique.

5 Ce vers ferait soupçonner que c'est ici la première satire de Regnier, qui ne vouloit pas alors que l'ou sût qu'il en étoit l'auteur.

6 Chère, accueil, visage du latin cara, pour facies, vultus. Postquam venêre verendam

Cæsaris ante caram.

CORIPPUS, de Laudibus Justini, lib. II.

(Voyez Du Cange, Ménage, etc.)

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