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et sont-elles encore applicables aux sociétés religieuses, ou bien ont-elles été virtuellement abrogées par la proclamation solennelle de la liberté des cultes? Nous n'entreprendrons pas de discuter dans toute son étendue une question qui demanderait un livre, et qui, après tant d'années de controverse, divise encore publicistes et jurisconsultes. Nous n'en dirons que ce qui est nécessaire pour l'intelligence et l'appréciation des règles établies par la jurisprudence.

Les faits, les besoins du temps ont eu une large part dans l'application du principe de la liberté des cultes. Ceux des commentateurs que leur position, ou la tendance de leur esprit entraînait à tenir plus de compte de l'intérêt social que des exigences du droit naturel, et avec eux les tribunaux dont l'œuvre de chaque jour est de chercher dans la loi des armes pour contenir les passions, se sont retranchés dans une distinction entre la liberté de conscience et la liberté de l'exercice du culte. « La liberté des croyances est intime, disait M. Dupin en s'adressant à la chambre des députés, le 28 avril 1845, la loi ne les interroge jamais; mais le culte se manifeste et se révèle par des rassemblements et des cérémonies : c'est là qu'intervient l'action de la loi; c'est pour cela qu'elle a donné la liberté aux cultes reconnus et autorisés, mais elle n'a pas d'avance déclaré qu'elle autoriserait tout culte qui serait présenté comme tel, et qui sortirait du cerveau ou de la fantaisie de celui qui voudrait devenir l'apôtre de ce prétendu culte.... à côté de chaque

son appartement, en tout ou en partie, pour la réunion des membres d'une association, même autorisée, ou pour l'exercice d'un culte sera puni d'une amende de 16 fr. à 200 fr.

culte dans ce qui constitue ses vrais caractères, sa régularité, ce qui est sincère, ce qui est respectable, ce qui doit être protégé, viennent se placer des excentricités, soit qu'elles tiennent à l'exaltation de l'esprit religieux, soit qu'elles tiennent à ces calculs ambitieux qui ne sont la religion dans aucun culte, mais qui, dans tous les cultes, servent trop souvent de manteau aux ambitieux, aux imprudents et à ceux qui veulent dominer au nom de la religion et de la liberté des cultes (1). >>>

(1) Cette doctrine est aussi celle que professe dans son Traité de la police extérieure des cultes, M. L. Dufour, aujourd'hui premier avocat général près la cour de Bordeaux. «En assurant aux cultes, écrit-il, un libre exercice, en leur promettant une égale protection, la loi n'a point entendu sanctionner d'avance toutes les rêveries humaines, ni accorder droit de cité aux utopies religieuses sorties d'un cerveau dépravé ou téméraire; elle a voulu, sans doute, satisfaire un besoin sérieux, et elle s'est réservé d'interdire toute pratique qui serait dangereuse pour les mœurs ou les institutions. Parmi les citoyens dont la tutelle lui est confiée, nul ne doit être intéressé à professer extérieurement une superstition ridicule ou contraire aux principes qui régissent, soit les destinées de l'homme, soit celles des sociétés; invoquât-on, d'ailleurs, pour justifier cette indépendance sans limites, une sorte de liberté innée, inviolable, inaliénable, un droit antérieur à toutes les constitutions, l'intérêt commun doit l'emporter sur l'intérêt individuel, le droit social exige certains sacrifices du droit naturel et n'existe qu'à cette condition. L'État représenté par les pouvoirs publics peut donc contraindre d'enfermer dans le mystère de la conscience, tout dogme qui lui paraîtrait manifestement préjudiciable ou justement suspect; la liberté des cultes ne pourra faire, dès-lors, qu'un citoyen s'élevant tout à coup et de luimême à la dignité de prophète ou de révélateur, enseigne sa doctrine, s'entoure de disciples, et dresse une tente ou élève un édifice au lieu qu'il lui plaira choisir pour y exposer les symboles et y mettre en pratique les rites de la nouvelle religion dont il s'est fait le pontife, et peut-être le Dieu. Ce ne serait plus alors la liberté, ce serait l'anarchie des cultes que souffrirait l'État;

La cour de cassation, en prenant son point de départ dans cette distinction a été amenée à décider que

la sécurité serait menacée aussitôt, puisque des atteintes continuelles pourraient être portées, sous le prétexte religieux, à l'ordre politique et à l'ordre moral, ces deux bases de la société civile. »

D'autres jurisconsultes, M. Nachèt, dans son livre intitulé: De la liberté religieuse en France; mon savant confrère, Me Delaborde, dans une série de Mémoires et plaidoyers, qui portent l'empreinte d'un talent éprouvé et d'une conviction profonde, et enfin les auteurs de la Théorie du Code pénal, repoussent, au contraire, toute distinction entre la liberté de conscience et la liberté de l'exercice du culte. « Toutes les religions sans exception, s'écrie M. Delaborde, ont droit de bourgeoisie dans la cité, y peuvent marcher tête levée, et sont impartialement protégées par l'Etat, non point comme les manifestations diverses de la vérité divine, puisque nulle appréciation dogmatique n'est de son ressort, mais comme les expressions légales d'un seul et même besoin, d'un seul et même droit, de celui qu'a tout homme d'offrir à Dieu les hommages qu'il croit lui être agréables; que ces hommages ne sont pas seulement ceux qui constituent le culte intérieur de l'âme, mais ceux qui caractérisent le culte extérieur dans la plénitude de ses rites, de ses symboles et de ses cérémonies. » (Voy. Liberté religieuse. - Mémoires et plaidoyers, p. 17.) — La liberté religieuse, écrivent de leur côté MM. Chauveau et Faustin Hélie, c'est le droit de croire et de prier ensemble. En proclamant que« chacun professe sa religion avec la même liberté et obtient pour son culte la même protection, » la Charte n'a donc pas proclamé seulement la liberté de conscience, mais la liberté du culte. Et que serait-ce, en effet, que cette libre profession de la religion, si elle était restreinte au culte individuel? La prière isolée a-t-elle besoin de protection? La pensée ne brave-t-elle pas les défenses de la loi?... Cette proclamation solennelle de la liberté des cultes ne s'appliquerait qu'à la liberté de conscience! Mais, avant la Charte, cette liberté était inscrite dans nos lois, et les temps des persécutions étaient passés. Qu'était-il donc besoin qu'elle fût scellée dans l'acte constitutionnel? Quel bienfait nouveau apportait-elle parmi nous? Non, la liberté religieuse, ce n'est pas seulement la liberté de penser, c'est celle de professer son culte, de rechercher ceux qui confessent la même foi, de se réunir dans les mêmes

la pensée de la Charte n'avait point été de soustraire les réunions religieuses à l'empire des art. 291, 292 et 294 du Code pénal, complétés par les art. 1 et 2 de la loi du 10 avril 1834, sur les associations (Voy. arrêts, 20 mai 1836, 22 juillet 1837, 12 avril 1838, 22 avril 1843), et que ces dispositions n'avaient point eu, non plus, à souffrir de la consécration nouvelle du principe de la liberté des cultes dans la Constitution du 14 janvier 1852. (Voy. arrêt 9 décembre 1853.)

2. On avait, il est vrai, d'abord cru devoir restreindre les mesures de police générale aux cultes non reconnus; on se refusait à admettre qu'une réunion dont le but n'était que l'exercice d'un culte reconnu, pût être considérée comme association illi-. cite; et on jugeait que ces réunions, étrangères aux prévisions de l'art. 291, n'étaient subordonnées qu'aux prescriptions édictées dans un intérêt de police locale par l'art. 294. Le ministre ou le simple fidèle de tout culte reconnu qui voulait former une réunion pour l'exercice de ce culte, n'était point tenu de se munir d'une autorisation du gouvernement, il n'avait qu'à se préoccuper de la permission à obtenir de l'autorité municipale. Mais les abus et les dangers que comportait l'exercice du privilége ainsi accordé aux cultes reconnus ne tardèrent point à se révéler. On comprit bientôt que si l'ordre public n'avait rien à craindre de réunions convoquées dans des temples ouverts à tous, et présidées par des ministres revêtus

actes de piété, de s'associer pour se rattacher au même symbole. Telles sont les conséquences immédiates du principe que la loi a consacré et elle n'en a point restreint la puissance. » (Voy. Théorie du code pénal, t. VII, p. 404.)

d'un caractère public, il n'était pas possible de l'a→ bandonner à la merci des associations particulières qui se peuvent former au sein des différentes religions, et de laisser à quiconque professe l'un des cultes reconnus par l'État, pleine et entière liberté d'aller dresser une chaire ou élever un autel partout et hors l'enceinte des édifices consacrés à ce culte. Depuis 1838, il est passé en force de chose jugée que, même à l'égard des cultes reconnus, les réunions qui impliquent une association formée dans le but de s'occuper d'objets religieux, ailleurs que dans les temples publiquement fréquentés, sont passibles de l'application de l'art. 291, et ne peuvent, par conséquent, avoir lieu sans une permission du Gouvernement. (Voy. arrêts 12 avril 1838; 22 avril 1843.)

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C'est là un principe qui, en donnant toute garantie à la société, ménage et respecte cependant les droits et l'autorité des ministres ou prêtres de toute religion dont l'organisation est reconnue par l'État. Ses conséquences n'atteignent que les actes qui ne se trouvent point couverts par cette organisation même (1).

3. Les cultes reconnus sont ceux dont l'existence est autorisée et protégée par les lois. Le culte simplement toléré ou autorisé par le Gouvernement ne peut être considéré comme reconnu. Le législateur ne se borne point à autoriser les cultes qu'il reconnaît, il intervient dans leur organisation et les protége dans leur exercice.

(1) Le pasteur autorisé par un consistoire à se rendre dans une commune de la circonscription assignée à ce consistoire, n'a pas d'autorisation spéciale à demander au gouvernement. (Voy. ord. 30 mars 1846, Perturon.) L'ordonnance qui a créé le consistoire a autorisé l'exercice du culte dans la circonscription par elle fixée.

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